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Olivier Marguerit : « J’ai mis du temps à accepter de porter mon projet »

Homme de l’ombre de divers projets, le guitariste de Syd Matters exerce en qualité d’arrangeur et de réalisateur. Autour d’un café à deux pas de son studio, Olivier Marguerit a pris le temps de décrire les nuances des métiers qui le nourissent au travers de sa palette de multi-instrumentiste. L’occasion aussi d’évoquer sa première expérience en solo, baptisée O. Une interview pour ne pas tourner en rond avec un artiste aux allures d’artisan, qui veut « prendre le temps de construire ».

Tu es reconnu comme un musicien aux diverses facettes, mais quasiment inconnu à propos de ton projet solo O. Dis-nous en plus, s’il te plaît.

Le nom du projet est la lettre O, mais c’est compliqué d’avoir une lettre comme emblème aujourd’hui, dès que tu penses au référencement sur YouTube ou Google. Donc j’avais pensé à l’associer à un titre de Kraftwerk que j’adore, « Ohm Sweet Ohm ». Et puis, ça marche avec mes initiales O.M. Avec le temps qui passe, je vois que ça brouille les pistes. Mon premier EP est sorti il y a une petite année. Le deuxième arrive. Je les ai faits seul et veux construire sur la durée. Ce projet est lié à mon arrivée à Pigalle, dans une cave où je me suis installé pour jouer et travailler.

Tu vis ce projet comme une respiration à côté de tes activités de musicien ?

Maintenant, ça devient de plus en plus sérieux. Dès le début de ma carrière, j’écrivais des chansons à côté des Chicros et Syd Matters. Ça prenait donc pas mal de temps et ne pouvais pas me consacrer à ma musique. Je pensais aussi que mon niveau était bien pâle face à des auteurs-compositeurs que je considérais comme géniaux. J’ai mis du temps à accepter le fait de porter un projet par moi-même.


O – Mon Echo

Raconte-nous ton arrivée dans Syd Matters ?

Le groupe s’est construit après que Jonathan ait construit ses chansons seul dans sa chambre. Une fois signé, le label avait besoin d’un groupe pour l’accompagner sur sa première tournée. Excepté Jonathan, nous – les musiciens de Syd Matters – venons du même coin de banlieue, donc ce ne fut pas très dur de bien s’entendre. Le plus dur, c’est de rendre sur scène à plusieurs guitares ce qui a été conçu en solo. A partir du troisième album, on est contractuellement devenu un groupe et le travail a été beaucoup plus collectif – notamment au moment des disques – avec Jonathan comme leader naturel.

J’ai lu que Jonathan Morali composait des BO de films. Est-ce lié à la mise en suspens de Syd Matters ?

A l’issue de la dernière tournée, vu qu’on avait enchaîné les troisième et quatrième albums, on avait fait le tour de quelque chose et envie de faire une pause. On avait joué deux-trois fois dans les mêmes salles de concerts en France, essayé de percer à l’international. Ça avait pris, mais pas suffisamment. Plusieurs dates à New-York, le festival à Austin… Il y avait une petite latitude. Jonathan avait des opportunités de musiques de film. Moi, la proposition de monter le live de Mina Tindle, d’où le besoin de faire cette pause. Avec Syd Matters, on se remet à travailler sur de nouveaux projets. On se retrouve d’ailleurs après cette interview pour bosser.

Quel a été le déclic en début de carrière qui t’a poussé à devenir professionnel ?

Le premier groupe pro dans lequel j’ai joué est Chicros. C’était vers 2002. Je faisais une école de musique centrée sur le jazz, autour de l’écriture, et travaillait à mi-temps comme pion. Syd Matters m’a contacté. Je ne pouvais plus garder mon job de surveillant. J’avais cumulé quelques mois de chômage, j’ai donc pris la tournée et ai ensuite pu enchaîner avec l’intermittence.


O – Le froid

Tu es pas mal demandé désormais pour tes multiples casquettes. Un peu dans la lignée d’un Albin de la Simone ?

