MENU
En lecture PARTAGER L'ARTICLE

Legowelt : « Je suis un musicien, pas un obèse qui fume son cigare assis derrière un bureau »

Dans le genre cosmique, le Hollandais Danny Wolfers n’est pas le dernier. Roi du disco-saturnien et geek ultime, il est à la fois freak et prophète (cf profreak). Il rend depuis quinze ans la prise de LSD complètement inutile avec ses meilleurs amis les synthés. D’ailleurs, il a composé un album en hommage à l’un de ses synthés (oui, comme vous écririez une lettre d’amour). On lui a posé quelques questions.

Revenons deux ans en arrière, après six ans d’activité, tu stoppais ton label Strange Life. Qu’est ce qui n’a pas marché ?

Je n’avais juste pas envie de diriger un label. Ça prend trop de temps et j’en avais marre de tout le côté business. Je suis un musicien, pas un obèse qui fume son cigare assis derrière un bureau… Ahhh, trop de choses dans ma tête, les artistes qui se plaignaient, etc. Au début je ne voulais pas vraiment démarrer ce label, c’est un peu arrivé par accident. En 2004, j’ai fait des CDs de musiques super bizarres pour des potes et, une semaine après, c’est apparu sur Discogs. Et très vite, les gens en ont demandé plus. Ils étaient accros à ces sons comme à du crack. Au début, je ne mettais que ma musique sur les CDs mais par la suite, les gens ont commencé à m’envoyer la leur et j’en ai sorti quelques unes. Ça a été aussi rapide qu’une incontrôlable boule de neige qui descend une colline.

Qu’est-ce que ton album « The Paranormal Soul » a changé pour toi ? Un nouveau public ?

Je pense oui. Mais dans un sens, chacune de mes sorties a eu cet effet. Celle-ci un peu plus puisque c’était une « grosse » sortie pour Clone [label de Rotterdam qui a déjà sorti les disques de Drexciya, Dopplereffekt, Unit Moebius, Roman Flügel, ndlr] où ils ont vendu un max d’exemplaires.

On entend souvent que tu es l’un des « pionniers de la house en Europe » mais on commence tout juste à te considérer comme tel, non ? J’ai peut-être tort.

Tu pourrais avoir tort, ou le percevoir différemment. Plusieurs raisons : il y a une nouvelle jeune génération qui écoute ma musique. La musique électronique a bien plus de reconnaissance aujourd’hui. Et quand tu es dans la musique aussi longtemps que je le suis, tu deviens une sorte de culte pour certaines personnes.

Présente-moi ton nouvel album « Crystal Cult 2080 ».

Mon album est une collection de chansons colorées. Beaucoup de sons chauds, brumeux, saturés afin de plonger les auditeurs dans l’harmonie et la fantaisie. L’éventail musical de mon album est assez large, de la techno hi-nrj kung-fu à de sensuels contes de fées pour elfes à la flûte… Tous liés entre eux par de l’ancienne magie d’alchimistes réputés.

C’est un hommage à ton synthé, n’est-ce pas ?

Il est intimement lié au Roland JV2080 qui y est pour beaucoup dans la production du disque. J’aime ce synthé parce qu’il sonne différemment de ceux qui sont en vogue en ce moment. Tout le monde veut utiliser ou utilise des synthés analogiques ces jours-ci. Mais c’en est devenu tiède et chiant. Un synthé digital du milieu des années 90, comme le JV2080, a son pesant de capacités de montage, de vitesse, de profondeur.

C’est de la weed sur ta pochette d’album ?

Non, c’est du bambou. Mais maintenant que tu le dis, ça y ressemble plus.

Quel est ton rôle sur Terre ?

Pour ce sujet, je vais citer Kurt Vonneguts [1922-2007, écrivain américain de science-fiction et de romans satiriques, source – ndlr] : « Les arts sont une façon très humaine de rendre la vie plus supportable. Pratiquer un art, qu’importe si on est doué ou non, est un moyen de faire grandir son âme ». Ça compte aussi lorsqu’on écoute de la musique, selon moi.

Tu es un fan de disco depuis toujours ?

Bien sûr, j’ai toujours aimé le disco. Plus trop ces derniers temps, j’ai un peu saturé… Quand tu écoutes beaucoup d’autres genres musicaux, le disco a un goût très surfait, cheesy. Mais il y a des disques de disco géniaux.

Si tu créais ton propre festival, qui inviterais-tu ?

Probablement aucun artiste de musique électronique du tout. J’inviterais des clowns, des groupes de black metal, ou ces gars de Las Vegas avec leurs tigres blancs. Un magicien aussi… Ou un sorcier.

Quelle est la plus belle musique que tu ait jamais entendue ?

La musique éthiopienne, dans tous ses différents sous-genres, fait partie des plus beaux styles musicaux de la Terre. C’est très mystique, unique et ne sonne comme rien de naturel. Comme si cela venait d’un ancien temps perdu et oublié de l’Homme.

Quelle est celle que tu es sûr de ne jamais écouter ?

De la folk allemande ou tout ce qui se rapproche des chants tyroliens ou qui implique de s’habiller avec une lederhosen [culotte courte traditionnelle de Bavière – exemple, ndlr]. Je suis persuadé que l’Homme ne s’est jamais rabaissé à ce point culturellement. Et grossièrement, toute la pop moderne. Je ne connais pas grand chose de ces artistes à part que leur musique est horrible.

Le plus beau son que notre magnifique nature a composé ?

Le son d’une tempête de neige le soir. Les flocons de neige font wooowowowooooshshsosooooooo, le vent fait vibrer les arbres et tout se mélange avec le craquement du bois des vieilles maisons. Mais, il y a peut-être de plus beaux sons dans le désert. Le vent léger, le déplacement des dunes et des tumbleweeds [ces mottes d’herbes sèches comme dans les westerns – exemple, ndlr], etc. Tous ces bruits qui s’évaporent dans l’air chaud du désert.

Qu’est ce qui t’effraie le plus ?

La stupidité humaine. Elle consiste en un égocentrisme, des idées préconçues et des mauvais jugements.

On a vu le reportage de Vice sur Guy Tavares [ici, à voir !], le boss du label Bunker à La Haye, sur lequel tu as sorti pas mal de maxis. Une vraie légende sur la scène musicale locale. Cette vidéo reflète-t-elle vraiment ce qui se passe dans ce fameux club Dystopia ?

Ouais, ça reflète vraiment la réalité. Et encore, le reportage arrondit un peu les angles et ne montre pas tout… Sinon, Vice aurait des problèmes. Il y a toujours des teufs au Dystopia, avec ses intenses stroboscopes, ses tarés, ses substances psychoactives gratuites et ses catacombes sombres et humides.

Tu sors souvent là-bas ?

La dernière fois que j’y suis allé, je suis resté devant les strobes pendant 20 minutes mais c’était trop intense. Tu as vu La chasse avec Al Pacino ? Un grand film [bande-annonce, ndlr]. Tu vois l’ambiance de la scène où ils rentrent dans le club ? C’est ce que Guy veut créer avec les substances et la musique, qui sont toutes les deux à la fois extrêmes et acides.

Partager cet article
0 commentaire

0 commentaire

Soyez le premier à commenter cet article
Chargement...
Votre commentaire est en cours de modération
Merci
Une erreur est survenue lors de l'envoi de votre commentaire
Sourdoreille : la playlist ultime
Toutes les playlists

0:00
0:00
REVENIR
EN HAUT