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Dawes : « Rien n’est intemporel »

Rencontre avec Dawes et son conteur californien Taylor Goldsmith, à l'occasion de leur premier concert français.

Rencontre avec Dawes et son conteur californien Taylor Goldsmith, à l’occasion de leur premier concert français. C’était à la Flèche d’or, le mois dernier (comme le temps passe vite…)

Aux Etats-Unis, vous êtes souvent décrits par le public et les journalistes comme un groupe d’ « Americana ». Le sens de ce terme est plutôt vague ici en France. Pourriez-vous essayer de le définir ?

Tay : Intéressant. C’est quoi de l’Americana en vrai ?

T.G. : C’est un terme bizarre, oui. Je crois que c’est …c’est dur à définir car …par exemple, Grateful Dead, c’est pas de l’Americana, mais ils portent en eux des valeurs qui pourraient te faire penser que c’en est. Je ne sais même si ce que je dis est juste. Ce qui et sûr, c’est que la plupart des groupes n’aiment pas qu’on associe leurs morceaux à un seul terme car cela réduit la portée de leur musique. En général, les groupes disent, « On fait du rock’n’roll. », histoire que les gens se fassent un avis sur la musique en elle-même et pas sur un terme que les journalistes leur ont fourni. Si tu leur dis, « Dawes, c’est de l’Americana avec un son de Los Angeles », ils vont écouter notre musique en s’attendant à quelque chose de précis.

Tay : On nous a beaucoup comparés à The Band, alors que c’est un groupe canadien, des années 70, qui a fait Woodstock. Je trouve le raccourci un peu rapide. En général, tu te rends compte que les gens qui viennent te voir pour te dire ce genre de choses n’ont pas réellement réfléchi à ce qu’est vraiment ta musique.

Oui, les associations d’idées peuvent parfois être trop spontanées, c’est sûr. Pour l’info, voilà une définition d’ « Americana » : « C’est un genre qui puise dans les racines de la musique américaine, la confluence de la folk, de la country, du gospel, de la soul et du rock. » Dans un sens, vous perpétuez le travail d’artistes comme Johnny Cash, Neil Young ou Creedence Clearwater Revival, qui par exemple, chantait sur les bayous de Louisiane.

T.G. : Je pense que la bonne musique est la musique honnête. On a en effet des sonorités country, mais ce n’est pas pour cela qu’on monte sur scène avec des chapeaux de cowboys, en prenant un accent du sud pour chanter sur notre vie dans la prairie. On vient de L.A. et on en parle. On ne fait pas semblant d’être autre chose que ce qu’on est réellement. Creedence, ils étaient originaires de Louisiane mais c’était un groupe du campus de Berkeley, à San Francisco. De plus, pour moi, la country fait vraiment partie de l’identité californienne : Neil Young, Joni Mitchell, Jackson Browne, ils ont tous commencé en Californie. Quand on me dit : « On pourrait croire que vous venez d’Alabama, votre son n’est pas très californien. », j’ai envie de répondre que ça fait des décennies que cette musique n’est plus une musique de campagne.

Votre musique est définitivement moderne malgré vos sonorités retro. Vos paroles abordent des sujets actuels, parlent d’un environnement on ne peut plus urbain qu’est L.A. On est bien loin des prairies…

T.G. : Ce rapport entre temps et musique est assez étrange. Les gens vont écouter Bon Iver, Radiohead ou Dawes, et te dire : « Cette musique est intemporel. » C’est faux, rien n’est intemporel. Mes vieux vinyles des années 70 sonnent années 70, c’est indéniable. Les albums de Radiohead, au final, auront le son des années 90 et 2000. Il n’y aura jamais et il n’y a jamais eu de musique qui n’ait pas été associée à une certaine période. Si on ne sonne pas comme Grizzly Bear ou les Dirty Projectors, ça n’est pas parce que nous n’avons pas envie d’être moderne, nous voulons être modernes et voulons surtout faire ce qui sort naturellement, nous jouons comme nous jouons et Dawes est ce qu’il est.

Bonne réponse. Mais vous citer tout de même cette vieille Amérique d’après Dépression, notamment dans le clip de « When My Time Comes » qui visuellement rappelle l’univers d’O’Brother des frères Cohen.

Oui. En vrai, le réalisateur de ce clip s’est directement inspiré de Luke La Main Froide, le film avec Paul Newman. Il y a des scènes presque similaires à certaines du film sauf que dans notre clip, le héros est un enfant…et pas Paul Newman.

En omettant les belles plages, dans l’imagerie collective, L.A. n’est qu’un énorme labyrinthe de routes et de voitures où il est impossible de respirer de l’air pur. Il est connu que San Francisco a bien plus de charmes. Pouvez-vous me convaincre que L.A. est cool ?

T.G. : Bien sûr, sans problème. Déjà, le temps y est bien meilleur qu’à San Francisco. Il fait soleil presque tous les jours de l’année. Et le smog n’est pas si affreux que ça, on ne sent pas vraiment la fumée dans cette ville. Pour ce qui est des voitures, il suffit seulement de connaître deux-trois trucs. Par exemple, jamais il ne faut conduire dans L.A. autour de 15h.

Tay : Ce ne sont que des fausses idées, moi je vis dans une maison avec quatre hectares de terrain en haut des montagnes. Il y a des endroits comme Malibu qui sont juste magnifiques. La nature est partout autour de LA, nous ne vivons pas dans le béton.

T.G. : Et pourtant il habite à 10min du centre-ville.

Votre deuxième album « Nothing Is Wrong » est sorti au début de l’été dernier. Etes-vous arrivés en studio avec une intention précise en terme de son ?

T.G. : Non, on s’est ramenés et on a fait ce qui sortait. Certains groupes perdent leurs fans en essayant de faire quelque chose de différent dès le deuxième album, souvent en tentant des choses un peu bizarres. Nous, on s’est plutôt dits qu’on allait continuer à faire ce qu’on maîtrise plutôt bien histoire de voir si les gens allaient nous suivre. Au final, l’album sonne un peu plus live que le premier je trouve, sûrement parce qu’on a beaucoup tourné juste avant de l’enregistrer. Mais, ça n’était pas préparé, on s’est seulement rendus compte en le faisant que l’album allait être un peu plus agressif.

Le son est tout de même plus lisse dans le dernier, même s’il sonne live.

T.G. : Oui, ça c’est parce que pour le premier, on avait moins de sous et qu’on l’a donc enregistré en deux semaines. Cela explique pourquoi il peut paraître un peu décousu.

Taylor, pourrais-tu parler un peu de ton autre projet, Middle Brother, dont l’album est certainement ce qui s’est fait de mieux en country-folk l’année dernière ? En plus, dans ce groupe sont impliqués des membres de deux autres très bons groupes à recommander, Deer Tick et Delta Spirit.

T.G. : En fait, mon pote John, (chanteur de Deer Tick), en venu me voir car il voulait qu’on enregistre un album ensemble. On s’est donc posés dans une maison et on a écrit des chansons pendant deux semaines. Puis mon autre pote Matt (chanteur de Delta Spirit), que je connaissais bien avant John, m’a dit qu’il voulait se joindre à nous. John, qui ne le connaissait pas du tout m’a dit : « Vas-y, ramène-le. » Matt n’est arrivé qu’au premier jour de l’enregistrement qui a duré deux semaines et il a ajouté ses chansons à notre travail. C’était vraiment fou et très drôle à faire.

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