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Non, les banlieues parisiennes n’ont rien à envier à Paris (en terme de musique)

Alors que Valérie Pécresse fait la peau au Festival d’Ile-de-France, d’autres nouvelles nauséabondes pointent le bout de leur nez sur le territoire français. Au même moment où ces élus considèrent normal de faire taire des événements quarantenaires sans leur envoyer de faire part, la proposition culturelle de la région la plus peuplée de France dépasse les limites de la créativité. Inutile de rappeler notre attachement à ce berceau du développement de Sourdoreille, on fera, dans cette enquête, uniquement parler les acteurs qui font la pluie et le motown en IDF. On laisse ici sommairement de côté la question des subventions et de fréquentation (on y viendra plus tard), on met sérieusement l’accent sur la qualité d’accueil et des idées et on s’attarde à déconstruire un certain mythe parisien.

Il est un sentiment assez étrange de lancer une enquête tournée autour des banlieues parisiennes et les musiques actuelles et se rendre rapidement compte de l’énormité de son propre point de départ : sous le prisme parisien « convenu » des médias et du secteur musical, la banlieue semble bien résiduelle. Et même si nous en avons déjà parlé dans nos lignes et nos vidéos, même si cette étude avait évidemment à cœur de parler des territoires et d’oublier un temps la ville lumière, le mal était fait, la courte vision déjà révélée. Mais quoi, alors ? Passer à autre chose, par ego ? Flouter ses erreurs ? Ou raconter quand même ?

« Comment faire bouger les Parisiens en banlieue ? » interrogea l’enquêteur pressé par ses propres limites. « Ah ah ! Pas besoin » lui répondirent logiquement ses interlocuteurs. Avec ses 12 millions d’habitants, l’Ile-de-France bat des records de démographie et de proposition culturelle dans l’indifférence généralisée et laisserait volontiers la Parisienne de côté, si cela était en son pouvoir.

Cet article raconte une ignorance à l’encontre de la banlieue parisienne, il propose une pédagogie basée sur des témoignages des acteurs de la Région pour comprendre quelles questions il conviendrait de poser et celles qu’il faudrait oublier pour de bon.

La barrière psychologique du passage du périph’ parisien

(ou le véritable problème relatif à la vitalité des lieux des musiques actuelles de banlieue : la grosse misère des transports en commun)

Notre enquête se basait sur plusieurs interrogations  : comment faire vivre un lieu de musiques actuelles en banlieue ? Comment remplir des salles dans des territoires peu animés en proche banlieue ? Ou encore, un lieu en banlieue lointaine a-t-il besoin du public parisien ? Or, le baron perché sur sa butte parisienne peut difficilement envisager une chose : ne pas parler de Paris. Chose compliquée, vous l’entendrez, vu que la ville engloutit tout sur son passage. Mais pas si bête.

De l’autre côté du périph’ 

Pour commencer, démontons le concept appelé la barrière psychologique du passage du périph’ parisien. Là-dessus, nos interlocuteurs privilégiés sont globalement unanimes. Vincent Rulot, directeur de la salle de concert La Clef à Saint-Germain-en-Laye, est le premier à n’en plus pouvoir des hasardeux points de vue : « La barrière du périph’ existe, mais dans un sens seulement. Je n’ai jamais entendu un banlieusard évoquer cette barrière pour lui. » Ce qu’affirme également le rappeur parisien JP Manova : « J’ai surtout remarqué que quand je jouais à Paris , mon public est souvent banlieusard, ils se cassent direct après le concert en général. » Même son de cloche chez Franck Michaut, directeur du RIF, la confédération des réseaux départementaux de musiques actuelles/amplifiées en Île-de-France, qui tempère : « Le sujet de la difficulté des parisiens à franchir le périph’ est certes intéressant (notamment à l’aune des réflexions autour du Grand Paris) mais il n’est pas décisif pour les lieux de banlieue, qui ont surtout pour vocation de travailler sur leur bassin de population / bassin de vie. »

Simplement intéressant donc. Le principal problème des lieux de diffusion concerne plutôt le réseau de transports en commun et la centralisation. Paris peut souvent plus être un problème qu’une solution. Tous les transports mènent à Paris, c’est bien connu, par contre, dans les consciences collectives, il semble plus acceptable de courir à cloche pied dans un champ d’orties sans ouvrir la bouche ou de supporter se faire suivre toute sa vie par une famille de canards qui caquettent en biélorusse plutôt que de vouloir faire le trajet Pontoise – Evry un vendredi soir de novembre à 19h. Pour une salle de concert loin de stations de transports, le simple fait de ne pas avoir de parking peut lui être fatal.

