Après neuf ans d’absence musicale, Julien Ribot se rappelle à notre bon souvenir avec ce nouvel album à l’envergure impressionnante, futur disque culte sans doute. On vous explique tout ça.
Disons-le d’emblée : la France n’a pas à rougir de la qualité de ses musiciens ! En revanche, ceux qui devraient rougir de honte sont ceux qui font mine d’ignorer tous ces talents en multipliant unes, émissions et playlists sur des musiciens déjà très soutenus par tout ce que la France compte de médias influents.
Si ceux qui devraient rougir étaient à la hauteur de leur rôle, s’ils étaient moins dans les rouages de réseaux, ils auraient alors davantage mis en lumière le nouvel album de Julien Ribot “Do You Feel 9 ?” accompagné d’un article expliquant le caractère proprement génial de ce disque.
Je vais donc tenter, modestement, de m’y employer.
Après neuf ans d’absence en tant que musicien, Julien Ribot nous revient avec un concept album de neuf chansons. Mais durant ces années, il n’était pas au chômage : en plus d’être musicien, Ribot est un plasticien assez bien implanté qui a exposé et travaillé pour la Villa Médicis, les Nuits Blanches ou le MAMAC. Il a d’ailleurs réalisé la pochette de son disque et le clip à l’imagination folle de Do You feel 9 ?
Ce nouvel album nous raconte le voyage initiatique d’un personnage hermaphrodite se donnant naissance à lui-même : Néon Juju. Je ne voudrais pas divulgacher mais sachez qu’il terminera sa vie en inventant un nouveau langage, puis se dispersera complètement dans l’univers. Le ton est donné : Ribot a le concept joyeux !
Musicalement parlant, c’est un long voyage, une épopée musicale irradiée d’un psychédélisme doux à la luminosité guillerette. Une épopée dont la densité n’a d’égal que la variété et la cohérence dans la progression. Avec Do you feel 9 ?, morceau épique et flamboyant, l’entrée en matière est pianistique puis glisse vers du MGMT un peu hip-hop synthétique. Nous partons ensuite avec How You Know Wonderland ! au pays des rêves et du flower power avec une ballade, mélodie naïve au piano, ponctuée de chœurs aériens et enfantins assurés, excusez du peu, par Olivier Marguerit, Barbara Carlotti et Orouni. Il y a un petit quelque chose de Polyphonic Spree. Puis vient l’enchanteresse We Obi Diva et son tonique basse/ batterie /piano qui continue de nous transporter. L’esprit, plus contemporain, évoque un peu le Bowie de la fin, un peu MGMT aussi. Se mêlent ainsi chansons épiques et flamboyantes (Do You Feel 9 ?, Le rayon vert), chansons majestueuses et dramatiques (Time Is A Fruit) et pure pop sautillante, joyeuse, très 60’s (Idiorrrythmie). Le voyage qui aura traversé par deux fois les beatlesiennes Annabelle (I et II) s’achève par une longue fresque (Néon Juju).
Servi par un piano parfois lyrique, des sons organiques et synthétiques, et serti d’arrangements précis de cuivre et de flûte (Le rayon vert, Néon Juju), Do you feel 9 ? est un disque à l’imagination débordante. Lorsque j’écris “serti”, il ne faudrait pas comprendre afféterie ; ni grandiloquence ou emphase à la place de flamboyance. En effet, les arrangements comme la production ne sont pas ici de l’ordre de l’ornement, de l’enluminure ou du pour « faire joli ». Ils participent, à l’instar de la structure des morceaux, à la dramaturgie de la chanson et de l’ensemble du disque.
Si la qualité d’écriture impressionne, le travail de production et d’arrangement, lui, fascine, car il ne cède à aucun systématisme et n’est jamais démonstratif et paresseux ! Pour une fois que psychédélisme ne rime pas avec musique aux kilomètres et démultiplication d’effets, pour une fois qu’ambition n’est pas synonyme de pose prétentieuse et que les arrangements signifient : se priver d’un tel plaisir serait pure folie !
Et puis un album joyeux quoi ! Oui ! Lorsque Julien Ribot, en bon (en)chanteur, compose un disque ambitieux et complexe, il reste joyeux, léger et sans mauvaise prétention. L’auditeur peut s’y rapporter d’une façon autant intuitive que savante et analytique. Immédiateté saisissante et multiples strates de lecture : l’une comme l’autre restent, au fil des écoutes, d’inépuisables source de joie.
Ces neuf chansons convient David Bowie, Polyphonic Spree, les Beach Boys, MGMT (Congratulations avec Sonic Boom) et les Beatles à la même rêverie.
Lorsque ce disque sera culte vous pourrez toujours vous dire que vous l’avez écouté et peut-être apprécié et compris dès sa sortie, chic !
Jusque-là d’enchanteurs nous ne connaissions que Merlin, voici désormais Julien !
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