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Vassilena Serafimova : « Le marimba me parle »

Si la Bulgarie vous évoque surtout la jolie petite barbiche de KiNK, dorénavant ce pays de la péninsule balkanique éveillera en vous le souvenir du jeu souple et poétique de Vassilena Serafimova. La marimbiste, qui vit désormais en France, a sublimé notre série Variations (diffusée sur Culturebox), par son talent brut. Comme nous, vous avez surement envie d’en connaître un peu plus sur Vassi. Une interview à lire en faisant rouler les « r ».

Comment en es-tu venue aux percussions ?

C’est simple : mon père était prof de percussions, donc j’en avais partout autour de moi. J’ai quand même commencé avec le violon mais je regardais le xylophone, dont ma sœur jouait déjà, avec envie. Généralement, on commence avec la caisse claire pour développer le sens rythmique. Mais pour moi, c’était le xylo car j’ai commencé seule. Je ne voulais pas tout de suite présenter à mon père ce que je faisais et, pratiquant le violon, je connaissais déjà bien les notes. Puis, je lui ai montré et il m’a dit qu’il pourrait m’intégrer dans sa classe dès l’année suivante. J’ai saisi cette opportunité et la suite a été un véritable coup de foudre avec les percussions.

Aujourd’hui, tu es surtout connue comme marimbiste…

Oui, c’est vrai. C’est drôle, j’insiste toujours sur le fait que je suis une percussionniste : j’aime toutes les percussions. Mais, il se trouve que j’ai gagné le plus grand concours de marimba en 2008 donc on a associé mon nom au marimba et m’a beaucoup invitée pour jouer du marimba. Mais c’est vrai, j’ai quelque chose de particulier avec. J’ai un rapport avec l’instrument que je trouve… facile. Le marimba me « parle ». C’est aussi une des percussions les plus riches avec laquelle la mélodie, l’harmonie et le rythme se combinent de manière homogène. C’est plus facile pour travailler avec d’autres musiciens que ce soit en musique classique, jazz, traditionnelle, ou électro comme avec Variations. Dans mes récitals, je continue tout de même à jouer des pièces pour d’autres percussions. Le marimba, c’est mon petit bijou.

Quelle présence ont les percussions dans le folklore bulgare ?

Il faut savoir que la musique bulgare est extrêmement riche rythmiquement. Une grande partie est basée sur des rythmes irréguliers avec des assemblages de temps courts et longs. C’est quelque chose qu’on entend depuis tout petit, on vit et grandit avec. Tout le monde sait danser sur ces rythmes. Ils sont ancrés en nous. Et d’ailleurs, il n’y a pas de groupes folkloriques sans le tupan, notre percu traditionnelle.

Quel héritage de cette musique peut-on trouver dans ton jeu ?

Il n’est pas très direct à première vue. Mais je me suis rendue compte en faisant des recherches en Bulgarie, qu’une grande partie de ma spontanéité, de ma curiosité et la liberté que je prend facilement viennent du fait que j’ai grandi dans un pays où le folklore est très présent. Dans notre rapport à la musique, il y a quelque chose d’enjoué, pas « prise de tête ».

Quelques mots sur ton arrivée en France ?

Sept ans après mon arrivée ici, je me suis demandée justement si c’était vraiment mon choix… J’ai été remarquée lors d’un concours en Bulgarie et on m’a invitée à jouer à Paris. J’ai été émerveillée par ce que je voyais : les musiciens dans la rue, l’esprit des gens très ouverts à la culture… Mon arrivée a été très spontanée car j’ai été acceptée en cours d’année au Conservatoire de Versailles. Mes premières années en France étaient étoilées de superbes rencontres. Ce n’était pas facile car au début, je jouais dans la rue… Mais deux ans et demi plus tard, je jouais en soliste au Théâtre des Champs-Elysées. Les concours internationaux et le Conservatoire de Paris ont suivi. Mon parcours a été atypique et un peu fou.

Quelle a été ta réaction lorsque nous t’avons proposé de participer à Variations ?

