Les madeleines de Proust. Ces petits actes, odeurs, mélodies et sensations qui, brutalement, font resurgir de notre mémoire de lointains souvenirs, souvent chargés d’émotion. Dans cette série d’articles, nous proposons à quelques uns des artistes que nous soutenons le plus de rassembler ces morceaux qui constituent leurs madeleines de Proust et de nous raconter le souvenir qui y reste étroitement lié. Dans ce troisième épisode, Le Noiseur nous parle d’un morceau de NTM.
Le Noiseur :
« J’avais 15 ans. Je savourais mes premières cigarettes avec cette fille dont j’étais amoureux. On parlait de modernité, de mouvements, d’incertitudes. Je me demandais souvent qui je serai à 30 ans. J’écoutais beaucoup de musique. Du rap, tout le temps.
Cette musique me touchait plus qu’aucune autre, elle me fascinait. A la maison, il y avait un piano et j’avais un micro avec un enregistreur. J’ai commencé à composer mes premières musiques, à écrire puis à rapper. Je me souviens de ce moment, d’un sentiment vif, je sentais que quelque chose d’essentiel m’arrivait. J’étais en train de trouver une manière de m’exprimer, de me soulager, de me dépasser. « Tout n’est pas si facile » de NTM est le morceau qui me replonge dans cette époque. J’y retrouve l’odeur de cette fille que j’ai aimée, le bruit des nuits d’été dans les rues de Marseille, l’envie d’ailleurs, de découvrir, de s’affirmer. J’y vois ma mère qui prend le petit déjeuner avec moi avant d’aller au lycée, je sens dans son regard la douceur et l’affection. J’entends la fonction autoreverse de mon walkman qui s’enclenche, je devine mes rêves de musicien. Puis en fond, immuable, ce besoin de liberté. Intact.
Cette musique me ramènera toute ma vie à ces instants, ces moments charnières où l’on se construit, où beaucoup de choses se décident, l’air de rien. J’aime l’écouter avant de monter sur scène parce qu’elle me rappelle chaque fois, toujours avec la même force, pourquoi je suis là aujourd’hui, avec ce foutu trac et cette immense envie d’aller vers les autres avec mes chansons.
Et puis cette chance, que j’ai, de caresser cette vie dont je rêvais tant adolescent. »
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