Modest Mouse en six disques

Pour mettre les choses à plat dès le début : Modest Mouse est l’un des groupes majeurs de la scène indé de ces 20 dernières années. La chose ne peut être exprimée autrement. Le groupe propose, à travers sa musique et ses concerts, une puissante vision de la vie. Une vision aussi désenchantée que jubilatoire où Isaac Brock et sa bande souillent avec délectation le rêve américain, puisant notamment dans un roman de Virginia Woolf pour trouver leur nom ou consacrant un titre hommage à Bukowski. La contre-culture indé dans toute sa splendeur. Quelque part entre Pixies, Pavement et Flaming Lips, Modest Mouse est peut être l’un des premiers groupes à assumer autant le chanté bancal, bien avant Arcade Fire ou Clap Your Hands Say Yeah. Pourtant, le groupe reste étrangement confidentiel en France. Avant leur venue à Paris (Trabendo) le 25 juin et à Rennes (Ubu) le lendemain, tentative de rattrapage avec une sélection d’un titre marquant de chaque album sorti par le groupe depuis ses débuts.

1994 – Sad Sappy Sucker
Le trio d’adolescents produit son premier album un an après sa formation. Complètement déstructuré, provocateur et anti-formaliste, le disque préfigure parfaitement de la trajectoire à venir du groupe. Composé de titres de moins de deux minutes (et même de quelques secondes seulement), le disque ne connaitra une véritable sortie publique qu’en 2001.

1996 – This Is a Long Drive for Someone with Nothing to Think About
Considéré comme le premier véritable album du groupe. Isaac y crie son bonheur du voyage et de la solitude. A l’inverse de l’opus précédent, les 15 titres se distinguent par leur durée particulièrement longue. Traversée du début à la fin par l’énergie lo-fi, cet album s’autorise toutes les expérimentations sonores.

1997 – The Lonesome Crowded West
L’album qui a permis au groupe de passer du statut de groupe prometteur à celui de groupe culte. « The Lonesome Crowded West » est considéré comme l’un des meilleurs albums indé de l’histoire (29e des 100 meilleurs albums des années 90 pour Pitchfork). Torturé et déviant, le rock de Modest Mouse s’affirme ici à travers toutes les digressions musicales possibles. Foutraque au possible, l’album n’en reste pas moins étonnamment cohérent.

2000 – The Moon & Antarctica
Premier album du groupe produit chez une major, c’est aussi celui à partir duquel certains fans de la première heure lâcheront le groupe, considéré dès lors comme trop commercial. Pourtant, si le son se relève désormais plus propre, l’écriture d’Isaac Brock reste toujours aussi personnelle et sombre. The Moon & Antarctica reçoit ainsi une critique dithyrambique (classé 6e album des années 2000 par Pitchfork) ! Modest Mouse réussit à allier ses expérimentations sonores et vocales de toujours avec des mélodies presque pop.

2004 – Good News For People Who Love Bad News
S’il fallait établir un classement de la discographie du groupe, celui-ci arriverait sûrement en tête, et ce, malgré la quasi perfection des deux albums précédents ! « Good News » comporte 16 titres pour presque autant d’ovnis et de tubes. Nettement plus pop que tous les albums précédents, il garde néanmoins cette douce folie et mélancolie qui fait la patte Modest Mouse.

2007 – We Were Dead Before the Ship Even Sank
Dernier album en date du groupe, c’est aussi celui qui a connu le plus gros succès commercial (500 000 exemplaires vendus aux USA). L’album se fait initialement remarquer en raison d’un nouveau membre dans le groupe : Johnny Marr, l’ancien guitariste de The Smiths. L’album bénéficie également de la participation vocale sur deux titres du leader de The Shins, James Mercer. Un album au casting du rêve qui continue l’exploration du groupe sur des sentiers plus pop et accessibles, sans pour autant renier le sens même du projet initial.

Si ces 6 titres ne vous ont pas encore convaincus de vous précipiter au Trabendo ou à l’Ubu, voici une toute dernière cartouche avec ce titre paru en 2009 sur l’EP d’inédits « No One’s First, And You’re Next ». Heath Ledger devait réaliser le clip de cette chanson. La vidéo n’étant pas encore terminée au moment de sa mort en 2008, c’est Terry Gilliam qui repris le projet pour le finaliser et nous offrir ce film d’animation burlesque et poétique.