Alors que l’Angleterre regorge de groupes pop dont la musique déferle par-delà les mers et les océans, Embrace reste inconnu en dehors du Royaume-Uni. Mais tout s’explique.
Souvenir n°1 : Un disque dans une caisse de disques
L’album est bleu, on y voit un ponton et des mecs dessus, le groupe. Embrace, If You’ve Never Been. Ce disque sort d’une caisse pleine d’autres disques, ceux d’une radio étudiante bretonne dont nous faisons partie à l’époque. En le glissant dans le poste, on s’attend à un groupe pop anglais, un peu cliché, très léché, à une esthétique très britannique, à une musique entraînante, si possible à un tube, un truc qui reste dans le crâne.
L’écoute ne révèle pas tout ça. Oui, c’est un groupe pop anglais, mais c’est tout. Pas de tube, rien qui n’accroche vraiment l’oreille. C’est juste un groupe pop anglais, pas celui qu’il faut absolument écouter. Rien n’est plus décevant qu’une belle pochette d’album qui ne tient pas ses promesses. Les années passent, on oublie presque Embrace, on ne sait pas encore qu’on les retrouvera de manière inattendue.
Souvenir n°2 : Dans une école de Londres
Les écoliers anglais commencent la journée par une chanson. Dans ce quartier pavillonnaire de la banlieue de Londres, ce jour-là, un enseignant se met au piano et les élèves chantent les paroles que le vieux rétroprojecteur envoie au tableau. Ils sont nombreux, toute l’école est là. Chaque matin, ils recommencent, pas toujours avec la même chanson. C’est un beau rituel.
Plus tard dans la semaine, en allant faire un tour chez un vendeur d’ordinateurs et de lecteurs Mp3, la chanson des écoliers est en écoute dans tous les lecteurs. C’est écrit Nature’s Law, Embrace. Tiens donc. Comme la chanson est vraiment sympa, on cherche sur Internet, on essaie d’en savoir un peu plus sur ce groupe, manifestement assez connu ici.
Un ami commente l’écoute de Nature’s law d’un laconique : « On dirait du Coldplay. » Pas faux. C’était le single du moment en Angleterre, il était deuxième dans les bacs. L’album se classa même premier.
C’est là tout le paradoxe d’Embrace : trois de leurs cinq albums se sont placés en tête des ventes. Tous ont été dans les dix premiers en Angleterre. Malgré cela, le groupe s’exporte mal et reste largement méconnu en France. On pourrait crier à l’injustice et fonder une association de promotion de l’œuvre d’Embrace. Mais il faut se souvenir de la première écoute : c’est propre, mais trop sage.
Il y a indéniablement du savoir-faire, peut-être du talent, mais pas l’étincelle qui ferait la différence. On serait tenté de prédire qu’Embrace continuera à enregistrer des albums de manière tout à fait correcte et professionnelle. En revanche, on a abandonné l’espoir d’y dénicher une vraie perle. Ce n’est manifestement pas la destinée de tous les rockeurs. Rendons-nous à la triste évidence : à l’image du disque dans la caisse de disques, Embrace est un groupe parmi d’autres.
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