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Pomme d’amour

En cet automne 2017 où de grosses pointures de la chanson francophone font leur rentrée, de Raphaël à Bernard Lavilliers en passant par Pierre Lapointe, MC Solaar ou Laurent Voulzy, l’album de Pomme, « A peu près », pourrait bien créer la surprise, et pourquoi pas l’événement. Un premier pas sur une très belle route.

Comme le chantait Lorie, avec sa sagesse légendaire : « A 20 ans, on est invincible, à 20 ans, rien n’est impossible, on traverse les jours en chantant et l’amour c’est le plus important ». On ne sait pas ce que vous faisiez, vous, à 20 ans, mais Pomme, de son côté, a déjà un joli EP dans le rétroviseur et vient de sortir, le 6 octobre dernier, un premier disque aux sons folk et pop, faussement léger et réellement profond.

On dit souvent que dans une première œuvre, l’artiste met tout. Tout ce qu’il pense, tout ce qu’il est, tout ce qu’il a à dire, tout ce qu’il sait faire. Par peur qu’il n’y ait pas de seconde chance peut-être, par générosité et enthousiasme de pouvoir partager ses passions, ses peurs et ses envies, sans aucun doute. Si c’est vrai, alors Pomme est une jeune femme épatante. De talent, de fraîcheur, de maturité, de sincérité.

Trait d’union entre les titres, fil rouge de l’album, sa voix. Pas à proprement parler une voix puissante, plutôt un réjouissant mélange de simplicité, de force et de maîtrise. Des graves de velours, des aigus aériens, une émotion palpable mais jamais forcée, tout ça avec une apparente facilité. On pense à Barbara, à Françoise Hardy, à Camelia Jordana. Avouez qu’on a entendu des comparaisons plus dégueulasses.

Cette voix, toute en nuances et donc taillée pour le live, on prend le pari qu’elle va captiver plus d’un public attentif et troublé dans les années à venir, probablement accompagnée de sa fidèle auto-harpe. La grande opération séduction a d’ailleurs déjà commencé avec, depuis deux ans, pas mal de premières parties, notamment d’Angus et Julia Stone, Benjamin Biolay ou encore Yaël Naïm. Nous, on l’avait vue ouvrir pour Pierre Lapointe au Théâtre du Rond Point en 2015 et on peut témoigner sous serment, main sur le cœur et cochon qui s’en dédit, qu’elle avait mis la salle dans sa poche. Elle va récidiver, à coup sûr, et enchanter les fans d’Asaf Avidan à l’Olympia en novembre. Asaf Avidan qui soit dit en passant semble déjà la considérer comme sa petite sœur de scène. Non franchement ça sent vraiment bon.

Et toute seule comme une grande elle a conquis le public de la Boule Noire pendant quelques soirs il y a quelques jours. Le genre de salle dont la moite promiscuité et l’acoustique intimiste ne permettent pas de tricher. Elle y a repris Barbara (« Septembre » et « Quel joli temps »), y a chanté en duo avec Safia Nolin. Que de promesses faites et tenues jusqu’ici qui donnent une envie folle d’aller encore l’applaudir, super vite.

Mais la voix de Pomme n’est pas juste là pour faire joli, elle se met au service de textes aussi doux qu’incisifs. Ce que raconte Pomme est parfois sombre, parfois joyeux, souvent poétique, mais fait toujours sens. A croire qu’elle a déjà vécu cent vies, tant elle est juste, tant elle combat, tant elle accepte, tant la mièvrerie n’est pas de son monde.

L’amour comme thème central s’impose. Evidemment. Qui ne parle pas d’amour, ne chante pas l’amour, ne pense pas constamment à l’amour ? Ici l’amour est décortiqué au fil de ses saisons, de ses désirs, de ses hauts et de ses bas. Une rupture qui laisse des traces, des décombres qu’il va falloir déblayer pour reconstruire dans « A peu près ». Une première nuit dans « Même robe qu’hier », titre choisi comme premier extrait de l’album, né de la collaboration de Pomme avec le merveilleux Ben Mazué, et où l’on peut retrouver un joli et très bienvenu cousinage avec l’ « Heure du thé » de Vincent Delerm. Des hommes. Auxquels on doit renoncer, parce que c’est déjà l’homme d’une autre (« La gare »), parce que la vie l’a emporté (« Adieu mon homme ») parce qu’on se l’est fait chiper (« Pauline »). Des femmes. Qui inspirent courage, romantisme, passion, quoi qu’il en coûte (« On brûlera », LA claque de l’album).

Un peu étonnamment au premier abord, sans doute encore une fois du fait du très jeune âge de Pomme, la mort est aussi un thème assez présent dans l’album. La mort de l’autre mais aussi, et traitée de façon plutôt directe, la sienne. On a notamment été assez scotchés par « De là-haut », dans laquelle, bercée par un arrangement sixties, elle assiste à ses propres funérailles, sereine, libre, libérée. On aurait pu craindre une approche frontale, morbide, glaçante, on ne trouve que sagesse et résilience.

Dans « Comme si j’y croyais », Pomme dit que « grandir c’est décevoir un peu, il faut s’appliquer si l’on veut rater sa vie ». On n’est absolument pas désolés de lui dire que pour elle, de ce côté-là, c’est mal parti.

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1 commentaire

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Bernard 10.10.2017

Entièrement d’accord avec le contenu de cette chronique. Outre la beauté des mélodies, des textes, je retrouve la maturité de l’artiste qui m’avait déjà impressionné.

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