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Hellfest, le métal au cœur du Vignoble nantais

Le plus grand festival métal en France se tient à Clisson, une petite ville de 6 000 habitants en Loire-Atlantique. Et ce n’est pas un hasard : Ben Barbaud, son fondateur, est un enfant du pays. Loin des crispations et du vandalisme des militants intégristes, la ville vit au rythme Hellfest plusieurs semaines dans l’année. Deuxième partie de notre interview d’Alexxx Rebecq, chargé de communication du festival.

La première partie de l’interview est disponible ici.

Quand le festival s’implante à Clisson, comment les habitants voient-il ça ?

Au début, on a parlé de concerts rock, pas de festival métal parce qu’on pensait que les gens allaient avoir peur. Le terme « rock » était plus approprié, notamment pour les démarches administratives. Il faut dire qu’à l’époque la programmation était plus extrême et plus underground, parce qu’à ce moment-là nous n’intéressions pas les grosses pointures. Alors, effectivement, quand les habitants de Clisson ont vu les festivaliers arriver, ça a posé quelques problèmes d’appréhension. Ils se demandaient si le public allait brûler les églises ou profaner les tombes. Très vite, des groupuscules sont montés au créneau. Ils ne parlaient même pas de festivaliers, mais de secte. Ils ont véhiculé l’idée que notre public allait nuire à l’image de la ville et au tourisme.

Bon, à côté de ça, beaucoup de Clissonnais étaient curieux. Certains sont venus au festival. Et puis, quand tu ramènes 10 000 personnes dans une ville de 6 000 habitants, ça fait un pic économique. Parmi les festivaliers, beaucoup sont des CSP ou CSP+ avec un pouvoir d’achat conséquent. Les commerçants et les pouvoirs publics se sont rendu compte que malgré les tatouages, les cheveux longs et les fringues noires, le public Hellfest est une clientèle très polie et respectueuse. Tout le monde à Clisson a commencé à s’approprier le projet, beaucoup d’associations se sont greffées à la dynamique. Aujourd’hui, des entreprises y invitent même leurs clients.

Les habitants de Clisson sont même très fiers du Hellfest…

Si on parle de Clisson au Japon, ce n’est pas grâce au château, mais au festival. Nous sommes un des plus gros festivals de France. Deux mois avant, tout le monde en parle dans la ville. Les Clissonnais se sont appropriés le projet.

Le fan de métal n’est pas nécessairement un jeune fauché, c’est aussi parfois un CSP+, cadre en entreprise. Le festival est-il devenu haut de gamme ?

Je ne sais pas si on peut employer ce mot. Nous avons fait une enquête : on se rend compte que venir à Hellfest, c’est un budget (il faut se déplacer, se loger, se nourrir). Les fans sont des passionnés qui ont tendance à acheter des produits sur place. Pour un festivalier lambda, un Hellfest peut coûter 600 à 800 €. Et je ne parle pas de la consommation de bière. Même si ce n’est pas celui où il y a le plus de monde, c’est le festival où l’on consomme le plus de bière.

Quelles retombées pour la région ?

Les retombées économiques sont colossales, outre le pic de consommation. Alors, sans doute qu’un concessionnaire se plaindra de ne pas vendre de voitures pendant le Hellfest. Leclerc est pris d’assaut dès le jeudi. Ils sont très fiers de travailler avec nous, mais le chiffre d’affaire n’explose pas pendant le festival, parce que les foyers évitent de faire leurs courses à ce moment-là. Le panier moyen du festivalier se construit surtout autour de la bière. Les rayons sont agencés différemment à cette période. Le magasin Leclerc est complètement habillé aux couleurs du festival. C’est très fort pour l’image du magasin. Il y a d’autres retombées en termes d’image : le château de Clisson organise des visites gratuites à cette occasion.

Situé au milieu des vignes, le site arrive à saturation. Quelles sont les perspectives pour le festival ?

On ne peut pas arracher les vignes. Il faudrait dédommager les viticulteurs. On n’a pas forcément les moyens de faire ça. Certains particuliers ont des terrains, mais refusent de les proposer au Hellfest pour des raisons personnelles. Notre projet n’est pas forcément de devenir un énorme festival. Avec le temps, nous allons essayer de nous agrandir un petit peu pour proposer de nouvelles choses, mais on arrive à la limite ce qu’on peut faire. Le but n’est pas de rassembler trop de monde au point que ça devienne désagréable.

Peu de subventions publiques, 1 % seulement pour 14 millions d’euros de chiffre d’affaires. C’est une exception dans le paysage des festivals en France. Vous pourriez faire sans. Alors pourquoi continuer à avoir des subventions ?

La plupart des festivals sont très subventionnés. Nous pourrions peut-être avoir plus de subventions, mais avec le risque qu’on nous demande de changer de direction artistique. Nous sommes toujours restés indépendants vis-à-vis de ça. Après, les subventions c’est aléatoire et les démarches administratives sont très lourdes. Notre fan base, c’est notre première retombée financière, par la vente de billets. C’est elle qui nous fait vivre. C’est aussi ce qui explique le prix du billet. On en tire une certaine fierté. C’est vrai ce que nous réalisons beaucoup de travaux, nous investissons beaucoup. C’est invisible pour les festivaliers, mais par exemple, pour des raisons de sécurité et d’infrastructure, nous avons enterré une ligne à haute tension qui traversait le festival. Cela nous a coûté 100 000 €. Tous les investissements forts dans le cadre de l’aménagement des infrastructures, c’est Hellfest productions qui les fait. Un peu plus de subventions pour ces investissements nous enlèverait une épine du pied.

Crédit photo : Gaël Mathieu

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