Aujourd’hui s’ouvre Scopitone, que nous couvrons depuis dix ans. Avec une bien belle nouveauté au programme du festival nantais : un lieu éphémère dingue, le MiN (Marché d’intérêt national), dans lequel tout aura lieu cette année, et qui sera détruit dans quelques semaines. Avant d’y poser nos caméras dans 10 jours, on a envoyé quelques questions à Cédric Huchet, programmateur Arts Numériques.
Vous n’êtes jamais venu à Nantes, encore moins au MiN ? Alors fermez les yeux. Imaginez un site de 20 hectares qui, après 50 années consacrées au commerce de gros, alimentaire et horticole (le deuxième plus important de France après Rungis), va être mis par terre pour laisser place au futur hôpital de l’agglo. Scopitone, qui se tient chaque année en septembre, a réussi à se glisser entre le début de la démolition et la fermeture définitive du site, sur deux hectares encore exploitables, dont la Halle à Marée qui sera le lieu central du festival, et qui accueillera notamment Kompromat, Chloé et son live Endless Revisions, Folamour, Anetha, Molécule pour deux performances différentes, DNGLS ou encore le Camion Bazar d’ici le 22 septembre.
Comment cette opportunité du MiN s’est-elle présentée à vous ? A quel moment avez-vous pensé à faire cette édition là-bas ?
Scopitone a toujours cherché à renouveler le format, les lieux, les expériences proposées au public, en travaillant aussi sur des friches, des lieux emblématiques ou insolites, des espaces méconnus du public, singuliers, patrimoniaux… C’est l’un des ADN du festival. Voici quelques années que les formats étaient reconduits « relativement » à l’identique, et que les les recherches sur d’anciennes friches s’avéraient infructueuses (les friches se raréfient, surtout dans le cœur des agglomérations).
Cette opportunité s’est présentée à l’automne 2018 (très tard donc !), considérant que dans la démolition du MIN, une fenêtre est apparue entre fin août et fin septembre, période pendant laquelle, les travaux ne touchaient pas encore à cette zone. C’était un coup de chance.
Quelles perspectives vous ouvre-t-il pour cette nouvelle édition ? Quelles contraintes s’imposent à vous ?
La première contrainte est un défi : faire de cette opportunité unique (tout sera complètement détruit après), un événement exceptionnel, à la hauteur du lieu, de sa taille, de ce qu’il représente pour la ville et ses habitants, de ce qu’il va devenir…
Le défi est ensuite une ambition : celle de façonner un nouveau visage au festival, pour les années à venir. Les perspectives d’une nouvelle version, et de possibilités en terme d’espaces, de nombre de projets, de renouveau des formats, d’un lieu central et unique, et d’une temporalité permettant de faire se croiser les propositions et les publics. Et enfin… des contraintes, assez inquiétantes, lorsqu’on a le sentiment de vivre les dernières années d’événements culturels dans des friches et endroits insolites. La réglementation, la mise en conformité, les exigences en terme de sécurité : tout devient très compliqué et budgétairement très inquiétant.
En quoi le festival a-t-il été repensé pour pouvoir se tenir dans un lieu éphémère ?
Étoffer les expositions, les rencontres professionnelles, les ateliers grand public, s’appuyer sur l’architecture, la révéler aussi plutôt que la cacher, modifier sa durée et temporalité (10 jours contre 5 habituellement, des journées continues de midi à 23H ou minuit, les expositions ouvertes pendant les soirées, des formats de performances et expériences live pour le public…). Tous les signaux étaient au vert pour casser les codes et les formats.
Au niveau des expos/installations, certaines d’entre elles se tiendront à l’intérieur d’anciens frigos industriels. Tu peux nous en dire un peu plus ?
Les frigos se sont vite imposés comme des volumes particulièrement intéressants pour des expositions et une scène de performances et lives audiovisuels. Il faut imaginer qu’il s’agit davantage de groupes froids : de grands volumes, isolés du son, plongés dans l’obscurité.
Ces trois frigos pour les installations, nous ont permis de déployer un nombre d’oeuvre plus important.
Deux ou trois choses à ne pas rater au niveau des install et expos ?
Amanda Pareer avec Fantastic Planet qui présence ses géants blancs, rétro-éclairés, qui sont posés en relation avec l’architecture du lieu). Sinon Onformative, Meandering River (représentation et simulation en animation de l’érosion d’un sol par un écoulement de liquide, eau ou lave). Le célèbre studio berlinois signe une oeuvre d’une grande poésie, ou l’intelligence artificielle permet de re-créer des phénomènes naturels). Et puis Guillaume Cousin avec Le Silence des Particules, c’est une véritable sculpture d’air et de fumée, vivante et aléatoire : de grands ronds de fumée sont propulsés par un étrange mécanisme, font leur course sur plusieurs dizaines de mètres pour finir par se disperser dans l’air.
0 commentaire