Rencontrer Finn Andrews, le chanteur/compositeur du groupe The Veils, c’était un peu un rêve d’adolescente. Découverts en 2004 avec leur premier album « The Runaway Found », la musique d’Andrews transporte aussi loin qu’un vieux coffre à trésor retrouvé. Une séparation d’avec la formation initiale et trois albums plus tard, Andrews revient avec un recueil de souvenirs et de chansons folk dans le 4ème opus, « Time stays, We go ».
A l’écoute de « Time Stays, We Go », un constat s’impose : Finn Andrews a grandi. Ses textes ont toujours un petit air de jardin secret découvert, mais la musique a gagné en violence contenue. Une maturité qui s’exprime par petites touches « J’ai beaucoup changé depuis « the Runaway Found », la moitié de cet album était composé des toutes premières chansons que j’avais écrites. Je suis donc heureux qu’on sente une évolution entre mes 14 et mes 29 ans ! ». Une chose demeure pourtant dans l’écriture d’Andrews, c’est ce sens, propre à la musique folk, de l’histoire, celle qui vous emmène dans l’univers personnel de son auteur. « Depuis que je suis en âge de penser, j’ai toujours aimé les histoires. Je me rappelle très clairement être tombé amoureux de la musique, je devais avoir 11 ans. J’ai toujours été entouré de musique étant plus jeune, mais j’étais beaucoup plus fasciné par le visuel. À 11 ans, je suis rentré dans un club folk et j’ai eu l’impression d’entendre ça pour la première fois. Il y avait d’un côté les mots et de l’autre tous ces rythmes et mélodies ! J’étais fasciné par le procédé et comment il marchait. Je n’ai jamais pu écrire de journal intime. Toutes les fois que je m’y suis essayé, ça semblait forcé, trop conscient de soi. Du coup, j’écris des chansons comme d’autres tiennent un journal intime, c’est une forme abstraite d’écriture de soi ».
Évidemment, la comparaison avec ses mentors, Nick Cave et Tom Waits, est difficilement évitable. A tel point qu’Andrews a fini par déclarer au cours de précédentes interviews qu’il n’écoutait pas de musique actuelle. « Je crois que je m’améliore de ce côté ! Ces derniers mois, j’ai recommencé à écouter beaucoup de musique, et c’est tant mieux parce que je crois que j’étais en train de me transformer en vieux branleur. Je suis du genre à aimer quelque chose de manière obsessionnelle, à écouter un album en boucle pendant plusieurs semaines pour ne plus y toucher après. C’est pour ça que je ne cite pas trop les groupes qui me plaisent, parce qu’au moment où l’article sort, je serai déjà passé à autre chose. Après je suppose que j’aime ce que tout le monde écoute ». Et quand on lui répond sur le ton de la plaisanterie qu’il a effectivement une tête à aimer Rihanna, il répond en riant « J’ai pas mal aimé « Rude Boy », mais c’est sans doute parce que le clip ressemblait à une pub pour les sous-vêtements ».
Que ce soit par amour du stupre ou le besoin de rajouter une touche de groove à sa musique, « Time Stays, We Go » se démarque des précédents albums par l’ajout de cuivres bien sentis. Une manière de poser une énergie primale, libératrice. « Il y a ce club dans lequel j’ai joué, à Londres, une sorte de salle de bal. Le groupe qui officie là-bas invitait un nouveau musicien tous les mois et j’ai fait un show avec eux. On s’est retrouvé quelques fois et on a développé de nouvelles choses sur les chansons, comme rajouter des cors sur certaines lignes. Et je voulais ça pour moi. Du coup, j’ai volé leur section cuivre ».
À la lecture de précédentes interviews, Andrews confie volontiers qu’il ne dirige pas vraiment ses textes vers une direction particulière, mais laisse aller ses pensées, pour voir jusqu’où elles le mènent. On pense alors facilement à André Breton et au surréalisme, une réflexion qui le fait sourire « Mon Dieu, si seulement il y avait un mot pour décrire ce qui se passe dans ma tête ! C’est vraiment un gros bordel et j’apprécie ce chaos. Il en a toujours été ainsi pour ce groupe et je pense que c’est comme ça que les choses doivent se faire. Si on essaie trop fort d’écrire un certain type de chansons pour un certain type de public, c’est comme ça qu’on se trouve avec tant de disques de merde. Pour moi, lorsque tu écris une chanson, tu as une idée de la manière dont elle va sonner, mais il ne faut pas trop chercher à manipuler cette pensée, si tu es trop confiant, tu risques de briser ce sentiment initial. Il faut laisser une place au hasard ».
Alors, au hasard de vos pérégrinations estivales, laissez-vous tenter par la folk douce amère de « Time Stays, We Go ». Il y a des chances qu’elle vous mène à l’ombre d’un vieux porche, à écouter les histoires d’un cow-boy néo-zélandais.
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