Peut-être, je ne sais pas (gêné). Effectivement, j’ai eu la chance d’avoir plein de projets, intéressants en plus. C’est chouette. Le fait d’être père depuis un an et demi a changé ma vision.  Je faisais plein de lives avant, maintenant j’évite de trop tourner et de rester au maximum à Paris. Travailler pour les autres, composer pour des films… Par exemple, j’ai refusé la tournée en cours de Mina Tindle. J’avais fini ses arrangements, le disque ; on avait monté le groupe ensemble, puis j’avais fait sa première tournée. J’ai pensé que c’était le bon moment de faire un break avec les concerts.

Peux-tu expliquer les métiers de réalisateur et d’arrangeur ?

Réalisateur, c’est le travail que j’ai fait pour Mina Tindle. C’est la personne qui gère de A à Z la production du disque. Ca va de l’échange avec l’artiste, des démos jusqu’au mixage et au mastering. Comme on est copains avec Pauline (Mina), on avait même commencé à bosser à partir de ses maquettes. T’es là pour donner des idées d’arrangement, retravailler un morceau mal foutu mais aussi donner une direction artistique à l’ensemble du projet de disque. Quand tu estimes avec l’artiste qu’il y a tout ce qu’il faut, tu discutes avec le label pour aller en studio, caler les dates, les musiciens, etc. C’est vraiment une aventure que tu vis à fond du début à la fin.

Ce fut le cas avec Mina Tindle ?

Oui. On n’avait pas des moyens démesurés, mais l’envie de faire un disque assez ambitieux. J’avais la capacité de jouer plusieurs instruments, donc on en a profité pour faire des économies et faire appel à quelques musiciens qui nous font rêver. Ne trouvant pas d’équivalent au batteur du groupe américain Dirty Projectors dont on adorait le toucher, on a décidé de le contacter (Brian McOmber). On a aussi pu faire mixer les morceaux par deux mecs supers : Craig Silvey qui a notamment travaillé avec Arcade Fire & Yann Arnaud qui a bossé avec Air ou Syd Matters. C’était super ! On a fait une partie du disque dans ma cave et on a ainsi pu se payer quelques mecs pointus qu’on voulait vraiment. Pour revenir à ta question précédente, c’est beaucoup plus précis le métier d’arrangeur. Tu viens pour écrire une partie de cordes sur un titre. Ou du genre : « Sur ce morceau-là, j’ai pas d’idée, comment tu pourrais améliorer les synthés ? » C’est de l’orchestration, en fait.

Olivier est guitariste de Thousand, trio porté par Stéphane Milochevitch.

Tu préfères le rôle de réalisateur ou celui d’arrangeur ?

C’est génial de faire de l’arrangement, de participer à un projet, mais tu es beaucoup plus investi en tant que réalisateur. Mina Tindle, ça a été trois-quatre mois de ma vie. Pleinement.

Laissons l’argent de côté, tu pourrais réaliser pour un mec dont tu n’as rien à foutre ?

Pas des mecs dont j’ai rien à foutre ou, surtout, dont le travail me semble trop loin de mes goûts. . Par exemple, je viens de travailler sur le disque du gagnant de La Nouvelle Star 2014. Yann Arnaud l’a réalisé et a demandé à Stéphane, de Thousand (qu’Olivier accompagne à la guitare, et c’était très bon en première partie de Mina Tindle à La Gaîté Lyrique / NDLR) et moi même de participer activement à l’ensemble de processus d’enregistrement. Naturellement, je ne serai pas allé vers Mathieu Saikaly, ne le connaissant pas. Au final, c’était bien. Le plus dur est de nouer une relation d’ultra-confiance avec l’artiste. Il faut savoir être force de proposition. Orienter sans violenter. C’est pas simple de laisser quelqu’un retoucher tes chansons. Le plus gros se trouve au début du travail, au moment d’apprendre à se connaître.

Le site officiel de O

Crédit portrait : Arthur Harari
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