la clef

La Clef, Saint-Germain-en-Laye

Pour Juliette Bompoint, directrice de Mains d’Oeuvres, lieu culturel pluridisciplinaire à Saint-Ouen (donc plutôt en proche banlieue, accessible en métro), la proximité avec Paris est moins un problème : « Je suis dans un RER pour Nanterre que j’ai attendu 25 min sur le quai et j’ai envie de mourir. » De plus, comme on l’évoquait plus haut, le Grand Paris commence à changer la donne. Un constat que partage le chanteur et musicien natif de Versailles Olivier Marguerit alias O : « De plus en plus de gens de mon entourage sont en train de s’installer dans la périphérie. La limite psychologique de Paris est en train de s’agrandir, je pense. »

Là-dessus, des initiatives se lancent. Des lieux mettent en place des systèmes de bus pour ramener le public dans les communes limitrophes. Le covoiturage s’organise. L’entraide. Ce que Franck Michaut ou Vincent Rulot veulent surtout éviter et dénoncer, ce sont les salles (souvent des Scènes Nationales) qui font des systèmes de navettes à partir de Paris. A l’opposé de leur philosophie, cette pratique illustre bien à quel point il est tentant de penser la banlieue à travers Paris. D’où l’obligation d’éclairer les consciences, de faire de la pédagogie auprès des publics, des professionnels et des institutions.

enlarge

Capture de l’infographie de : Enlarge Your Paris

Pour Laura Cornuault, responsable de la communication de l’EMB à Sannois (juste à côté d’une gare), le problème ne vient pas d’un public qui aurait la flemme de passer le périph’ mais de son ouverture : « L’appartenance et l’appropriation d’un territoire font intrinsèquement partie de l’identité d’un individu. Se risquer à aller explorer l’inconnu demande une force de caractère, une éducation à l’ouverture, à l’aventure, un risque assumé et voulu. L’instinct de propriété est bien plus inscrit dans l’ADN humain que celui de la découverte de la différence. » En somme, celui qui ne passe pas le périph’ est le même qui vit rive droite et qui ne va jamais rive gauche (et inversement), le même qui ne voyage pas (dans l’espace ou dans sa tête), le même qui ne risque pas de changer ses habitudes et qui vient de s’acheter un nouveau canapé 100% confort à mémoire de forme. Les clichés ont la vie dure. Il est enfin évident que la provenance des publics dépend de l’éloignement vis-à-vis de Paris : le public sera forcément local à File 7 à Magny-le-Hongre (allez vous fader le bout de la ligne RER A, on en reparle) et plutôt mixte à Mains d’Oeuvres, à Saint-Ouen (accessible depuis les métros Porte de Clignancourt, ligne 4 et Garibaldi, ligne 13). Il faut donc éviter le diable de la généralisation.

Faites-vous à l’idée : tourner sa communication pour ramener du Parisien est un mauvais calcul

N’allez pas poser la question : « Quelles sont vos idées de communication McGyver pour donner envie aux parisiens de passer la barrière ? » à n’importe quel programmateur de la région ou les réponses seront cinglantes… et méritées. Ce qui semble le plus difficile à avaler pour Vincent Rulot « est la morgue de ceux qui jugent à partir de leur prisme parisien le travail de ceux qui s’activent en banlieue : pas assez pointu, pas assez hype, pas assez « risqué », pas assez nouveau, etc. Venez organiser deux à trois concerts par semaine en banlieue et on en reparle au bout d’une saison. Ce qui compte pour durer, c’est aimer les gens avec lesquels on vit et avoir envie de leur proposer autre chose que des zones commerciales et des rues vides après 20h. »

