Tremblez Bordelais venus en voiture, Parisiens peu prévoyants, amateurs de punk dans les parcs, chevelus fans de noise des fleurs dans les cheveux, clubbeurs aux verres polarisants et même habitués du Festival Baleapop, il pleut au Pays Basque. Mais la pluie, c’est un peu comme la page Facebook du bijoutier de Nice : ça permet de faire le tri et de garder les meilleurs éléments. This is a hommage to a nuage.
C’est un étrange et lointain souvenir que cette après-midi du dimanche, dernière journée de l’édition 2014 du festival Baleapop. Le duo israélien Red Axes finit son set en orbite et laisse la place au Moï Moï Band, conglomérat de talents issus de la maisonnette Moï Moï, collectif qui héberge le festival. Il fait 30°C à l’ombre et 50°C en ressenti de dernier jour de festival. La Bob’s Beer coule à flots et s’échappe des pores des peaux brunies des danseurs direction le soleil. Retour aux sources pour cet élixir qu’on dit venir directement de notre Dieu jaune.
« On est à l’abri. On est beaux en k way, on fait des ventriglisses et c’est vachement marrant. Le soleil c’est so 2014. Baleapluie » Post Facebook du 08 août.
Parc Ducontenia - Baleapop
« Le soleil, c’est so 2014. » Analyse : c’est même so nul tout court un festival uniquement avec du soleil. Cette phrase en apparence anodine ne l’est absolument pas. Nos meilleurs souvenirs de festivals restent nos plus beaux combats de catch dans la boue, des batailles en équipes séparées par des tranchées en plusieurs manches et autant de poules. Pour reprendre les mots de Mathieu Fonsny, co-programmateur du Dour Festival, en Belgique (et qui par conséquent a une histoire étroitement liée aux cumulonimbus) :
« J’ai remarqué que les éditions où il pleut sont bien meilleures que les éditions où il fait soleil (…). Tout le monde se fout dans la boue. Les bottes servent plutôt à faire levier pour lancer de la boue sur quelqu’un que d’être mises aux pieds. Les gens sont plus fous. Je déconne, mais c’est vrai, quelque part, quand il fait chaud, les gens sont fatigués. » Interview complète ici.
Saint-Jean-de-Luz a craché tout ce qu’il pouvait en l’espace de 24h. Pauvres organisateurs nous disions-nous qui, dans les moyens limités mis a leurs dispositions dans un espace vert boueux, n’ont pas réussi à inverser l’humide tendance malgré des appels répétés au Dieu Moï Moï, aka le Saint-Protecteur des âmes hédonistes.
Joujou - Bones & Glory - Alain Cazenave
Des averses rageuses à l’image des musiques défendues par l’équipe au nez fin et aux combats utiles, loin-loin-loin des clichés ronflants sur une jeunesse sud-atlantique blindée. La tempête noise de Jessica93, le crachin instrospectif de Camera, la déferlante électro-acoustique Odei et sa maison mère Moï Moï Band ont été tant de réponses constructives à cette pluie qu’on caractérise à tort trop souvent de ‘bête, humide et méchante’.
Une mention spéciale à Joujou, notre vraie découverte du festival. Un duo basse-batterie-voix, un post-punk aux textes poignants et une frontwoman à la fois comique et puissante qui a pour nous bien dépeint l’ambiance du festival. Entre deux danses, elle saute dans la boue, ses peintures de guerre sur le visage. Rien ne pouvait plus nous faire tomber amoureux.
Baleabeach © Flora Fettah
Pas d’ouragan sans accalmies et si on parle toujours plus des moments éprouvants, Baleapop (en communication constante avec notre cumulo en question) a permis à ses festivaliers de retrouver ces moments intemporels et interminables en compagnie de nos amis les DJs. La succession des DJs sur le superbe spot Baleabeach, en pleine fosse : Zaltan, Geena & DK ont donné comme les années précédentes un coin de paradis essentiel tant recherché par les oiseaux de jour. Sur les trois dernières éditions, on donnerait les places 1/ la crique de Bidart (2013) 2/ la fosse de Ciboure (2015) 3/ la guinguette Erromardie (2014). La légende dit notamment que si Dixon et Âme ont créé cette espèce de mythe dans le monde électronique ces dernières années, c’est surtout grâce à leurs soirées Lost In A Moment, lors desquelles ils investissent des lieux à part, où l’on se perd comme on gagne des points de vie. Muxus suivants a nos chouchous Superpitcher et Lena Willikens qui ont déroulé comme des chefs.
Outre le fait qu’on n’aura toujours pas réussi à ‘targeter’ ou à choper la balançoire-boule dans le Parc Ducontenia, omis d’aller passer du temps dans la ‘maison qui fume’ (« dur pour vous » nous disent les gens, avec une pointe de mépris) et passé trop peu de temps dans le hamac géant, on ne le dira pas assez : passez vos vacances dans des endroits pluvieux. Et s’il pleut trop, vous verrez qu’il fait chaud et bon d’être collé-serré sous les chapiteaux de Kiblind, de Sonotown du Paris Psych Fest.
Photo de couve : © Eloïse / LOUISE Paris
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