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Spring à Keriolet, retour d’idylle

Trois ans qu’on attendait ça. Trois ans que les hasards du calendrier nous tenaient éloignés d’une nuit déjà légendaire malgré sa courte existence. Sur les hauteurs de Concarneau, les vieilles pierres du château de Keriolet accueillent depuis quatre ans la Spring. Dix heures de rêve éveillé, dans le lieu qui a vu naître Astropolis. Retour d’idylle.

22h. Depuis le port de plaisance de Concarneau, montez tout droit, c’est dans les bois, là-haut, que ça se passe. A l’entrée, tapis rose. Ce soir, pour la montée des marches, on attend Manu Le Malin, Rone, Fritz Kalkbrenner et Kevin Saunderson. Rien que ça. Habile mélange des générations pour une belle célébration des musiques électroniques.

22h30. Dans la cour, George Selector, qui s’est même marié ici-même, chauffe les platines. Bienvenue dans l’antre de granit qui a vu naître Astropolis, en 1997, avant que les raveurs devenus trop nombreux ne filent dans un autre manoir un peu plus vaste, en terres brestoises, et que Kériolet invente les fameuses Spring qui ont déjà vu défiler Laurent Garnier, Agoria, Chloé, Electric Rescue & co.

23h. Manu Le Malin et ses vinyls célèbrent les premières minutes de l’Ascension (reste à savoir vers quoi, chacun à sa méthode dans la cour). Le célèbre cou tatoué fait partie des murs à Keriolet, même si cela fait bien longtemps qu’il n’avait pas fait d’infidélités à la scène Mékanik de Keroual. Un set down-tempo pour cet énervé des BPM, avec le terrible Lynchesque de Dusty Kid en point d’orgue. Parfait pour commencer. La cour du château, qui peut accueillir 1.400 personnes, est archi-blindée. Il faut jouer des coudes, un tout petit peu dommage.

01h30. Adulé par un public breton lors de ses dernières apparitions brestoises (Astropolis 2011 et le Vauban en octobre), Rone débarque en messie. Un live tout en finesse, ponctué de ses meilleurs morceaux (So So So et Der Tanz der Gluehwuermchen, son fabuleux remix de Dominik Eulberg). En fond de cour, les premiers fantassins mènent l’assaut pour aller se poser les fesses entre deux créneaux de muraille. Moyen-Âge toujours : dans la salle des gardes, la statue du comte de Keriolet s’amuse avec des lasers rouges, au-dessus d’un grand feu de cheminée. Retour dehors, on croise une girafe et un renard en train de se draguer. On attend, mais les bestioles ne concluront pas. Désavantages du masque.

03h. Fritz Kalkbrenner se dandine sur scène. Le Berlinois est en pleine ascension, porté par les émules de son grand frère et sa dernière compil’ « Suol Mates » qui vient de sortir. Le set est carré, assez fidèle aux productions du bonhomme. Un bon live, dérivant parfois de manière très assumée vers des ambiances pop chantée qui ne sont pas toujours du meilleur effet. Au-dessus des âmes en communion, la tour principale crache de la fumée verte.

03h45. Kevin Saunderson arrive avec la banane. Léger contraste avec la mine provisoirement défaite de Gildas, organisateur, qui déplie à la hâte un gros parasol pour contenir quelques gouttes de pluie qui menacent. Finalement, cela durera cinq minutes. Le temps au vétéran de Detroit de lancer un long set techno d’une classe inouïe. On était assez sceptique à son sujet, échaudés par des mixes un peu chiants d’autres vétérans de sa génération (Jeff Mills en première ligne). Mercredi, il aura fallu 10 minutes à Saunderson pour nous calmer. On n’est pas le pote de promo de Juan Atkins et Derrick May pour rien. Les gargouilles du XIIe siècle ne sont pas prêtes de l’oublier.

Environ 06h30. Le ciel commence à s’éclaircir. Dans la cour, il reste au moins encore 1.000 hédonistes pas spécialement fatigués. Et ça tombe bien, c’est l’heure du chill out vu par le Sonic Crew (l’orga du festival). Deux heures épiques, avec un large tribute à l’un des instigateurs de la rave en France, Laurent Garnier. Après le fameux Jacques In The Box (notre track préféré de Garnier depuis dix ans), le Sonic Crew glisse l’impeccable Our Futur. Orgasmes dans la cour, les gens se font des câlins.

8h45. La girafe, sans le renard, est revenue au premier rang, debout sur la barrière. C’est la dernière fois qu’on verra cette belle hédoniste habituée d’Astropolis, puisqu’on vient d’apprendre aujourd’hui que sa tête a été volée. A celui ou celle qui eu cette bien mauvaise idée, sache une chose : au XXe siècle, le propriétaire de Keriolet s’appelait Félix Youssoupov. Il est devenu célèbre après avoir participé à l’assassinat de Raspoutine. Son fantôme hante aujourd’hui Keriolet, et il se dit, entre gargouilles, qu’il aimait beaucoup les animaux…

Photo : Marco Strullu

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