Salisbury, ville du Wiltshire en Angleterre qui a voté « Leave » lors du référendum dit du Brexit et qui est donc majoritairement énervée par le système, s’est à nouveau exprimée. Bon, ça n’est pas totalement la ville en question, plutôt l’association Pipedown – 2000 membres au Royaume-Uni – qui y est basée et qui compte bien régler son compte à la musique d’ambiance. Depuis 24 ans, elle se bat contre la musique de fond dans les lieux publics et les magasins britanniques. Une initiative éreintante, malgré son évidente utilité qui vient de cet agacement bien connu pour ces musiques horriblement compressées reprenant globalement les mêmes codes harmoniques, rythmiques et émotionnels les unes des autres.
Si on compte bien, il y a 24 ans, en 1992, parmi les singles de l’année au Royaume-Uni, on trouve Diana Ross, George Michael & Elton John, Whitney Houston, Bryan Adams, U2 ou encore Celine Dion. Autant vous dire que niveau tardinade de nianiania et de waoudoudou, ça y allait franco. C’est pourquoi notre petite amicale des voisins en colère fans de musique de chambre anglaise du XVIème a alors trouvé ses nouvelles cibles : les supermarchés, les ascenseurs, les salons de thé, etc.
« Nous vivons en permanence dans un environnement bruyant. Nous sommes artificiellement stimulés tout le temps, ce pour quoi notre organisme n’est pas fait » Nigel Rodgers, directeur de Pipedown.
Premier gros fait d’arme de son boss Nigel Rodgers, 63 ans, après deux décennies de loose, la chaîne (et plus gros vendeur de vêtements d’Angleterre) Marks and Spencer a décidé d’arrêter la diffusion de musique dans ses magasins suite à la réception d’une tapée de lettres de membres de Pipedown en juin dernier. De quoi exciter les lendemains qui ne chantent pas de l’association, Nigel vise désormais plus loin aux Etat-Unis, en Allemagne ou en France, selon L’Obs.
La ruée vers le silence commence donc ici. C’est marrant tout ça parce que quand on est tombés sur cette info, on n’a pas pu s’empêcher de glisser une petite olive télépathique à Marks and Spencer, contents d’apprécier que le monde avance parfois très bien à rebours.
Mais au moment de la finition de cet article à scandale, on ne peut s’empêcher de penser qu’au-delà d’une lutte contre la toute puissance du bruit, de la publicité et de la sur-sollicitation du monde moderne sur le produit « être humain », qu’on soit uniquement en face d’une lutte générationnelle de plus, de l’agitation face au confort, de la soixantaine face à la vie active.
Bref, on a toujours un peu peur de vanter les mérites d’une frange de la population pour qu’un jour elle se retrouve dans le gouvernement d’un parti conservateur. C’est pas que le type s’appelle Nigel mais un peu quand même.
Photo : Nigel Rodgers par l'AFP
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