Quand la chicha se mêle aux guitares amplifiées et aux batteries tambourinantes, les mélodies ondulantes et solaires rappellent les grands espaces et donnent au mot psychédélique tout son sens. Le Pérou, contrée des conquistadors et des vallées sacrées, fût le berceau d’un rock aussi rutilant qu’obsédant.
Dans les esprits, rock’n’roll rime avec l’Occident. Ses géniteurs, le Royaume Uni et les États-Unis garderont surement pour toujours le monopole de la reverb’ et de la fuzz au vu des morceaux qui perdurent dans les discographies idéales de tous. Pourtant, le rock anglais des années 60 et l’esprit punk n’ont pas connu de frontières. Pour certains (nous compris), Los Saicos (à prononcer comme psychos) sont aussi importants que les Sonics dans le patrimoine rock. Alors, pourquoi les nuggets (chansons psyché) péruviennes désertent-elles les playlists ? De 1960 à 1970, juste avant que la dictature militaire de Juan Velasco Alvarado interdise concerts et importations de CDs, ont explosé de nombreux groupes qui ont offert au garage leur patte. On est allés à la recherche des meilleurs carrières musicales, furtives et juvéniles, du Pérou pour apporter à vos oreilles un peu de diversité.
Los Belkings
Ce groupe instrumental de Lima a donné à la surf musique ses lettres de noblesse, la croisant sans scrupule à des sonorités latines et caribéennes. Rythmiques pétaradantes et cascades de guitares ondoyantes donnent à « La Septima Patrulla » des allures de course effrénée de série B en ponchos colorés.
Los Saicos
Tout juste sortis du lycée, une bande sévit avec un triptyque alors peu commun : voix crasseuse, attitude nonchalante et guitares indolentes. Difficile de ne choisir qu’une chanson dans cette discographie ramassée et parfaite. « Demoliciòn » a tout d’une hymne et est l’essence même de leur esprit punk avant l’heure.
Los Vips
À peine le succès et les passages à la TV débloqués que le groupe composé des deux frères Barreda disparaît déjà. « Cabeza de Diamante », fait la synthèse de leur patte musicale. Des guitares abrasives, un son égrainé et des rythmiques sauvages, le groupe n’a pas fait dans la dentelle.
Los Holy’s
Fin 66, enregistrement d’un 45 tours novateur par de jeunes lycéens du quartier Pueblo Libre. La bande se fait la maîtresse d’un rêve sonique enchanté. Tension et roulement, c’est tel un serpent kaléidoscopique que « Psicodoleico Desconocido » se présente : furtif et âpre.
Los Flyers
Inconnus au bataillon. Taper le nom de ce groupe sur Google vous assure de tomber sur nombreux flyers plus-moche-tu-meurs. À peine deux sons sur YouTube : une reprise de Mirza et « Maria », très belle chanson et sans doute la plus classique de cette playlist. Chœurs beatlesque et structure couplet-refrain la rapprochent plus de ce que l’on connaît du rock.
Los Doltons
Le groupe se sépare en 1970 pour que chacun puisse suivre des études universitaires jusqu’en 2003, date de leur première tournée aux États-Unis suivie d’une au Canada. Comme quoi, il n’est jamais trop tard. « Horizontes Perdidos » fait la B.O. parfaite du western. Ses guitares et vents transpirent le chapeau de cuir et les escapades dans le canyon brûlant.
Los Jaguars
On n’en sait pas plus sur les jeunes frères des Doltons si ce n’est qu’ils ont recopié la recette avec brio. Leur nom sied à la tension de leur morceau « Celosa » à l’enthousiasme piquant.
Los Feltons
Los Feltons, sont le premier groupe de rock de Chimbote, qui semble être un bled un peu paumé. Leurs répétitions se faisaient dans une ferme à El Fogón. C’est dire comme l’esprit musical farouche s’était répandu dans tout le pays. C’est sans doute là-bas que leur est venu le morceau répétitif très justement intitulé « El tema de los Feltons ».
Los Shains
Sans doute le groupe le plus connu de l’âge d’or du rock péruvien avec Los Saicos, ils sont les rares dans le lot à connaître une carrière assez longue et voir un quatrième album naître. Lorsque le groupe s’est séparé, Los Nuevos Shains est né de ses cendres et perdure encore. « Apache 66 » languit, ponctué de distorsions, d’une ligne de basse ardue et de guitares hululant.
Los Datsun’s
Formé à Huancayo, Los Datsun’s sont techniquement toujours ensemble. Nommé au patrimoine culturel de la ville en 1992, on leur trouve un aspect un peu moins sauvage que les autres formations. « Estoy Llorando » introduit à la pop psychédélique délicate et fragile de Los Datsun’s. Infestée d’une reverb’ qui fleure le rêve, cette chanson s’apparente à une procession aux guitares implorantes.
Génial ! Je suis un gros fan de chicha péruvienne et cumbia psychedlique. Cette playlist garage / surf rock, arrive à point nommé !