Les années 2010 ont vu le producteur allemand Pantha du Prince monter d’un cran sa créativité. Après dix ans de composition, l’artiste voit grand : son gigantesque live en 2012 avec le collectif de tapeurs de cloches The Bell Laboratory et sa nouvelle lubie cette année avec une triade nous prouvent qu’il teste les limites du possible. On a discuté avec lui de ses délires soniques et visuels avant sa date au Trianon, demain 04 septembre. Le prince rêve.
Peux-tu me parler de ta résidence à la Villa Aurora à Los Angeles ?
La Villa Aurora est un monument historique très important en Californie, où Martha et Lion Feuchtwanger [écrivain allemand / NDLR] ont vécu après avoir fui l’Allemagne nazi puisqu’ils étaient juifs. Lion est mort dans les années 50 et Martha a continué d’y habiter pendant encore 15 ans. Elle a ensuite donné la villa à l’Etat allemand pour que les artistes allemands puissent y rester et faire l’expérience de la vie d’émigrant pendant un moment. L’atmosphère étrange des montagnes et la vue sur l’Océan Pacifique était une bonne inspiration pour mes nouvelles productions. J’y ai développé la triade, fait nos premières répétitions, écrit de nouveaux morceaux et accueilli chaque matin le gazouillis des oiseaux.
De plus, tu peux aussi voir la maison comme le paradis du non-choix, parce que Martha et Lion n’auraient jamais été capables de retourner en Allemagne. Cette idée d’être un invité toute ta vie est une perspective très intéressante. La villa est ouverte au public, donc tout le monde peut y aller et voir cet extraordinaire refuge.
Une petite description de l’installation sur scène et de quelle façon les personnages interagissent entre eux ?
Nous sommes une triade, donc une formation à trois. C’est un dialogue entre des instruments électroniques et des percussions acoustiques. Nous sommes une formation de mondes soniques et de mondes visuels. C’est un rituel, une expérience interactive et ouverte aux réactions intuitives de la situation. La triade est une structure de pouvoir dans la science, l’art et la technologie.
Pardonne mon ignorance mais quelle est cette lentille ou cette parabole qui reflète les projections de lumière ?
C’est un miroir parabolique qui projette lui-même des faisceaux comme un laser. C’est un instrument visuel et une métaphore pour une libre disponibilité de toutes sortes d’énergie. Tu pourrais cuire un œuf au centre du miroir. Et y trouver une forme triadique.
The Triad reprendra une sélection de tes morceaux et les réadapter. Est-ce que le groupe prendra des libertés avec ces compositions ? Y aura-t-il de la place pour l’improvisation et l’imprévu dans ce projet ?
Nous allons globalement jouer de nouvelles et anciennes compositions dans des formats différents. Nous jouons intuitivement avec le matériel et nous sommes ouverts à des directions que nous n’avions pas vues avant… Et auxquelles le public pourra prendre part.
On n’a pas encore beaucoup d’infos sur le projet jusqu’à présent. La discrétion fait partie du projet ?
The Triad sera la fondation d’un nouvel album, donc il sera intéressant de voir comme nous progressons.
As-tu remarqué que le public était plus réceptif aux lives audiovisuels que tu as proposés ces dernières années ?
Mhh, ce que j’ai fait était globalement très minimal et généré de mon propre monde, en restant focalisé sur une expérience sonique plutôt que visuel. Mais le visuel était aussi porteur d’information sonique.
Quelles sont tes principales prises de plaisir quand tu es spectateur ?
J’aime lorsqu’il y a une certaine prise de risque, un certaine perspective qui permette des ratés et des réactions situationnelles. La prise de risque amène parfois le moment à un niveau sublime. Si tout est pré-produit d’avance, alors je ne ressens aucun plaisir. Je veux avoir la chance de rester dans mon propre espace mais d’être challengé et aller au-delà l’habituel et le prévu.
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