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Vers une libération de la parole dans la musique

Et soudain, un espoir. L’avez-vous vu ? Le samedi 18 juillet dernier, on a vu émerger en France le hashtag #MusicToo, référence à un #MeToo, dans l’industrie musicale. Avec ce formulaire de déclaration en ligne, il y a de quoi redonner un souffle extrêmement bienvenu à la lutte contre les agressions sexuelles et sexistes dans le milieu de la musique.

D’abord il y a eu #MeToo et son équivalent francophone #BalanceTonPorc, tsunami libérateur de celleux qu’on disait sans voix. C’était en 2017. Et, s’il a touché une partie de la société (du moins médiatiquement par l’impulsion des réseaux sociaux), s’il a pu aboutir à des enquêtes voire des plaintes, qu’en est-il du combat ? Qu’en est-il des acquis, de la réduction d’inégalités, du bouleversement légitime des consciences qu’il aurait dû entraîner ? Trop peu, trop rien. Un réveil n’a de poids que s’il met en branle l’ensemble d’un corps social. On aurait tout juste ouvert les yeux, avant de détourner le regard ? Voilà tout l’héritage des milliers de témoignages de ces lanceurs·ses d’alerte ?

A vrai dire, dans certains secteurs professionnels, il faut croire que c’est presque comme si l’on avait simplement ressenti un remous, un scroll de plus, un non événement. D’ailleurs, qu’en est-il dans la musique, réputée pour son aura de mystère et de fantasmes d’un autre siècle ? Qu’y a-t-on entendu ces dernières années ? A cette question, le collectif anonyme Music Too France a quelques réponses à offrir qui, toutes, pointent dans le même sens : l’ultra ras-le-bol. A l’aide d’un manifeste hautement politique et émancipateur, il ouvre une brèche, et constate « l’impunité des agresseurs (professionnels à des postes clés, artistes omniprésents dans les médias) qui n’ont aucune raison d’arrêter leurs agissements si personne ne parle. »

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Depuis un an, force est de remarquer que des voix se sont fait entendre pour dénoncer les pratiques décomplexées du milieu-du-cool. Entre une enquête sur les obscures coulisses de la musique dans Télérama, une étude statistique accablante du collectif CURA, le témoignage d’Emily Gonneau, seule femme de l’industrie à avoir écrit sous son nom, ou des expériences récurrentes de harcèlement dans la musique classique révélées sur Loopsider, on aurait pu se dire que le coup de latte avait commencé à déranger la fourmilière. Mais vous l’aurez remarqué… Rien n’a bougé. Depuis 3 ans, « nous avons vu des tribunes pour défendre le droit d’importuner, Sandra Muller l’initiatrice de #BalanceTonPorc perdre son procès en diffamation, Polanski, criminel en cavale exclu des Oscars, recevoir un César et la protection des élites artistiques françaises. » Et pour pour ne citer que trois stats, rappelées sur le site de Music Too : 1 femme artiste sur 3 a été agressée ou harcelée sexuellement dans l’industrie musicale en France, les femmes sont toujours moins bien payées que les hommes (a minima 20%), et ce quel que soit leur âge ou leur niveau de responsabilité, et 97% des groupes programmés par les grands festivals de musique sont composés exclusivement ou majoritairement d’hommes.

Après avoir bossé son action pendant plusieurs mois, Music Too France crée donc son compte Instagram et son compte Twitter. Leurs réseaux sociaux dirigent d’entrée de jeu vers un formulaire en ligne où ielles recueillent les témoignages de femmes, de la communauté LGBTQIA+ et des personnes racisées sous représentées. Jusqu’au 30 septembre, Music Too récupère ces déclarations et les identifications, puis les recoupe. « Nous travaillons avec des avocates et deux associations pour vous accompagner vers un suivi juridique ou psychologique si nécessaire. » Sur le questionnaire en ligne, vous pouvez entrer votre pseudo (ou votre véritable nom), votre fonction (et donc s’il y a un lien de subordination avec l’agresseur·se), nommer l’agresseur·se, partager votre témoignage avec l’assurance qu’il reste privé tant que vous le décidez. Le·la témoignant·e peut enfin se déclarer OK pour le publier sur les réseaux sociaux, le transmettre aux médias, ou confier ses coordonnées.

Depuis son lancement le 18 juillet, le collectif dit avoir déjà recueilli suffisamment de témoignages pour mettre la lumière sur des agressions. Avec le hashtag #OnTeCroit, Music Too France se veut entièrement rassurant sur l’anonymat. Force à celles et ceux qui ouvert leurs oreilles, leur cœur et leur lutte, et tout notre encouragement aux victimes.

Le formulaire

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