J’étais très enthousiaste, ça vient de ma curiosité – dès qu’on me propose quelque chose d’un peu fou, ça m’excite et j’ai envie de le faire. Je n’avais jamais travaillé avec un producteur de musique électronique et, en tant que personne qui vit dans le 21ème siècle, j’ai été évidemment sensible à ce genre musical.

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Peux-tu nous parler de ta rencontre avec Chloé ?

Je ne connaissais pas Chloé. Avant qu’on se rencontre cet été, je n’ai pas écouté ce qu’elle faisait consciemment, j’ai voulu attendre d’avoir un premier contact avec elle. J’ai eu un super feeling et donc évidemment j’ai découvert sa musique. J’ai été ravie de faire ce projet avec elle. C’est une fille que je trouve pleine de sensibilité et justement, dans la musique électronique, c’est quelque chose qui peut parfois manquer, à mon goût. Dans notre projet, on sent notre recherche d’une composition onirique, on sent les êtres humains derrière les instruments.

Comment s’est déroulé votre temps de travail en studio ?

Notre première encontre a eu lieu fin juillet. J’ai amené mon marimba dans son studio, qui s’est transformé en une boîte dans laquelle on ne pouvait plus circuler à cause de la taille de l’instrument. Une première rencontre pour qu’elle découvre l’instrument. C’était très bref. Puis on a répété en septembre. On a cherché un langage commun. Il y a certaines choses que moi, musicienne classique, je peux dire d’une manière et que Chloé va comprendre autrement, et vice versa. Parfois, on s’est rendues compte qu’on ne s’était pas du tout comprises au départ (rires). On a donc travaillé en improvisant, en cherchant à transformer le son, la matière sonore. La musique de Reich est arrivée dans un deuxième plan, après avoir construit un instrument commun. On a pris la partition et on s’est basées sur les harmonies de Reich, son idée de couleurs musicales. Comme on était que deux [au lieu de 18 dans Music for 18 musicians, la pièce qui nous a inspirés, ndlr], on a fait du phasing en avance, en pré-enregistrant certaines parties. Sur scène, j’ai fait la construction de certains patterns, j’ai joué des harmonies avec la bande pré-enregistrée. La forme de notre composition est très différente de l’originale. On s’est basées en utilisant ses composantes, comme les voix par exemple.

Joues-tu le répertoire de Reich d’habitude ? Que représente-t-il pour toi ?

Ma première rencontre avec Reich a été quand j’avais 15 ans. L’ensemble de percussions Anumadutchi, qui travaille sur un répertoire mélangeant la musique africaine et occidentale, est venue en Bulgarie pour une masterclass. Ils nous ont enseignés toute la partie de bongos de Drumming sans aucune partition, par transmission orale. Ils nous ont expliqué ainsi le phasing. On a pris deux ou trois jours pour comprendre le principe, le pratiquer et ensuite de jouer par cœur la pièce. On était fous furieux, super excités. Maintenant, ça fait partie du répertoire de tout percussionniste, je l’ai beaucoup jouée, ainsi que Nagoya Marimbas, Six Marimbas. Ça fait partie de mon éducation de percussionniste.

Et la restitution, était-ce une prise de risque ?

La préparation était courte, comme tout le monde – nous avons toutes les deux des emplois du temps assez fous. On avait plein d’interrogations jusqu’au dernier moment. Mais on a adoré ce travail. On était super contentes car on a réussi à le jouer du début à la fin pour la deuxième fois ! (rires) C’était un peu frustrant, bien sûr, de se dire qu’on ne le jouerait qu’une seule fois, mais on va vite résoudre ce problème en le faisant tourner.
L’expérience du Cabaret Sauvage était superbe : partager la scène avec tant de musiciens incroyables, partager un défi jamais expérimenté. Tout le monde a joué le jeu et c’est très réussi.

Crédit photos : Hana Ofangel

Variations est une collection de cinq lives diffusée par Culturebox, et soutenue par le CNC, l’ADAMI et la SACEM.

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