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The Joy Formidable, de l’art d’être pop lunaire

Rencontrer Ritzy Bryan, la chanteuse aux allures d’elfe blond de The Joy Formidable, a de quoi faire douter de votre hétérosexualité. L’Anglaise est en effet dotée d’une beauté candide et d’une accessibilité déroutante. J’ai dû me rappeler que j’étais très heureuse en couple et faire le tri parmi la somme de confidences auxquelles j’ai eu droit pendant cette rencontre. Tentons de résumer.

Le dernier album de The Joy Formidable, « Wolf’s law » est dans la droite ligne du groupe. Pop survoltée, orchestrations magistrales, romantisme échevelé qui rappelle les Hauts de Hurlevent. Bryan ne renie pas cette analogie. « C’est un roman très atmosphérique, il capture l’essence du sauvage. Je peux voir ça dans notre album, il évoque beaucoup la nature. De plus nous venons du nord du pays de Galles. C’est un pays à la Brontë, donc j’imagine très bien comment cela peut se ressentir dans notre musique. »

Ce n’est pas au pays de Galles mais en Californie qu’a été tourné le clip de Cholla, premier single de ce deuxième album. Plus exactement dans la réserve de cactus cylindropuntia (Cholla) de Joshua Tree. L’intro du morceau est électrique, piquante, et son histoire tout à fait intime. « J’y suis allée en décembre 2011 avec ma mère, confie Bryan. C’est une chanson très personnelle à propos de la fin d’une relation entre une mère et sa fille. Mais il y a quand même l’espoir d’une réconciliation, l’essai d’une réparation. Nous voulions passer du temps ensemble dans ce décor chaotique. Ces immenses cactus proéminents … D’un côté ils apportent la vie, de l’autre ils repoussent tout ».

Heureusement, le groupe sait s’entourer de personnes qui comprennent et soutiennent leur projet. Pour cet album, ils ont eu la chance de travailler avec Andy Wallace, producteur primé qui a contribué aux projets de nombreux artistes – Sonic Youth, Nirvana, RATM, Slayer, Jeff Buckley… La liste est longue comme un concert de musique sérielle. « Nous étions très motivés en rentrant en studio, les chansons se sont écrites très facilement, et nous avions une vision très claire de la manière dont sonnerait cet album. Dans toutes les relations, même professionnelles, tu fais un peu la cour. Nous étions de grands fans de son travail, particulièrement le son de ses batteries, donc nous étions très excités, tout en espérant que ça marche, parce que tu ne peux jamais savoir… C’est un type fantastique, humble, passionné par la musique. Il a mis en lumière certains aspects de l’album, il a trouvé la petite chose qui a rendu le tout possible ». Matt Thomas, batteur du groupe : « C’est toujours très difficile de jouer seul sa partie et c’est extraordinaire de voir comment elle se fond dans le reste. Je me suis même demandé si c’est moi qui avait fait ça ».

Depuis ses débuts en 2007, le groupe a sillonné le monde, ce qui peut rendre le processus de création un peu difficile. Pour Bryan, « l’écriture est une partie très importante. Nous sommes toujours entre deux mondes, on ne compartimente pas le travail entre tournée et studio. En tournée, on expérimente, on travaille différemment le son, « Wolf’s law » est en un sens le produit de huit mois d’expérimentation. »
Est-ce cet aspect grandiloquent qui leur a permis de faire la première partie de Muse (et bientôt celle de Bloc Party) ? Une chose est sûre, ce tremplin leur a causé une critique plus amère que douce sur le site de Pitchfork, leur reprochant de posséder l’envie dévorante de remplir des stades. La douceur de Ritzy fait place à la colère. « Nous ne sommes pas une version plus jeune des groupes dont nous faisons la première partie. Je trouve triste que l’on pense que nous avons un plan, une soif dévorante de célébrité. L’intégrité artistique est une source qui coule abondamment dans ce groupe ». Matt en remet une couche : « c’est comme si quelqu’un disait « Excusez-moi, mais trop de gens aiment votre musique », OK, donc on va écrire des chansons de merde comme ça cette fois-ci vous pourrez écrire un bon commentaire ».

Si l’on effectue une rapide recherche, « Wolf’s law » est en fait un jeu de mot issu de la loi de Wolff, définissant le principe de résilience, ou plus simplement la capacité des os à s’adapter aux pressions qu’ils subissent. Une loi qui s’adapte parfaitement aux propos du groupe. « C’est une industrie pleine de cons, donc tu dois être sacrément tenace. Tu dois d’abord et avant tout fortement aimer la musique, parce que si tu y es pour l’argent ou la célébrité, tu risque d’être bien déçu ».
Par chance, The Joy formidable ne semble pas se laisser abattre aussi facilement. Récemment, un petit clin d’oeil humoristique leur a été offert par the Lonely Island, le groupe formé par Andy Samberg du Saturday Night Live. En effet, l’humoriste a samplé l’intro de Whirring pour offrir aux fans une version tout à fait personnelle du dicton « You Only Live Once ». Une doctrine qui convient parfaitement à l’exaltante musique de The Joy Formidable.

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