Au-delà de la question parisienne, la question de la communication peut être secondaire pour d’autres (sans être pensée à moitié) par Juliette Bompoint qui est « pour le qualitatif et pas pour le quantitatif, la communication qui ne se voit pas, le lien humain, le petit cousin du voisin qui a son premier choc esthétique à Mains d’Oeuvres par hasard, ça me va aussi. Tant pis pour Decaux s’ils n’ont pas compris ce qu’était l’intérêt général. » En banlieue, communiquer autrement, ça peut être aussi utiliser l’humour, le décalage, l’affichage pirate sur les palissades des immeubles en construction nombreux en Ile-de-France, parce que « MacGyver lui il avait des gros sous pour ses enquêtes. Même si c’est pas clair dans la série, il était payé par Peter Thornton, c’est sûr (le chauve un peu fort) », foi de Wael Sghaier, membre du Maad93, réseau de lieux de musiques actuelles du 93 et à l’origine du projet Mon Incroyable 93, entre voyage et rencontres en Seine-Saint-Denis, département qu’il ratisse de long en large depuis des années. Vous noterez que nos intervenants sont des passionnés pétris de répartie : trouvez-nous ça à Paris. Ok, on se calme sur les préjugés, pas de compétition inutile.

mains d'oeuvres

Mains d’Oeuvres, Saint-Ouen

Quand on veut, on peut ?

(Ou les défis des salles de concert en Ile-de-France)

La Région d’Ile de France a ce caractère spécial via un bassin de population très élevé et sa frappante inexistence médiatique quand il s’agit de parler d’autres choses que de misère sociale. Tout ça alors qu’elle est souvent à l’origine des initiatives populaires, culturelles et politiques à l’avant-garde. Icar géographique volant trop près du soleil Paris, ses ailes brûlent sans avoir montré aucune once d’orgueil.

Besoin d’une programmation musicale éclectique

Pour exister, elle doit souvent s’adapter, redoubler de créativité, notamment sur sa programmation, l’accueil, le lien social. Pour commencer, comme c’est le cas pour l’écrasante majorité des SMAC (scène de musiques actuelles) de France, les programmateurs ne peuvent pas se permettre de miser sur un seul style musical – ni avoir un rôle uniquement musical d’ailleurs. N’a pas cinquante salles de concert dans sa ville qui veut : pour que les lieux fonctionnent, ils doivent d’abord placer leurs pions sur l’éclectisme. « A trop fonctionner sur le prisme parisien on a tendance à se concentrer sur une petite frange de gens (artistes, médias, professionnels de la profession) qui font soit disant l’opinion, pointe Vincent Rulot. Nous, on revendique de pouvoir faire le même mois Pneu, MHD, une soirée bretonne (avec crèpes), Carpenter Brut, une scène ouverte, une jam session et Chlorine Free, avec des groupes locaux et des groupes émergents aussi. » On notera quand même qu’il manque cruellement d’une session roller disco les yeux bandés mais à part ça la proposition est plus qu’honnête.

Aller au-delà d’une programmation musicale classique

Rareté et éclectisme doivent suppléer à des idées autour de l’animation de l’accueil des lieux. Tous les ans, Paul B, SMAC de Massy, dirigée par Christian Maugein organise le festival Les Primeurs de Massy. Jeanne Added, Feu! Chatterton, Jain, Superpoze et des dizaines d’autres ont peuplé ses affiches souvent très justes suivant une idée rassembleuse du soutien à l’émergence musicale. Et on n’en parle pas uniquement parce qu’ils ont une cuvée spéciale du vin « Primeurs » de Touraine à 2,5€ au bar. La salle espère par exemple proposer un programme pour le jeune âge. A ce sujet, nous avons échangé avec le maire adjoint délégué à la culture et au personnel municipal à la ville de Massy, Pierre Ollier, qui travaille en étroite collaboration avec le lieu : « Son objectif est d’inciter des enfants âgés de 7 à 12 ans et qui n’ont jamais fait de musique à consacrer 4 heures par semaine pendant trois ans à l’apprentissage d’un instrument et à une pratique collective. Que les enfants de tout quartier puissent se dire ‘pourquoi pas moi’ est crucial. » Le lieu est surtout attentif au tissu local et monte des collaborations avec des milieux différents des musiques actus (club de photo de Massy, scénographes, lycée professionnel/bâtiment). De l’idée à revendre ? Paul B a mis en place deux studios de répète pour les musiciens amateurs, Mains d’Oeuvres en a 19 quand File7, le Plan 2, la Clef et l’EMB ont été pour la plupart rénovés et possèdent des équipements au top. Qu’attendez-vous, bordel, pour parler de ces salles à votre entourage ?

