Dans un rapport paru dans la revue Royal Society Open Science, des chercheurs de l’Université de Californie à Irvine ont analysé 500 000 chansons sorties au Royaume-Uni entre 1985 et 2015 et les ont catégorisées en fonction de l’émotion qu’elles procuraient. Et le résultat n’est pas joyeux.
D’après cette recherche, la musique pop en 2015 était 20% moins joyeuse que celle de 1985. En analysant les paroles et les caractéristiques acoustiques (voix, timbre, tonalité, humeur, style musical, etc.) de plusieurs centaines de milliers de morceaux, le constat est sans appel et ce n’est pas Adele qui va dire le contraire :
« Le bonheur baisse indéniablement, tandis que la tristesse, l’isolement et la mélancolie augmente. » Natalia L Komarova, co-auteure de la recherche
Mais ne sortez pas votre corde tout de suite. Les chercheurs soulignent que cette diminution progressive de l’indice moyen de « bonheur » ne signifie pas que toutes les chansons en 1985 étaient heureuses et que toutes les chansons en 2015 étaient tristes. Il s’agit simplement d’une moyenne relevée dans les propriétés acoustiques de la musique. La recherche souligne que la musique se concentre désormais davantage sur soi-même et moins sur la « camaraderie et le contact social » qu’auparavant ; avec une augmentation des paroles sur « la solitude, l’isolement social et la psychopathologie ». Xanax et joie de vivre.
Pour citer les tops et les flops de l’étude, les chansons que les chercheurs ont trouvé avec un « indice de bonheur élevé » ont été publiées en 1985 avec « Glory Days » de Bruce Springsteen, « Freedom » de Wham !, et « Would I Lie to You? » d’Eurythmics. Sur le côté inférieur de l’indice de bonheur, l’année de la déprime ultime était en 2014 avec « Stay With Me » de Sam Smith (inévitablement), « Unmissable » par Gorgon City, et « Whispers » par Passenger.
Les auditeurs, cependant, ne suivent pas nécessairement la tendance des artistes : « Le public semble préférer des chansons plus heureuses, même si de plus en plus de chansons mélancoliques sortent chaque année », indique l’étude. Mais au-delà de la dépression artistique mondiale, « les chansons deviennent plus « dansantes » et plus « festives » ; car même si l’ambiance générale devient de moins en moins rose, les gens semblent vouloir tout oublier et danser. » Un comportement assez schizophrénique en soi, mais bien connu et pratiqué. En grossissant un peu les traits et de manière générale, les gens vivent de moins en moins bien mais attendent avec impatience le week-end pour pouvoir se déhancher dans des boîtes de nuits surpeuplées sur des chansons ultra édulcorées, boire des vodka-pommes à 15 balles et se réjouir d’une gueule de bois qui anéantira leur journée du lendemain avant de retourner bosser le lundi en répétant la boucle. Tu m’étonnes que la musique soit moins joyeuse qu’il y a 30 ans.
De notre côté, plutôt que de se forcer à écouter Pharrell Williams pour se persuader qu’on est heureux de manière lobotomisante, on vous propose de suivre la tendance telle qu’énoncée par les scientifiques : à savoir danser sur des morceaux taillés pour la fête, mais également sombres et légèrement sociopathes. Bienvenue en 2018.
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