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Psykick Lyrikah : toujours debout, jamais trop tard

Le rap français a toujours porté sa part d’excentriques et de marginaux à côté des super-productions au goût fade. Arm et ses complices font parties des premiers, de ceux qui pansent leurs plaies par le mic et dont les mots marquent les consciences. « Jamais trop tard » leur sixième opus sorti il y a 6 mois nous a amené à faire une rétrospective de la carrière ce dissident de la planète rap.

Psykick Lyrikah est un projet qui a émergé il y a bientôt 13 ans grâce à l’un de nos recruteurs préférés : les Trans Musicales de Rennes. Leur premier album « Des Lumières Sous La Pluie » a marqué tout une génération, celle qui rêvait de mettre de la poésie dans le hip-hop au sein d’une musique décomplexée et atmosphérique. Sans le confondre avec un Bertrand Cantat chauve ou un Dominique A punk, Arm a apporté une renouveau palpable à un hip-hop français qui tend à s’essouffler. Tant par sa poésie amère et crépusculaire que par la production d’un nouveau panel d’instrumentations entre rock, plages noises et électro. Avec ses compères de toujours Robert le Magnifique et Olivier Mellano, ils tâtonnent ensemble, expérimentent pour proposer une autre voie du hip-hop français.

Écouter du Psykick Lyrikah revient à s’enfoncer même en plein jour dans des méandres abyssales et lugubres qui vous font frisonner d’effroi ou de joies inavouées. Son rap n’est certainement pas ghetto mais subjugue tout de même par son aspect sanguin et renfermé. De la haine, du spleen acerbe qui fascine comme le vide et les coins les plus glauques de nos villes. Il s’agit rarement de storytelling ou de complet ego-trip. Son royaume relève plus d’une féroce envie d’extraire les épines que la société a planté dans notre âme d’enfant. La défigurant définitivement.

Comptez les heures ft. Iris (Vue d’ici – 2008)

Le public adhère ou non à sa musique, mais sa plume incandescente impressionne sans conteste. « Jamais trop tard » tend à le confirmer mais la prod musclée laisse dubitatif. Alors que son précédent album marquait un tournant analogique minimaliste et poignant, après une entrée en matière réussie en compagnie d’Iris, après un désir de recentrer, de rabâcher l’exhortation à l’insurrection pour éprouver notre esprit rebelle, un titre cinglant vient fouetter nos esgourdes. Jamais Trop Tard au refrain guttural s’avère décevant et sombre dans les écueils du hip-hop sentimental surchargé d’effets.

Jamais Trop tard (Jamais Trop Tard – 2013)

Le reste de l’album suit le même rythme : des tracks bien construites dont une sur trois s’avère saturée de beats harassant d’une exubérance redondante (La Ligne Rouge). L’opus conserve cependant son intérêt avec des interludes réussis et une capacité de renouvellement : son jazzy élégant (Le Soir Pour Toi), esquisse d’une univers ghetto profond et viscéral (Aux Portes De La Ville ft. Ancrage)… La sortie paradoxalement délicate et agitée suinte tout de même le génie et montre que Psykick Lyrikah malgré quelques défauts est toujours là : « Seul contre tous, contre vents et marées, quelques textes pour s’en foutre et te réparer […] car demain les mots sauront que la vie ne t’a pas manqué ».

Aux portes de la ville ft. Ancrage (Jamais trop Tard – 2013)

Extrait des paroles d’Aux portes de la ville :

« Ramène-moi n’importe où, putain n’importe comment,
Peu importe l’heure pourvu que l’on tienne debout,
La droiture dans les yeux, regarde et craints-là.
Tu balayeras le monde pendant que la ville s’éteindra.
De grandes balafres de rouille sans aucun répit,
J’encaisse là les fournaises jetées en plein récif.
Toujours à suriner les thèmes,
Vriller, à supplier les braises
Qu’elles visent les furies et les traîtres.
T’éloignes pas du centre, on pourrait te perdre,
Tu ne connais ni la pente, ni l’absence, ni l’après.
Rase les murs, tu sais comment comment faire,
Là où poussent les durs, les forts et le pire se passe de commentaires.
De l’espèce des guerriers,
Des principes et du temps des fractures que l’on sait décaler.
Du son des sirènes, du plomb des vitesses immobiles,
On ne parle qu’entre nous le reste est inaudible. »

Crédit photo : Chloé Massard

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