Six talents, six styles. Des artistes aux profils différents qui parlent du milieu du rap, de littérature, de clash. En collectif ou en solo, ils n’ont pas leur pareil pour se distinguer de la masse. Entre flow aquatique et terre à terre, ces mecs sont nés avec des punchlines dans le sang.
Grems – Shlag Music : « Jesus Christ et la lumière fut ». Artiste entier à qui on ne la fait pas à l’envers, Grems a suffisamment de talent pour voir les choses avec distance. Il s’éloigne du rap game pourri, écrase la concurrence de MCs et dénonce l’argent, la pub et les médias. Mais Grems, c’est avant tout un mec avec plein de projets, qui se renouvelle et qui a su allier deep house et flow ultra rapide. Rien que le fait d’écouter du Moodymann le rend sympathique.
Hippocampe Fou – Le Marchand de Sable : « Ma main droite et mes cauchemars sont mes compagnons d’infortune ». Trois ans avant qu’un lama ne soit kidnappé par cinq Bordelais, un homme avait déjà la hype en lui en sortant le titre Chez moi y’a un lama. Hippocampe Fou vit dans un monde parallèle. Il raconte des histoires féériques aidé par un superbe aquaflow. Il semble que son enfance fut très épanouissante. Son talent est récompensé par un premier album « Aquatrip » sorti il y a peu.
Lucio Bukowski – Jericho : « Le cynisme est inutile mais c’est un vieux réflexe ». Probablement le rappeur de cette liste aux textes les mieux écrits. D’éducation plus Bashung que NTM, le Lyonnais du crew L’Animalerie est un lecteur assoiffé de vérité et observe les Hommes avec lucidité. Son pseudonyme, en référence à l’écrivain du Journal d’un vieux dégueulasse, Charles Bukowski, donne toute la mesure de sa clairvoyance. Dans une interview pour Ragemag, il est cash : « sans l’écriture, ce serait le néant ».
Rocé – En apnée : « Tu veux être polémique, t’es juste bruyant ». Rocé n’est pas forcément le mec le plus marrant qu’on connaisse sur le paysage du rap français. On l’a déjà entendu dire pour Brain qu’être « prétentieux (…) c’est une des manières les plus honnêtes pour avancer : mettre la barre plus haut », cette marque de fabrique (critiquable) l’a cependant obligé à se renouveler. Du free jazz aux instrus old school, il tente des expériences sonores et, souvent, c’est très classe. Allez, on lui pardonne.
Odezenne – Chewing Gum : « Y’a comme un goût de voyez-vous dans sa gueule de louve ». Le collectif bordelais est sans doute la révélation de l’année. Pas parce qu’ils débarquent tout juste mais pour le bol d’air frais qu’ils nous ont filé. Une imagerie originale et maîtrisée, un humour bien noir, une aisance à raconter des contes modernes, une vraie idée du « collectif », un art de la punchline. Il nous rappelle que dans ce monde individualiste qui tire la gueule, il y a quand même moyen de se marrer.
Veence Hanao – Kick, Snare, Bien : « C’était quand qu’on était cleans ? ». Le Belge pose la question. On a repéré assez tardivement Veence Hanao (grâce à Odezenne !) et depuis il squatte régulièrement nos lecteurs cassettes. Une musique jouissive qui balaie les états de mélancolie, de goût amer dans la bouche, de monde truqué, de fins de soirées solitaires. Une nonchalance dans le flow et un regard éclairé sur la vie. On voudrait tous l’avoir comme pote.
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