Facade du centre culturel de Massy

Paul B, Massy

Si la programmation est au centre de tout, la médiation l’accompagne comme une évidence. Comme un slogan, Bénédicte Froidure, directrice et programmatrice de la salle File 7 à Magny-le-Hongre scande : « Dans n’importe quel territoire il faut penser la culture pour tous et le clivage culturel pour personne. » Juliette Bompoint persiste et signe : « Les banlieusards ne sont pas plus débiles que les Parisiens, la médiation envers l’art c’est pour tout le monde sinon on fait du blockbuster » avant d’ajouter : « On tente de mener tous les chevaux de bataille au quotidien : pas que des exclus, des discriminés, des non-publics, pas que des bobos, des Parisiens, pas qu’un équipement de proximité mais un équipement exigeant. » L’économie des lieux tient souvent sur la médiation culturelle, les ateliers d’artistes et les résidences. Un modus vivendi : travailler son public. Ce qui vaut à essayer de le comprendre.

L’accueil banlieusard

S’il y a bien une chose que tout le monde s’accorde à mettre en avant, c’est bien l’accueil et la convivialité dans les lieux de banlieue, public comme professionnels, en opposition à des lieux parisiens en sur-jauge, sur-activité, sur-stress, surtout. Sans faire de l’anti-parisianisme primaire, il n’est pas très compliqué d’imaginer que les conditions d’accueil des artistes (cachets, repas, relationnel) sont bien plus détendues et solidaires que sur un territoire saturé.

« Ça nous fout la rage quand un groupe accepte de jouer à Paris pas ou mal payé plutôt qu’en banlieue ou qu’il ne relaie pas notre date mais sa release party à deux balles dans un rade parisien infâme. » Vincent Rulot, La Clef

Selon Wael Sghaier : « Les artistes viennent parler avec le public à la fin des concerts. C’est une des plus-value des salles de banlieue » Pour Sonia Salhi, chargée de communication à File 7, ce sont « les bénévoles qui mettent l’ambiance derrière le bar ou encore les artistes plus enclins à venir à la fin du show dédicacer des albums et rencontrer le public au stand merch. » Pour Olivier Marguerit, ce sont « souvent dans ces salles où il possible de faire des résidences, s’installer sur la scène et travailler la journée pour définir techniquement un show » et Juliette Bompoint assure qu’à Mains d’Oeuvres, on peut voir « des filles de joie avec des bidouilleurs qui font danser des enfants tout en plantant des courgettes. » JP Manova quant à lui nous glisse que « l’autre jour, ils ont programmé Raul Midón aux Cuizines de Chelles. » Le rappeur a lui-même fait une soirée au café La Pêche à Montreuil sans avoir annoncé ses ‘guests’ qui n’étaient autres que MC Solaar, Rocé, Daddy Lord C pour un public de… 170 personnes à peine. La banlieue, c’est aussi ça.

Au-delà du rythme parisien, Juliette Bompoint vote pour l’ailleurs, le ralenti, le jamais fait pour redonner du sens à nos pratiques : « Pour avoir travaillé dans un lieu Paris intra-muros, il n’y a rien de pire que de se sentir superflu et inutile pour un objet culturel overdosé. Traverser le périph’ pour les Parisiens c’est aussi aller chercher l’aventure. » On serait presque tentés de prendre cette phrase et la faire résonner comme une critique de la société de consommation mais on se lancerait encore dans une digression. Oh regarde un merle dans l’arbre. Hmm.

L’exemple des fêtes électro et des lieux éphémères

Otto10, Soukmachines, 6B, Alterpaname, La SIRA, Camion Bazar, La Ferme du Bonheur, La Dynamicale, La Station, Le Macki Festival… Ces noms résonnent aujourd’hui au banlieusard comme au parigo comme les bouffées de chaleur qu’on n’espérait plus des bouches de métro. Parmi eux, des collectifs festifs, des espaces de concerts en entrée quasi libre, un consensus anti-fumoir, des terrains ouverts, des plages, des prix beaucoup plus abordables, un soin tout particulier accordé aux à-côtés de la fête (scéno, activités ludiques, espaces détente, événements théâtralisés). Ce qui anime ces entités hédonistes ? L’horreur des clubs fermés de Paris, chers, où l’accueil est le dernier des soucis. L’idée première est de retrouver l’essence même de ce qui anime les danseurs depuis des siècles : la liberté, l’évasion, la déconnexion totale. Pour être des habitués, on vous garantit même que plus les organisateurs sont sympas, moins ils se foutent de leur public et plus le public se responsabilise (et aide même souvent à la bonne tenue des événements). S’il leur manque encore une plus grande mixité sociale à leur arc, ces structures font du bien à la culture, beaucoup de bien.

