Aujourd’hui sort le 3e EP des Natas Loves You. Au retour d’un voyage en Inde, on a rencontré l’un des groupes sur lequel on met une pièce comme étant la claque indie du printemps. Le genre de moment révélateur d’un band qui passe un cap, sans pour autant prendre le melon. Fraîchement mis en ligne, le clip de Skip Stones est à retrouver dans cette interview.
Amusez-vous à ironiser en disant aux membres du groupe qu’ils sont en quelque sorte les nouveaux Placebo – le fait d’être un ancien groupe d’étudiants à composante internationale né à Luxembourg – et vous recevrez un regard mi-désabusé mi-inquiet. Avant un fou rire précédé d’un « Putain, ça va nous poursuivre cette comparaison les gars ». Plus sérieusement, c’est à l’écoute de Sirens Live au Nouveau Casino mi-janvier qu’on a ressenti un air des Kings of Convenience en train de digérer un Marvin Gaye guilleret. Puis, la comparaison « naturelle » fut les Whitest Boy Alive. On a oublié de leur demander, mais il y a fort à parier que le plus luxembourgeois des groupes parisiens a également écouté du Stevie Wonder.
La bio envoyée aux médias parle d’influences « à la croisée entre Metronomy et les Beatles« . Une double et large comparaison qui étonne autant qu’elle amuse les intéressés. Pour Virgile, « même si c’était le cas, on ne s’en rendrait pas compte ». Une chose est sûre, on est loin du premier groupe d’Alain, qui du haut de ses 16 ans s’appuyait sur des références rock à la Queens of the Stone Age. Au début de l’aventure, c’était plus « rock baroque psyché ». La formation initiale date de 2008 ; Joachim (guitariste) est arrivé un an plus tard.
S’ils n’ont plus de side projects suivis, les Natas s’autorisent toujours des impros avec leurs amis « luxos ». Deux albums concepts enregistrés en une journée ont déjà vu le jour. « On aide aussi nos potes Cristobal and the Sea [ils font ça] quand il manque par exemple un musicien pour une date à Paris », précise Virgile. Après avoir écouté les Anglais, on comprend mieux pourquoi ce dernier disait que la verdure environnant la ville de Luxembourg correspondait à leur état d’esprit, « pour les espèces de néo-babs que nous sommes ».
Le clip du second single, Skip Stones, a été tourné en Inde par le réalisateur Thibault Dumoulin. « En mode guérilla, avec une seule caméra et le réal (rires). C’est un mec super bien qu’on ne connaissait pas. Il y a eu tout de suite un feeling et on peut dire qu’il fait maintenant partie de la famille », se réjouit Alain. Le résultat se passe de commentaires.
Pas trop longue cette attente avant le début de la notoriété ? Jonas, le batteur finlandais lance un regard complice qui en dit long. « On a pensé que c’est le nom qui nous portait la poisse. Ma mère qui est super catholique m’a demandé à un moment si on pouvait changer le nom du groupe, confesse Alain amusé. C’était lors d’un repas. » Tous admettent que les galères ont soudé le groupe. Il paraît loin le temps « du concert à Mulhouse », ou la prestation acoustique dans « un bar à couscous près de Jaurès ».
Côté anecdote des débuts poussifs, le club des cinq s’accorde sur la plus phénoménale : un concert dans un festival de metal. « Au Nord du Luxembourg où il y a dix punks au mètre carré par village, avec nos pantalons un peu serrés à faire « houhou », on a passé tout le concert à se faire traiter de pédés », lâche Pierre-Hadrien. Tous sont hilares. Si une partie du groupe s’est marré sur le coup, Alain a eu du mal « à être professionnel, à ne pas montrer ses émotions quand tu te fais insulter. C’est pas évident de chanter. » Qu’il se rassure, pareille mésaventure ne devrait pas arriver au prochain Printemps de Bourges.
Entre la voix cristalline du lead (Alain), les chœurs du claviériste et chanteur (accessoirement bon guitariste acoustique) Pierre-Hadrien, et les chœurs du bassiste (Virgile), c’est une bel écho longuement travaillé qui nous fait aimer Natas Loves You. Une réussite née d’une rigueur de sportif de haut niveau ? « Ouais, il y a de ça. On travaille notre voix une heure par jour », assure Pierre-Hadrien. Jonas et Joachim bossent leur batterie et guitare pendant ce temps. Entre deux blagues. Parce que la déconne nourrit cette bande âgée de 23 et 24 ans. Exception faite d’Alain, 28 ans. Le papa ? « Non pas du tout, il est vu comme le gourou et le psy quand on se fait larguer », taquine Pierre-Hadrien. « Pour le côté papa, ce serait plus Virgile ».
Les cinq compères sont heureux comme des gamins de nous annoncer qu’ils joueront au Primavera. « J’ai toujours voulu y aller, mais n’ai pas trouvé le temps. Et là, j’y vais comme musicien. C’est un truc de taré », s’enorgueillit Virgile au moment de se quitter.
Crédit photo : Elliott Arndt
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