Si on a vu grandir rapidement la carrière de Nicolas Jaar et sa reconversion dans Darkside, on connaît beaucoup moins son collègue Dave Harrington. Le New-Yorkais, jeune bluesman local, vient du jazz quand Jaar vient de la musique électronique. Dans notre échange, on en apprend plus sur le rouquin imberbe qui insuffle un groove vintage à notre époque.
Un petit résumé de ta formation musicale ?
J’ai grandi en jouant principalement du jazz. En majeure partie avec ma contrebasse. La chance que j’ai eue a été de vivre à New-York où j’ai pu étudier avec de grands professeurs et d’incroyables musiciens dès mon plus jeune âge : Kelvyn Bell, Brad Jones, Daniel Bernard Roumain, JD Parran.
Brooklyn est-il un bon environnement pour les musiciens aujourd’hui ?
Je pense que Brooklyn est un excellent environnement pour les musiciens mais je ne suis pas objectif. Je suis un New-Yorkais depuis toujours et tous mes amis qui sont de grands musiciens habitent à Brooklyn. Donc, j’en déduis que c’est géant ici. C’est vraiment cool, les lieux de concerts accueillent des groupes très variés dans une même nuit. La scène est très éclectique et j’en tire le meilleur.
Quelques mot sur ton projet El Topo ?
El Topo est un groupe que j’ai mené à Brooklyn ces cinq ou six dernières années. Aujourd’hui, on bosse finalement sur notre premier LP. C’est un collectif à géométrie variable [les musiciens sont interchangeables – ndlr] constitué de mes meilleurs amis et de mes musiciens préférés. Un groupe avec – au moins – deux percussionnistes et plus s’il y a des gars motivés dans la rue. On joue beaucoup sur l’improvisation dans la veine d’un Miles Davis ou des Grateful Dead. On adore le côté massif des Velvet Underground et les approches drone de La Monte Young ou Earth. Les disques d’ECM Records des années 70 aussi… Tellement psychédéliques.
Tu n’as pas du tout la même formation que Nicolas Jaar. Tu penches plutôt vers quoi ?
Je suis passé par de nombreuses phases musicales donc c’est un peu compliqué de pointer dans une direction plutôt qu’une autre. Mais il y a forcément des artistes et des groupes vers lesquels je reviens souvent : Bill Frisell, John Zorn, David Torn, The Allman Brothers Band, Steely Dan, Sunn O. Ma plus importante influence fut probablement le club d’impro, jazz, experimental – hélas fermé aujourd’hui – nommé Tonic dans le Lower East Side [quartier de New-York – ndlr]. J’y allais presque tous les week-ends pendant plusieurs années et j’ai retenu pas mal de noms des petits génies qui y ont joué : Zorn, Sexmob, Michael Blake, MMW, Ikue Mori, Marc Ribot. C’était un lieu très spécial, stimulant la créativité et d’une ouverture musicale très rare.
Darkside est une forme moderne du blues ?
Le blues est si profondément incorporé dans les langages musicaux qui m’attirent – de la musique psychédélique au jazz à l’improvisation libre – que je pense qu’il y a une sorte de force gravitationnelle qui m’en rapproche dès que je prends la guitare. Je ne sais pas si je suis vraiment un « joueur de blues », mais il y a une si longue tradition et c’est une si forte influence de l’histoire de la guitare que je ne peux pas m’en empêcher. D’où sa présence dans Darkside.
Tu pensais à ton projet solo depuis longtemps ? On imagine que Darkside a été une espèce de levier ?
J’ai eu des tonnes de projets avec des autres musiciens et j’ai joué dans des groupes très différents. Pendant toutes ces années, j’ai composé quelques pièces par-ci, par-là, mais ce n’est que très récemment que j’ai ressenti l’envie d’essayer de mettre bout à bout des pièces pour imaginer une oeuvre cohérente sous mon propre nom. Nico [Nicolas Jaar] a été une bonne inspiration dans ce processus et un très bon guide pour mettre en forme cet EP. D’une certaine façon, oui, ce projet est définitivement quelque chose qui est sorti grâce à Darkside et la collaboration avec Nico sur tous les plans.
Sortie d’un premier EP solo nommé (simplement) « Before This There Was One Heart But A Thousand Thoughts ». Sortie le 19 mai sur Other People.
0 commentaire