MENU
En lecture PARTAGER L'ARTICLE

Il restera toujours Mina Tindle

Malgré l’éloignement de rigueur, difficile de nous passer des discussions avec nos artistes de cœur. L’artiste Mina Tindle a notamment pris le temps d’une conversation à l’occasion de la sortie de son nouveau disque, Sister. La compositrice, née à Paris en 1983, est passée par des études de lettres avant de se diriger vers la musique, avec pour inspiration Cat Power et pour mentor JP Nataf. Son premier album Taranta en 2012 a retourné le cœur de notre équipe. Depuis, il nous est impossible de nous passer d’elle.

Give A Little Love

Souvenirs de tournées

« Quand l’album Parades est sorti en 2014, j’ai fait quand même plus de 100 concerts. Et ça a enchaîné, parce que lors de la tournée d’avant, j’en avais fait 180… Après, je n’adore pas la scène, ça me met dans un état… J’ai un rapport assez particulier. Je ne pourrai pas dire que je le déteste du tout mais c’est compliqué. C’est pas quelque chose que je vis très sereinement. J’ai pas ce truc de bête de scène qui fait que je m’en fous « the show must go on » vraiment pas, je suis beaucoup trop lucide. Je suis quand même partie en tournée avec le groupe de mon mari, The National. Pendant un an, je les ai rejoints partout dans le monde à chanter avec eux. J’ai découvert ce que c’était de chanter sans aucune pression. Sinon, à Berlin, je sais pas si tu as entendu parler du festival People qui est une sorte d’expérience complètement utopique où, à la fin la deuxième édition, on était 180 artistes invités. On travaillait tous une semaine dans l’équivalent du Radio France de la RDA de l’époque qui s’appelle la Funkhaus, une sorte de lieu complètement magique et labyrinthique. Tu arrives et hop tu peux choper n’importe quel endroit pour répéter et rencontrer un autre artiste. Et à la fin de cette semaine de travail, on faisait un festival. »

Le dernier album de Mina Tindle, Sister, est sorti le 9 octobre 2020 sur le label 37d03d. Il mise sur une riche production musicale signée Thomas Bartlett – qui a produit Sufjan Stevens, Yoko Ono, St Vincent, Norah Jones entre autres – et donne plus de place aux textes féeriques et magiques de notre auteure.

Un nouvel album : Sister

« Chaque disque a été produit avec un nouveau réalisateur. Le premier c’était évidemment mon grand ami et mentor JP Nataf, que j’adorais depuis mon adolescence. Après avec Olivier Marguerit, c’était lui avec qui je tournais, c’était vraiment mon compagnon de cœur et d’équipage. Et puis pour Sister, j’ai commencé à collaborer avec Thomas Bartlett qui est un super musicien, et producteur américain. C’était très chouette, un peu comme le rêve de la petite frenchy, même si mes influences ont toujours été temps anglo-saxones. Très souvent, j’arrivais avec une démo déjà enregistrée, et en fait, lui il la rejouait tout de suite au piano. Il n’a même pas besoin de la réentendre une fois, ni jusqu’au bout. Il sait la jouer, il est un peu magique. Et pour le quatrième album, j’aimerais bien le faire avec quelqu’un d’autre aussi. D’ailleurs, ça serait super de faire ça avec une femme. Là ces disques, ils sont tous très produits mais effectivement peut-être que quand j’aurais appris à chanter à la perfection, à écrire des parfaites chansons, je n’aurais besoin de rien. Mais je serai toute seule à ce moment-là. Ça sera un peu triste. »

Mina Tindle est une grande lectrice et amoureuse de l’Italie. Ses deux passions se rencontrent dans les livres d’Italo Calvino. En 1986, l’auteur sort le livre Sous le Soleil Jaguar. Il avait projeté d’écrire sur les 5 sens mais n’a eu le temps de composer que trois nouvelles perchées, autour de l’odeur, le goût et l’ouïe. Mina Tindle a trouvé l’inspiration chez deux d’entre elles pour ses chansons.

Belle Pénitence

Les (presque) cinq sens d’Italo Calvino

« Celle qui s’appelle « Indian Summer » fait référence à un couple qui n’a plus du tout de libido, et qui à travers un voyage découverte de la gastronomie au Mexique, commence à redévelopper, réveiller leur corps. Ça devient une sorte d’imaginaire cannibale. Il va imaginer qu’on peut posséder l’autre en le dévorant. Il y a quelque chose d’hyper beau. L’autre c’est la chanson qui s’appelle « Louis » et c’est sur un roi qui perd l’amour. Parce qu’il devient tellement paranoïaque qu’on lui vole son pouvoir et son trône qu’il ne bouge plus de son château. Il passe sa vie à développer une ouïe extra-fine pour ne plus jamais bouger. Et puis j’avais une vraie sensation, à la fin du deuxième album, d’être complètement dissociée de mon corps, de mes sensations et de mes sens. J’avais comme une sorte de mantra, je me disais qu’il fallait que je revienne aux sens. D’où mon obsession pour ces nouvelles de Calvino. »

S’il y a bien une artiste qui donne le tournis à Mina Tindle, c’est la chanteuse Lhasa de Sela, disparue subitement en 2010 d’un cancer du sein. Méconnue et pourtant éternelle à ses yeux, elle continue de briller de sa voix grave.

L’influence Lhasa De Sela

« C’était l’artiste que j’ai le plus écoutée quand mon enfant est né, parce que je pense qu’il y a des fréquences de sa voix qui sont extrêmement chaudes et douces et que ça a marché. Elle venait de partout, Lhasa elle avait des origines mexicaines, canadiennes, elle a habité en France, elle a été Américaine. C’est une sorte de citoyenne du monde, comme ça et qui parle à tout le monde. Elle parle la musique du cœur. Elle est morte très jeune, elle n’a fait que 3 albums et le 4ème c’est un live. Et en même temps, c’est ce genre de voix qui a toujours eu l’air d’avoir 100 ans. Elle n’a jamais chanté comme une jeune fille, alors qu’en fait elle est morte en jeune femme. On a fait effectivement un tribute l’année dernière, en septembre, qu’on a joué lors d’un festival avec Feist, Mélissa Laveaux… J’ai eu envie de faire ça, ça a avait déjà été fait à la Philharmonie, un grand hommage, mais aussi dans le monde entier. Et on l’a jouée après, au Barbican à Londres, et à Kork. Il y avait une chanson que chantait tout le temps Feist, et l’entendre chanter ça, une chanson de 10 minutes, où Lhasa… Alors elle dit qu’elle va dans la mort… « I’m going in », une chanson sublime où elle explique qu’elle est entre ces deux mondes. Rien que d’en parler, j’ai déjà des frissons. On était tous en larmes à chaque fois qu’elle la chantait, parce qu’en plus Leslie la chante différemment mais avec la même force. »

Indian Summer

Les peintures ont été réalisées par Mina Tindle et accompagnent des morceaux de son disque Sister.

Photo en une : DR

Partager cet article
0 commentaire

0 commentaire

Soyez le premier à commenter cet article
Chargement...
Votre commentaire est en cours de modération
Merci
Une erreur est survenue lors de l'envoi de votre commentaire
Sourdoreille : la playlist ultime
Toutes les playlists

0:00
0:00
REVENIR
EN HAUT