Cédric Carles, designer industriel de formation, a toujours voulu proposer des alternatives aux modes de consommation et de production existants. À Lausanne, il monte le Solar Sound System, un système de son autonome qui marche au solaire – mais pas que. Depuis quinze ans, il trimballe sa bécane et s’invite dans des fêtes, des lieux improbables et des festivals comme les Nuits Sonores ou le Say Watt? de la Gaîté Lyrique. Le projet s’inscrit dans une démarche solidaire et sociale qui promeut les technologies renouvelables. Rien que ça.
Comment fonctionne le Solar Sound System ?
C’est un système autonome de sonorisation. Le système est hybride parce qu’il est solaire et musculaire : on utilise l’énergie solaire toute la journée pour envoyer le son et charger les batteries – et dès que le soleil baisse, on sollicite les batteries qui ont été chargées et on invite les gens à venir pédaler sur des vélos reliés au système. Si les gens pédalent en continu, il n’y a aucun souci. Et le matin, avec le soleil, c’est reparti. Ça peut envoyer la sauce pour trois cent personnes facile.
Tu fais intervenir beaucoup de DJs ?
Oui, ça va dépendre du budget, du lieu, du public mais ce sont souvent des potes qui viennent pour se faire plaisir. Il y en a qui mixent dans des clubs et qui veulent en sortir. Notre bande de potes part de Milan à Bangalore en passant par Lausanne. Comme MashUp, un vieux collectif de DJs mythique, Jay Ka de Syncrophone ou les frères Ortiz (Tonte Concept), bref, pas mal d’artistes qui ont envie de se fédérer autour du projet. L’idée du Solar Sound System, c’est aussi de faire connaître ces artistes, alors on met leurs noms sur le site. On réfléchit en ce moment à faire une web-radio et du streaming pour les performances. Le système parisien sera le premier équipé comme ça.
Y a-t-il une volonté de réappropriation du patrimoine ?
On est allés dans beaucoup d’endroits : sur des pistes de ski, dans des forêts, sur des plages, à des festivals. Les marchés, c’est super intéressant, c’est un moyen de revaloriser l’image des DJs et des sound systems qui sont assez diabolisés (cf : les teufeurs vus par Thatcher). On échange avec les gens sur le solaire – qu’ils connaissent assez peu – et on peut leur transmettre les valeurs que l’on défend. C’est un projet hybride qui réconcilie pas mal de gens avec le Sound System.
Dans quels festivals de musique as tu été invité ?
On a fait entre autres le Paléo, le Montreux Jazz et dernièrement les Nuits Sonores. Aux Nuits, on s’est greffé sur les projets (de jour) Extra, portés par des acteurs locaux. Il y avait Guérilla Gardening et même Civil Civic qui se sont invités sur nos platines. Ce projet fait suite à la rencontre avec Vincent Carry (cofondateur des Nuits Sonores) qui a trouvé le projet sympa. On a fait quelques Siestes Électroniques aussi, parce qu’on a des transats et qu’on aime les sortir. La formule de ce festival nous convient bien, ça colle avec notre état d’esprit et notre système.
Le prochain, ce sera la Gaîté Lyrique qui organise le festival Say Watt ? Le Culte Du Sound System sur l’histoire du Sound System sur les Berges de Seine (24 au 28 juillet, près de la passerelle Senghor)et devant la Gaîté (7 juillet, 11 et 25 août : ThéDanceHall, Square Emile Chautemps). Il y aura entre autres une bourse aux disques avec des disquaires mythiques, des thé-dancehall, une expo avec des documents historiques, et des pièces de collection. Le curateur du festival, c’est Seb Carayol, un grand journaliste de la culture skate de Los Angeles, qui bosse aussi sur l’émission Tracks.
Festival Say What ? de la Gaîté Lyrique : lien de l’événement
Tu essaies de financer un sound system sur un site de crowdfunding en ce moment ?
Oui, c’est la priorité. On veut construire une machine pour le Grand Paris. On fait beaucoup de kilomètres entre Lausanne et Paris donc on voudrait en ancrer un ici pour pouvoir le sortir et le louer quand on veut.
Pour participer au projet Solar Sound System Paris+, c’est ici
On peut en trouver ailleurs qu’à Paris ?
On en a construit pour le Brésil, pour Haïti, à Milan, en Inde, à Taïwan, à Los Angeles et maintenant, on a des demandes au Liban, au Sénégal, en Afrique du Sud, aux Philippines, en Chine, au Cambodge et au Vietnam. Les locations (sur Paris) nous permettent de financer ces projets à l’étranger. On est des loueurs de matos et on réinvestit l’argent dans du solidaire. À l’étranger, on fait de la co-construction de sound systems avec les locaux. Ça crée du lien et ça permet de vérifier la façon dont ces gens veulent l’utiliser.
Tu utilises les matériaux locaux, à l’étranger ?
En Inde, on a laissé une grande place à l’improvisation sur place, ce qui est un risque, mais on a eu un super bon retour. On a construit un sound system avec des caisses par des gars qui font du pliage de tôles. C’était excitant de devoir se débrouiller avec les moyens du bord. Pareil pour Taïwan. Et le design du système dépend de ce qu’on trouve sur place, du budget, et de ce que les gens proposent.
Un autre projet alternatif dont tu voudrais parler ?
En parallèle au Solar Sound System, j’avais conçu un Banc Skatable avec des ex-prisonniers à Marseille dans une boîte d’insertion. Après, j’ai revu le projet avec des skateurs de Lauzanne. Comme pour le sound system, le banc est construit avec les gens, on aide la commune et le skate park. On ne te vend pas un banc construit par une usine lambda mais on se déplace enseigner à la boîte locale comment le fabriquer. On a aussi testé un bar pour la première fois aux Nuits Sonores et ça marche bien.
Donc là, on a un Sound System et un bar. Bref, on n’a besoin de rien d’autre.
UPDATE 30/05/2017 : Venez tous aux Solar Disco, ça se passe aux Grands Voisins tout l’été 2017. Le 3 juin, le 1er juillet, le 5 août et le 9 septembre
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