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Erik Truffaz : « Plus un musicien rock qu’un soliste de jazz »

Si le « z » de son nom est muet, heureusement pour nous le trompettiste le plus rock du monde du jazz ne l’est pas. Entre son dernier album « In Between » et ses nouvelles collaborations musicales, rencontre au fil de l’eau avec Erik Truffaz, personnage discret et habité, à quelques jours de son concert à la Cigale.

Depuis 1997, vous avez toujours conservé cette dynamique du quartet, ce qui vous apparente facilement à un groupe de rock, pourquoi ?
Le premier groupe que j’ai créé en 1991, c’était déjà avec Erbetta et Giulianni. On marche très bien ensemble, on se renouvelle assez facilement. Et puis, cette formule clavier/basse/batterie/trompette nous convient bien. La manière dont je joue de la trompette est presque celle d’un chanteur. On compose les morceaux comme si on était un groupe pop, mais avec le son, la liberté du jazz. J’arrive aussi à jouer avec d’autres formules, mais je reviens toujours à celle-ci. C’est une dynamique positive. J’ai besoin des autres. Et puis, je pense que Giulianni et Erbetta sont réellement les meilleurs au monde, donc, un bon groupe quand on le tient, on ne le jette pas à la poubelle !

Vous parlez de formation type « pop », mais vous apparaissez aussi comme l’un des principaux musiciens de jazz à faire autant de passerelles avec les différents styles musicaux ; le hip hop avec Sly sur « Paris », l’électro avec Murcof sur « Mexico ». C’est une démarche personnelle ou vous pensez que c’est inhérent au jazz ?
Les deux. L’essence même du jazz, voire même de la musique, c’est la fusion. Le jazz, c’est le mélange de la musique européenne et des rythmes africains par les noirs américains. C’est une musique qui donne beaucoup de liberté au niveau de la forme. Moi je joue de l’instrumental. Je serai chanteur, j’aurais moins de liberté, quoi que Gainsbourg en ait pris pas mal. « Paris » (2008), c’est l’album qui m’a pris le plus de temps, on l’a fait chez moi, à deux, avec Sly. Pour « Mexico » (2008), ce n’était pas très dur. Murcof est un génie absolu. Il m’envoie des petites lignes rythmiques, je pose de la trompette dessus et c’est déjà intéressant. J’essaie de m’entourer de gens habités, ils me tirent vers le haut.

Truffaz & MurcofAl Mediodia

Comme Sophie Hunger, qui est présente sur deux titres de « In Between », notamment pour une reprise de Dylan ?
Sophie, elle a été découverte par mon management, donc je l’ai découverte sur cassette. A l ‘époque d’ « Arkhangelsk » (2007), quand Ed Harcourt n’était pas là, c’est elle qui le remplaçait. Et puis, elle a fait mes premières parties, Giulianni a produit son premier album (« Monday’s ghost » – 2008), Corboz l’a mixé… C’est quelqu’un de brillant, lumineux. « Dirge », c’est elle qui l’a trouvé.

Ce qui est intéressant avec cette chanson, c’est qu’elle exploite le thème de la rupture de manière sombre, mais avec une note d’espoir. Elle donne un peu l’atmosphère générale du disque.
Oui, c’est joli. Quand Sophie a trouvé cette chanson, je composais déjà les thèmes de l’album, et il s’est articulé autour d’une séparation que j’étais en train de vivre. Elle a choisi ce morceau complètement par hasard alors qu’il correspondait exactement à ce que j’étais en train de vivre. C’est le hasard, mais ça montre bien que la musique reste le miroir de notre intérieur.

La distorsion sur la trompette, qui vous a démarqué à l’époque de « The walk of the Giant Turtle » (2003), a disparu sur « In Between », votre dernier album. On a l’impression que vous avez laissé le côté électro/funk uniquement aux claviers de Corboz.
J’utilise encore la distorsion sur scène, mais quand je joue avec Rodolphe Burger, qui fait de la musique plus rock. Au départ, sur « The Walk », j’avais peu utilisé la distorsion, mais ils en ont rajouté au mixage. Au début j’étais furieux. Après j’ai trouvé ça super et je m’en suis achetée une. C’est une histoire de contexte. Sur « In Between », on a voulu faire un album plus ambient, donc le son de la trompette pur se prête mieux à ça. Quant à Corboz, c’est un type qui a une immense culture classique, mais qui vient du funk. Il a une approche très rythmique de la musique.

Vous avez l’air d’accorder une immense place aux gens avec qui vous travaillez. Des projets de collaboration ?
Si je pioche dans les gens qui sont abordables, je dirais… Anouar Brahem qui joue de l’oud et que je trouve incroyable. Richard Galliano, l’accordéoniste, avec qui on a échangé des velléités de projets. Mais pour l’instant, ce quartet est un laboratoire. On a la possibilité musicale d’inventer une musique encore plus ambitieuse, avec plus de prises de risques. Je pense à une musique parfois moins accessible au premier abord. On a conscience qu’un groupe qui oscille entre la pop et le jazz, qui fonctionne comme un groupe de rock et qui a la chance de pouvoir faire carrière à l’international, il y en a peu. Il y a des solistes de jazz, moi je suis clairement plus un musicien rock qu’un soliste de jazz.

Ce qui se sentait déjà dans « The dawn » (2001)
Oui, l’essence de tout ça était dans « The Dawn ». A l’époque, Giulianni et moi on jouait dans des groupes de rap en Angleterre. On faisait des soundsystems dans la boite de Ronnie Size et Goldie, « Blue Note », le temple de la drum’n bass. C’est de là qu’est venu « the Dawn ».

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