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Idles, le réveil de l’Angleterre

Quelque chose s’est réveillé en Angleterre, quelque chose que ni des années de thatchérisme, ni les circonvolutions néolibérales qui ont suivi n’ont réussi à complètement faire taire : la musique comme révélatrice d’une lutte des classes que l’on nous avait expliqué disparue. Retour sur l’album Ultra Mono d’Idles.

C’est ici que se niche Idles depuis la sortie de leur premier album Brutalism (2017). Sans être les descendants directs du punk – ce crachat éphémère à la face de l’entertainement à la fin des années 70 – Idles remet sur la table son rock social sous la forme d’une petite bombe de 42 minutes nommée Ultra Mono. Si les punks avaient comme devise « No Future », Idles joue dans une autre cour, celle d’un rock humaniste en abordant les questions qui agitent nos sociétés et cultivant le paradoxe entre la brutalité musicale et une observation sensible du monde du point de vue des classes moyennes. Même si les paroles paraîtront peut-être un poil naïves ou encombrées de quelques clichés à certain·e·s, on est bien loin de l’accusation « d’appropriation de la cause ouvrière », ou d’un quelconque côté « donneurs de leçons », n’en déplaise à Sleaford Mods et à Fat White Family.

Naïveté peut-être, encore que, mais salvatrice dans sa diffusion de messages débarrassés de métaphores pontifiantes sur l’état du monde et de vains apitoiements qui parfois coulent sous la plume de nos auteurices préféré·e·s . C’est sans doute dans cette vision des choses que se cache la grande force d’Ultra Mono, celle d’affronter le monde dans sa brutalité, de s’accepter soi et les autres (« Mr Motivator »), à sortir la tête du seau sans accepter l’état des choses (« Model Village« ) mais plutôt en trouvant un moyen collectif de bouger un peu les lignes. Si le point de vue semble quelque peu naïf, il a le mérite de porter un optimisme dont nous manquons souvent cruellement.

S’il est possible de se perdre des heures en commentaire de texte, Idles met tout le monde d’accord dans sa maîtrise de la composition et de la production. Accompagnés du producteur Kenny Beats, les énervés de Bristol jouent fort, très fort, le son est dense, épais, brûlant à tel point qu’il est difficile de s’en décoller. Sans se renier, les Anglais se laissent aller à des expérimentations sonores, des intros surprenantes (« Kill Them With Kindness« ) voire à lorgner hors du rock, à l’image du titre « Reigns » dont la brutalité de la basse rappelle les rythmes techno.

Idles, nous offre un retour bruyant, solide et éminemment jouissif. Un album suant, qui sonne comme un hymne du grand rassemblement des paumé·e·s et des anxieux·ses des classes moyennes, des invisibles et des fatigué·e·s des classes populaires avides de bruit et de fureur. Nul doute que dans des jours meilleurs, les refrains d’Ultra Mono résonneront furieusement dans les salles de concert.

Non, définitivement, quelque chose s’est réveillé en Angleterre.

Packshot Ultra Mono

Idles a sorti l’album Ultra Mono le 25 septembre 2020, sur Partisan Record.

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