Programmé à Astropolis l’hiver, le groupe pensé par Juan Atkins, peu connu du grand public, est pourtant le véritable socle de l’histoire de la techno. Trente-cinq ans après ses premiers pas, « The Originator » dépoussière son projet devenu groupe dont le dernier album a 16 ans, entouré de son trio de choc made in Underground Resistance. Petit décryptage d’un phénomène, avant son débarquement à Brest.
L’hommage. Toute belle histoire commence par une référence. Celle de Model 500 regarde en direction de son berceau, Détroit. Soixante-dix ans avant que Juan Atkins ne crée Model 500, Henry Ford lançait le premier « modèle T » de son usine automobile, symbole d’une nouvelle vision de l’industrie qui fera de la « Motor City » la capitale mondiale de l’automobile. En 1982, Juan Atkins publie ses premiers morceaux sous ce pseudo et déclare sa flamme à sa ville natale. On ne le sait pas encore, mais Atkins vient de signer ce qui sera considéré plus tard comme l’album fondateur de la techno.
Le leader mal-aimé. Si tout le monde s’accorde à dire que la techno a plusieurs papas, il en est un qui souffre d’un déficit de notoriété notoire : Juan Atkins. Les autres piliers historiques du Michigan (Derrick May, Kevin Saunderson, Jeff Mills, etc) bénéficient d’une exposition constante, quand Atkins ne parvient pas à imposer son nom dans le crâne des technophiles néophytes. Quand les autres squattent les festivals aux esthétiques variées, Juan Atkins est quasi-absent des radars, notamment en Europe. On est bien loin de l’aura d’un Mills, qui assure plusieurs dizaines de dates par an dans l’Hexagone. Et pourtant, c’est bien lui qu’on appelle « The Originator ». Ben ouais, ça vous forge un mythe, surtout lorsqu’on sait que ce dernier a réussi à sortir de 10 années passées dans les bras du crack.
L’album mythique avant de sortir. Publié en 1985, l’album No UFOS reste le principal fait d’armes d’Atkins. Il lève le voile sur le style Model 500 : synthés analogiques, boîtes à rythme, boucles acides et voix répétitives s’accordent pour dessiner les premiers contours d’une techno cosmique et racée, véritable marque de fabrique de Détroit. Sur scène, Atkins a su s’entourer des meilleurs soldats pour donner vie à son oeuvre : DJ Skurge, Mark Taylor et surtout Mad Mike, fondateurs de UR, l’accompagnent partout. Seize ans après son dernier long format (« Mind And Body », 1999), Model 500 sortira ce mois-ci Digital Solutions, composé par Juan Atkins mais aussi par Mad Mike. Il sera le prétexte idéal pour fêter les 30 ans du label Metroplex, sur lequel il sort. Rien que ça.
Model 500 – Trailer de Digital Solutions
Le modèle. A la fin des années 70, Atkins n’a qu’un modèle en tête : Kraftwerk. Son objectif est clair : reprendre l’électronique là où Kraftwerk l’a laissée, et y ajouter le groove des musiques noires. Atkins en pince notamment pour Parliament et George Clinton. Mélanger la rigueur des Allemands au funky style de Clinton. Tout un programme. Trente ans plus tard, les stigmates kraftwerkiens sont encore là : les Model 500 jouent à quatre, figés derrière les machines, habillés en combinaison futuristes…
L’anecdote. Et si Atkins était aussi l’un des géniteurs de la house ? C’est en tout cas que le garçon aime raconter. En 1988, il vend sa TR-909 à un certain Franckie Knuckles, basé à Chicago. Le gazier s’en servira pour accoucher des premiers disques house qui agiteront la ville, puis la planète toute entière. Voilà une belle histoire pour renforcer encore un peu le profil décidément atypique de celui à qui on doit la plupart de nos nuits blanches.
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