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La bio de Claude Debussy mais en mieux

Une vie de bohème et une oeuvre éternelle donnent à Debussy, encore aujourd’hui, les clés de l’histoire de la musique contemporaine. De ses rencontres avec Verdi et Stravinski en passant par Satie, Mallarmé et Camille Claudel, plongeons-nous dans l’histoire mieux racontée – mais moins précise qu’ailleurs – de ce compositeur qui nous filera toujours les poils en l’air.

Claude Achille Debussy nous a fait le cadeau de sa venue par dos de cigogne le 22 août 1862 à Saint-Germain-en-Laye. Le fait qu’il soit mort 56 ans plus tard à 20 km de là à Paris ne fait selon vous pas de lui un grand voyageur ? Vous avez entièrement tort. Et ça ne lui a pas empêché de tenir le rôle d’un des musiciens les plus importants de tous les temps. Et sans postuler.

Naître en 1862 signifie, en Europe occidentale, que vous allez en baver de la guerre. La porcelaine n’étant pas le truc le plus malin à exercer quand les obus traversent les murs, c’est pourtant l’activité qu’ont choisi les parents du petit Claude. Dès 1870, il se réfugie chez sa tante qui lui prend des leçons de musique avec un Italien, Jean Cerutti. De son côté, le père de Claude rejoint la Commune en tant que capitaine dans la Garde Nationale. La suite, on la connaît, ce grand pacifiste de Thiers rétame avec toute la poésie qu’on lui connaît la Commune de Paris, et papa est condamné à quatre ans de prison. Il n’en fera qu’une mais sera privé de droits civils.

debussy

« Eh falut les filles »

Selon ce bon vieux Charles de Sivry, Claude est confié à Antoinette Mauté de Fleurville, élève d’un certain Chopin et belle-mère d’un dénommée Verlaine. Grâce à ses conseils, il entre au Conservatoire de Paris en 1872. Piano, solfège, Claude se révèle un élève doué mais sans plus. Personne ne parie sur une carrière qui claque. « Ouais, j’sais pas comment dire… mais j’le sens pas » entendait-on à l’époque.

Dès 1879, Debussy  montre son amour pour Alfred de Musset dont il illustre Madrid et Ballade à la lune par ses premières touches de piano. L’année qui suit, après avoir bourlingué entre Arcachon et Florence – tranquille – il compose sa première oeuvre pour piano et un trio pour piano.

Puis, retour à Paname. Le pianiste s’inscrit dans la classe de compo d’Ernest Guiraud et accompagne le cours de chant de Victorine Moreau-Sainti. C’est là qu’il rencontre Marie Vasnier, pour qui il roucoule sur des poèmes de Théophile Gautier, Leconte de Lisle et Banville. Coquin.

Moscou, Vienne, Rome, Claude Debussy voyage sans arrêt. Son séjour romain durera plus longtemps. Après avoir échoué à choper le Prix de Rome pour sa cantate Le Gladiateur, il commence à doucement s’énerver contre l’académie, mais réussit quand même à obtenir une bourse pour une résidence à la Villa Medicis. Le bel canto le saoule complètement, il a un mal du pays du feu de dieu, et même sa rencontre avec Verdi et Litsz lui en touchera une sans bouger l’autre. C’est le Debuspleen, comme je l’appelle.

On repart à zéro, à Paris, là où tout a commencé. Et avec Paris, l’amour. Sa relation avec Gabrielle Dupont, aka « Gaby aux yeux verts » le met dans tous ses états, tout comme sa relation avec Camille Claudel. Ouais vous aussi, ça vous fait halluciner d’avoir autant de potins people au XIXème siècle. Pendant presque dix ans ans, le 8ème arrondissement sera le théâtre de leur bohème et leurs ébats. Il y fréquente les milieux littéraires et artistiques, rencontre les poètes symbolistes, et passe des soirées à picoler jusqu’à plus soif avec Paul Dukas, Robert Godet, et Raymond Bonheur. Il compose, lors de cette douce période, les Cinq poèmes de Baudelaire et la Fantaisie pour piano et orchestre.

