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Juliette Armanet, fragments d’un discours amoureux

Dans la catégorie toujours bien pratique de la « nouvelle chanson française », Juliette Armanet a sorti en avril dernier « Petite amie » un premier album au romantisme et à la mélancolie assumés qui aurait pu facilement basculer dans la mièvrerie si la demoiselle n’avait pas eu le bon goût de savoir écrire des chansons. Le résultat est un petit bonbon pop d’une efficacité redoutable, à déguster tout l’été.

Mille filiations ont déjà été prêtées à Juliette Armanet. Pas sans raison d’ailleurs. Oui, elle pourrait très bien être l’héritière de Véronique Sanson, la cousine de William Sheller ou la fille cachée d’Alain Souchon et Laurent Voulzy. Si on peut se permettre (et on va carrément se permettre), elle ferait aussi une très chouette petite sœur de Jeanne Cherhal, avec qui elle partage, outre le piano en bandoulière, une voix claire et pénétrante. Et tiens, sans lui avoir directement posé la question, on l’imagine bien aussi écouter Barbara.

Pour autant, les textes de Juliette Armanet évoquent plus l’amour jeune voire adolescent que la gravité et la noirceur de certains de ses illustres parrains. Juliette, ce serait un peu Vic de La Boum en vacances à l’hôtel de la plage. Des sentiments en pagaille et de la pagaille dans les sentiments, l’intensité légère de l’amour au premier degré, la candeur de croire au pour toujours. Simple. Direct.

Chez Juliette Armanet, jeune auteure-compositrice de 33 ans, le sentiment amoureux ne se noie pas (encore ?) dans un quotidien qui tâche. On se regarde dans les yeux au coucher du soleil. On se manque atrocement. Surtout quand il pleut. D’ailleurs souvent, quand on est seul, il pleut. De ces sentiments universels, de ces moments ordinaires qu’on entend plus volontiers en anglais, parce qu’il n’y a qu’en anglais, paraît-il, que tout passe, tout sonne, tout groove. Sauf que là, sans complexe mais sans prétention non plus, Juliette Armanet fait parler le français, et ça marche. Elle déroule en douceur des mots intimes et percutants, distille un petit souffle de poésie sur tout ça et ça y est, avec ce qui pourrait passer pour trois fois rien, on est ému, on se prend au jeu, on voudrait soudain danser le slow, avoir 15 ans et en l’espace d’un été tomber amoureux, avoir le cœur brisé, et recommencer à la rentrée.

Ce tour de force d’être romantique mais pas gnan-gnan, de la sobriété sans la platitude, du spleen sans le pathos, Juliette Armanet le réussit haut la main. Très haut même. Et des deux mains, car au bout des doigts de Juliette, il y a un piano. Tels les ciseaux d’Edward aux Mains d’Argent, il semble être le prolongement naturel de son corps, tant il sublime ses textes et épouse sa voix. Impossible de lui imaginer meilleur compagnon, aussi intemporel, moderne au-delà des modes, classique et classe.

Musicalement aussi, Juliette Armanet ose tout, y compris un son résolument populaire et des arrangements qui fleurent bon les années 70. Des mélodies tellement évidentes qu’on se demande bien pourquoi personne ne les a composées avant, du bon vieux disco bien de chez nous aussi, tout ça réchauffe nos petits cœurs un peu meurtris par des paroles quand même pas très gaies, on va pas se mentir. On s’attend à voir Sheila débarquer, short en satin sur les fesses, au refrain de « Un samedi soir dans l’histoire ». « Star triste » n’aurait pas dépareillé dans Starmania. « Carte postale » serait si jolie au générique d’un Truffaut. Comme on dit quand on est un peu con, on est sur de la variété « mais de qualité ».

Et parce que justement, elle n’a pas peur de passer aussi bien dans une playlist France Inter que sur TF1 dans une émission de Nikos Aliagas, parce qu’elle ne semble pas chercher à être le phénomène du moment mais simplement à chanter ce qu’elle a dans le ventre, Juliette Armanet est en train de casser très légitimement la baraque. On la voit bien aller loin, tout en restant toute proche.

On est à ça de lancer le hashtag #JesuisJuliette mais après consultation du comité de rédaction on se dit que c’est peut-être un peu too much. Moins que « Juliette Armanet, on va l’aimer sous une étoile ou sur un oreiller », titre original de cet article, mais lourdingue quand même.

Juliette Armanet fera comme il se doit sa petite tournée des festivals d’été, l’occasion rêvée de lui montrer tout votre love et lui faire plein de cœurs avec les mains.

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