Le duo électronique français Kas:st a profité de la situation actuelle pour s’enfermer pendant près de 6 mois dans son studio. « A Magic World » est le résultat de ce confinement musical, un album aux influences et styles multiples dans lequel il redéfinit son style dans la continuité de ses sorties récentes sur le label italien de techno mélodique Afterlife.
Le projet Kas:st débute en 2016, lorsque les deux producteurs parisiens présentent Dysphoria I Euphoria sur leur label Flyance Records, un double EP qui pose les bases de leur musique mélodique et rêveuse. S’ensuivent une collaboration avec la légende de la deep house Kerri Chandler, un EP signé sur Afterlife, et un premier album en 2019, année très prolifique pour le duo. Ce catalogue est complété par de nombreux remixes de leurs titres par des producteurs à l’avant-garde de la techno comme 999999999, Tale Of Us, Anetha ou Claudio PRC.
Sorti en décembre 2020, A Magic World nous plonge dans une musique électronique mélancolique et sensible. Les styles varient tout au long de l’album, de l’électro-pop à la trance en passant par la techno mélodique, le breakbeat et les arrangements orchestraux. En réalité, il a été pensé comme une sorte de vitrine des nombreuses influences musicales du duo, comme il l’explique lui-même dans sa biographie : “Notre prochain album est une exploration artistique […] qui, à notre sens, démontre nos nombreuses influences musicales. A Magic World est notre véhicule pour présenter un mélange d’influences électroniques, rap, pop et classiques, tout en restant fidèle aux sons de la techno.”
Ce pari en faveur de l’éclectisme n’est donc pas vraiment exceptionnel, mais reste risqué, puisque de nombreux albums présentent des rythmes et sonorités qui changent sans cesse et peuvent faire disparaître l’identité musicale de l’artiste. Ce n’est pas le cas ici, puisqu’on retrouve tout au long de A Magic World les lignes de synthés spatiales, la mélancolie générale et la techno sombre mais contrôlée qui sont si caractéristiques du duo.
Au fur et à mesure de l’écoute, on se rend compte que l’intérêt principal de l’album se trouve dans la singulière prise de risques de Carol et Manuel. Avec A Magic World, Kas:st a pris ses distances avec la techno industrielle qu’il a produit entre 2016 et 2019 et grâce à laquelle il s’est imposé dans la scène électronique française, avec des sorties dans des labels de taille comme Concrete Music, A.R.T.S ou Materia. De nombreux fans de la musique que les deux producteurs français sortaient il y a 2 ou 3 ans seront déçus avec cet opus, bien plus accessible. Même si l’album reste innovant dans son ensemble, certains titres teintés d’électro-pop et rap comme « Siren » ou « Hope I’m Alone » sont accrocheurs mais prévisibles. Il n’est pas facile de toucher à autant de styles et de tous les maîtriser, le duo reste pourtant à la hauteur de la tâche qu’il s’est donnée. L’éclectisme est bien mené et le virage musical paraît surprenant mais relève en fait d’une volonté de ne rentrer dans aucune case, même lorsqu’on y est bien installé.
Photo en une : Kas:st © Henri Coutant
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