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Bout du monde : l’année prochaine, on s’encanaille ?

Pour ses 18 ans, toujours à guichets fermés et négociant encore une fois une trêve avec les dieux de la pluie, le Bout du Monde nous a proposé comme à son habitude une programmation cohérente et sobre. Un peu trop peut-être ?

Lorsqu’on pense aux sites de festivals les plus emblématiques, on peut avoir en tête les Eurockéennes et leur presqu’île posée sur l’eau ou la Route du Rock au pied des remparts. À première vue, le site du Bout du Monde (Crozon – 29) n’est rien de plus que quelques champs nichés entre les pins. Et pourtant, c’est à chaque fois avec le même plaisir indescriptible qu’on le parcourt l’après-midi sous le soleil, perdu au milieu des familles et de la viande saoule, dans cette communion œcuménique typiquement bretonne, à quelques pas de la mer.

On cherche comme à chaque fois les évolutions subtiles mais toujours bienvenues que l’organisation nous a réservées. Pour cette année, on retiendra particulièrement les efforts sur la décoration, qui s’enrichit encore et commence à donner à l’ensemble une véritable identité.

Lorsqu’on met enfin le nez dans le programme c’est toujours la même douce angoisse : comment se trouver au bon endroit au bon moment, ne pas rater la perle rare qui se cache parmi tous ces noms pour certains si mystérieux ?

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Keny Arkana – © Nicolas Ollier

Au niveau des têtes d’affiche on citera de manière tout à fait partiale Keny Arkana et Chinese Man, qui auront réussi à faire sortir du camping les plus réfractaires. La première a su donner l’un des premiers coups de boules à une programmation un peu policée jusque là. Avec Chinese Man, on a eu le droit au set millimétré par excellence, maîtrisé jusqu’à son visuel léché. On les croirait presque quand ils nous disent pour la énième fois qu’on est le meilleur public de leur tournée.

Certains traumatismes de l’adolescence n’étant pas encore effacés, nous n’avons pas pu nous forcer à voir Tryo. Une écoute trop fréquente de RTL2 en voyage nous a interdit de nous taper UB40 à l’heure du 3ème apéro. Les échos de ces concerts semblaient plutôt bons, dans le côté reconstitution historique tout au moins.

Comme chaque année, il fallait chercher du côté des noms moins ou pas connus pour trouver les plus belles surprises. Petite liste non exhaustive.

Dans la catégorie l’union fait la force on citera Meute, fanfare électro analogique à l’efficacité redoutable dont on vous a déjà donné un aperçu ici, et le Gangbé Breizh Band, qui ont su fournir leur fix de bagad aux locaux tout en proposant un mélange cohérent de fusion jazz bénino-bretonne.

Parmi les curiosités on retrouve Super Parquet et leur look de hipsters auvergnats, qui trafiquent le son de leur banjo, cornemuse et autre viole de gambe (pardon, boîte à bourdon) jusqu’a en sortir un mélange hypnotique, porté par la voix posée de leur chanteur.

https://youtu.be/izxSnXsW3rc?t=1m10s

Pour les amateurs de mezcal bien tassé, on pouvait faire confiance à Xixa, dans la droite lignée de Calexico et de cette mouvance rock désertique en santiags qui fait toujours autant triper. Autre désert, autre lignée, le rock berbère de Bombino, un peu timide au début, a réussi à s’emballer sur le final.

Mais la vraie claque nous a été assénée par BCUC. S’il fallait aligner quelques mots-clés pour décrire le concept, on dirait hip-hop zoulou soul punk au message de paix brutale, rehaussé par un charisme collectif de dingue. Parce qu’il faut parfois savoir prêcher la non-violence à coup de tatanes dans les oreilles.

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BCUC – © Nicolas Ollier

Ce mélange de punch et de spontanéité c’est peut-être ce qui a manqué au reste de la programmation. On a bien apprécié les sets sobres de Tété, Gregory Porter ou Imany. Ils ont une place évidente dans ce festival et apportent parfois ces moments de communion qui participent aux fins d’après-midi si douces du Bout du Monde.

Mais lorsque la nuit tombe et qu’on cherche à s’encanailler, il faut parfois savoir être plus brut de décoffrage. On a senti tout au long du week-end ce besoin de sauter partout, à la moindre guitare un peu saturée ou beat un peu lourd. Ce besoin, aussi, d’être pris aux tripes par des voix rageuses ou tristes, par des sons qui tranchent dans le vif, qui forcent à lever le nez. Mais cette année on doit avouer qu’on est restés un peu sur notre faim.

Alors que le festival est pour la centième fois complet trois mois à l’avance et que la plupart des habitués viennent sans même regarder la programmation, continuez à inviter les têtes d’affiche qui nous fédèrent mais n’oubliez pas que, lorsque la nuit tombe, on est aussi là pour se prendre quelques claques dans la tronche. Merci mon petit Bout du Monde.

Photos : Nicolas Ollier.

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