Producteurs, artistes, médias : date banlieusarde oubliée

Vincent Rulot est en ébullition sur l’accueil en particulier : « Ça nous fout la rage quand un groupe accepte de jouer à Paris dans des conditions ‘médiocres’, pas ou mal payé, plutôt qu’en banlieue. Ça nous fout la rage lorsqu’on voit que sur les réseaux sociaux il ne relaie pas notre date mais sa release party à deux balles dans un rade parisien infâme. » Etant présents sur le paysage des médias musicaux en ligne depuis une dizaine d’années, avouons que ce discours ne nous ait pas fait tomber de notre chaise plus que ça. Combien de fois avons-nous lu des articles omettant avec le plus grand naturel la date banlieusarde ? Combien de fois avons-nous fait nous-mêmes cette erreur en apparence bénigne ? La méchanceté gratuite n’étant que rarement réfléchie, on tiendra pour coupable l’ignorance de ces problématiques pourtant vitales aux acteurs de la région snobée. Une ignorance hélas complètement intégrée dans les mœurs du secteur musical actuel.

Otto10

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A ce propos, les artistes qu’on a interrogés pour cette enquête ne partagent pas cette vision parisiano-centrée de leur carrière et c’est probablement pour cela qu’on les aime. JP Manova pense qu’il faut « être prêt avant de se risquer à programmer une date parisienne parce que ne pas remplir la salle pourrait envoyer un mauvais signal à son développement et aux autres programmateurs en périphérie » pendant qu’Olivier Marguerit « croit que quand on est musicien, on veut jouer partout. Paris, banlieue, province, étranger… » avant d’ajouter qu’il n’imaginerait pas un concert parisien au détriment des concerts en banlieue « ou alors c’est un mauvais calcul. » Si le monde était plus peuplé d’Olivier Marguerit ou de JP Manova, la musique se porterait-elle mieux ? Réponse dans le prochain épisode. En attendant, pour une tapée d’agents ou producteurs, la banlieue est un no man’s land.

Producteur basique : « bon, les gars, on a une date parisienne, on peut s’éviter d’aller en banlieue, ça vous va ?
Artiste : Ouais, fonce »

 

Eh mec, t’as oublié 12 millions de personnes dans ton calcul. Ce sont généralement les mêmes qui ne vont faire que la tournée des grands-ducs : Paris, Nantes, Bordeaux, Toulouse, Montpellier, Nice, Lyon, Strasbourg en oubliant comme il faut la deuxième ou troisième ville des régions, alors que le public serait au rendez-vous. Tout finit dans un monde ultra-urbain et entre-soi qui est le premier à gueuler contre la consanguinité. Hypocrisie ? Allons donc. Des habitudes qui feront dire à Franck Michaut : « Est-ce vraiment impossible d’imaginer une date à Paris, une date à Massy, une date à Magny-le-Hongre, une date à Saint-Germain ? On est sur des bassins de population qui ne sont pas si poreux que ça. »

Vous êtes convaincus ?

Les lieux de diffusion en région Ile-de-France ont évidemment d’autres problèmes. Les musiques actuelles étant le cadet des soucis de la nouvelle présidente de région Valérie Pécresse (il faut bien qu’elle aille crier « un papa, une maman » dans la rue sinon imaginez où va la France) et de certains maires, les craintes de précarisation d’un milieu déjà pas bien riche sont réelles. La banlieue stigmatisée pour des fables électorales ne doit pourtant pas pâtir de sa proximité avec Paris pour faire entendre sa voix. En musique comme ailleurs. La solution pourrait se trouver d’abord dans nos consciences, de cesser de comparer Paris à sa couronne, de cesser de comparer l’incomparable, de se rappeler que taire, oublier ou sous-estimer une date en banlieue, c’est participer activement à l’invisibilisation d’un terreau (multi-)culturel magnifique, fier, drôle et trash. Tout ce qu’on aime.

Crédits photo en une : EMB © Kevin Lacroix
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2 commentaires

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Christophe 04.03.2018

Ui, très bon. Beau travail et belle analyse, qui me fait réfléchir sur mes propres pratiques .

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David? 19.01.2017

Très bon article, merci.

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