Aussi, lors de l’Exposition Universelle de 1889, il se passionne pour les gamelans de Java, qui est en gros un ensemble instrumental essentiellement constitué de percussions. Il travaille pendant deux années à Rodrigue et Chimène, un opéra sur un livret de Catulle Mendès, d’après Le Cid.

Il faudra attendre 1890 pour que le boulot de notre Claudio national ne commence à être reconnu, avec sa Suite bergamasque pour piano. C’est de là qu’est notamment tiré son Clair de Lune. Mais quelques années plus tard, la première de l’oeuvre jouée à Paris est mal exécutée et la critique le pourrit sur l’autel publique. Dans le reste de l’Europe, la pièce marche bien mieux. Ses problèmes financiers se tarissent, le moral est bon, le cap est tenu, mais le compositeur n’a pas fini de faire chier le monde de la critique. Avec l’opéra Pelléas et Mélisande, qu’il travaille depuis déjà un bail, entre poésie et musique, ça ne va pas louper. Problèmes de préparation, changements de dernière minute d’interprète lors de la première, tempo lent, les haters vont et viennent. Mais si Debussy n’a pas eu la chance inouïe de connaître Twitter et Hanouna, il ne lui aura pas été étranger qu’il vaut mieux un bad buzz que pas d’buzz. L’oeuvre est jouée dans le monde entier. On s’arrache l’artiste.

https://www.youtube.com/watch?v=xAKeiyjjTKk

Debussy va encore plus loin que les romantiques. Il fait la nique au classicisme à tout prix. Et ce même si l’on dira de lui que sa rigueur feront de lui finalement un compositeur relativement classique. Musiques orientales, asiatiques, mythiques, ses harmonies prévoiront le jazz, le minimalisme, la musique contemporaine. Fin des années 1890, il rencontre ce sacré poète Mallarmé qui lui supplie (source incertaine venant de nous) de participer à un projet de théâtre autour du poème L’Après-midi d’un faune. Et là, coup double il rencontre Erik Satie, et publie ses douces mélopées.

Le 19 octobre 1899, Debussy rompt avec Gabrielle Dupont pour épouser Marie-Rosalie dite Lilly Texier. Un premier mariage à 37 ans, avec Satie comme témoin. Rencontre au sommet. Début des années 1900, à Bichain, le hameau de Villeneuve-la-Guyard (Yonne) dans lequel ils batifolent dans les règles de leur contrat de mariage, Claude Debussy y compose la plus grande partie de La Mer. Vous trouvez que cette histoire sent bon la lavande et la brise de printemps. Pas du tout, Emma Bardac débarque dans la vie de Debussy quelques années après le mariage. Ce dernier laisse son épouse sur le bas côté, et sans gilet jaune. Celle-ci tente alors de se suicider d’une balle dans la poitrine. Mais Lilly survit, et le scandale gronde autour de ce goujat. Patriarchie oblige, Claude gère le divorce tranquillou et se marie avec la cantatrice Emma. A propos de tout ce remue-ménage dans la vie privée du compositeur, Paul Léautaud dira que la pièce d’Henry Bataille, La Femme nue, serait inspirée de ce fait divers.

monsieur croche

Le 30 octobre 1905, Emma et Claude Debussy ont une fille, qu’on surnomme Chouchou. Mais pour avoir un peu plus de maille et que sa famille vive mieux, Debussy a de nouvelles flèches à son arc. Il devient critique musical sous le pseudo « Monsieur Croche », collabore sur la création d’un ballet, et se fait pote avec un très jeune loup nommé Igor Stravinski. Le compositeur est alors soit admiré soit haï, mais suscite de la curiosité partout où il passe. Son premier biographe et ami Louis Laloy publiera l’ouvrage Debussy en 1907.

 

On touche à la fin de la vie de l’artiste. En 1910, on détecte chez lui un cancer du rectum. A partir de là, sa santé tombe rapidement. Sa vie d’ermite commence. Même s’il continue à bosser sur ses œuvres les dernières années de sa vie, il s’éteint finalement en 1918, dans un temps de guerre, comme il a commencé sa vie.

Mais qu’importe, Debussy est éternel, putain.

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