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Si vous cherchez plus divertissant que Jacques a dit, il y a Duchess Says

Pour leur troisième album, Duchess Says convoque les ambiances sonores de l’âge d’or de la new-wave. Pour mieux les abandonner ?

Dans la préhistoire digitale de l’industrie musicale (avant Napster et MySpace), à la question « que devons-nous faire pour progresser dans le business ? », les maisons de disques aimaient à répondre aux jeunes groupes : « développez votre style tout en trouvant votre place sur le marché. » Dès lors, la transformation des projets artistiques vers une version policée et moins brute semblait être le passage obligé pour les artistes alternatifs qui souhaitaient obtenir une visibilité et un public plus large. Ils étaient alors lancés sur un chemin sans retour qui ne pouvait aboutir, bien souvent, qu’à la rupture dans le groupe et au sacrifice de la démarche artistique au profit de la sainte trinité « produit, public, part de marché ».

En 2016, le monde de la musique a changé. Les majors ne sont plus les seules à faire les tendances musicales et, surtout, les petits acteurs ont obtenu les outils qui leurs manquaient pour pouvoir exister sans l’appui des grands groupes de médias : il n’y a plus d’intermédiaire physique nécessaire dans la distribution de la musique et, par conséquent, un groupe alternatif peut constituer et garder sur le long terme son public, sans avoir besoin de soutien financier et médiatique important. Cela permet aussi aux petites structures, comme les labels indépendants, de rester en contrôle de leur « marché » et de se révéler garants de l’intégrité des démarches artistiques défendues. C’est dans ce cadre que Duchess Says crée depuis 2003. Et le groupe est un bon exemple de la liberté créative et artistique que la révolution numérique a apporté.

Post-punk et synthés analogiques sur un cimetière indien

Depuis L’anthologie des 3 perchoirs (et leur morceau signature « Tenen non neu » ci-dessus) en 2008 et In a Fung Fay T ! en 2011, Duchess Says a beaucoup tourné mais peu enregistré (à l’exception d’un split EP en 2015 avec le groupe de punk synthétique belge « Prince Harry »). Ils reviennent donc avec Sciences nouvelles leur troisième album. On pensait immédiatement rétro-futurisme en écoutant leurs précédents opus et il faut avouer que le choix marqué du son new wave pour ce nouveau disque pourrait faire prendre au groupe le risque de se figer dans une attitude passéiste. Heureusement il n’en est rien. Les Québécois ont compris depuis longtemps qu’après avoir développé une identité musicale forte, ils peuvent maintenant aller se servir où ils veulent dans leur grenier musical commun pour retracer de nouvelles lignes directrices.

Avec des guitares tranchantes, des effets sonores mécaniques et une basse binaire, des morceaux comme « Negative thoughts » ou « Poubelle » développent une rhétorique propre au groupe : un punk-rock électro-analogique, hypnotisant, presque chamanique. Des séquences analogiques peu recommandables qui rappellent DAF ou Suicide définissent un univers K-dickiens où il n’est pas interdit de danser, pour autant que l’on se sente à l’aise sur le dancefloor avec sa parano en bandoulière.

Même si Annie Claude Deschênes harangue toujours autant l’auditeur, on pense cette fois beaucoup plus à Karen O qu’à Mike Patton. Mais même sur « Travaillez » et son slogan french quasi- syndicaliste ou « I repeat myself », la sucette pop 80’s de l’album, cela reste très peu « radio-friendly » et pas du tout approuvé par Florent Pagny.

On pourrait dire que la démarche d’aller creuser au marteau piqueur dans les sonorités du passé permet à un groupe expérimental comme Duchess Says de s’amuser beaucoup, mais pas que. Ici, le groupe ne se contente pas de la couche cosmétique du traitement sonore mais intègre des matériaux bruts de notre passé musical pour tenter la rencontre avec notre époque et leur univers. Ensuite, leur tendance poussée à l’entropie fait le reste… pour notre plus grand plaisir.

Le groupe jouera à Petit Bain (Paris), le vendredi 18/11, au festival Musiques Volantes aux Trinitaires (Metz) le 19/11 et au Marché Gare (Lyon), le 23/11.

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