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Rencontre avec les capitaines Sparks

Inconnus pour la plupart, cultes pour d’autres, les Sparks ont traversé les époques et les décennies avec une carrière et une discographie face auxquelles peu d’artistes peuvent rivaliser. Les deux frères s’amusent ensemble depuis l’époque de la fac, et avec une moyenne d’âge de 70 ans (!) ils reviennent avec un 23ème (!) album, « Hippopotamus ». On a discuté avec eux afin de revenir sur quelques instants choisis d’une carrière hors-norme.

L’histoire des Sparks mérite un documentaire de 3h tellement elle est unique en son genre. Les deux frères Mael ont fait le pari de se réinventer album après album, pour ne pas sombrer dans la monotonie ; pari qui s’avère réussi puisqu’ils sont encore présents en 2017 à l’heure où beaucoup de leurs collègues de l’époque sont passés outre-tombe. Tantôt rock, pop, glam, electro, déluré […], la définition que l’on pourrait donner des Sparks serait justement qu’ils sont indéfinissables ; un peu comme Syd Barrett.

Autant vous dire que c’est un sacré morceau de l’histoire de la musique que nous avions en face de nous. On a fait ressortir quelques grandes lignes de leur histoire qui nous paraissaient anecdotiques afin d’avoir le témoignage des deux frères sur leur oeuvre et leurs collaborations. On aurait pu leur poser 30.000 questions, mais comme dit plus haut, il faudrait un véritable biopic pour retracer intégralement la Sparks-mania. Mais vu qu’ils ont la réputation d’être fun, on a essayé d’être drôle. Essayé.

Sparks – When I’m With You

Sparks a débuté au début des années 70, et à cette époque vous n’avez pas tout de suite rencontré un écho réceptif chez les Californiens qui préféraient écouter Captain Beefheart ou les Doors en faisant des roulades nus dans des champs de fleurs. Est-ce que les gens prenaient trop d’acide à l’époque pour pouvoir apprécier votre musique ?

Ron : Ce n’est pas un problème de drogues, mais plutôt un problème d’intelligence je dirais. Les groupes à l’époque étaient sincères mais de la mauvaise manière à mon avis. C’est pour cela qu’on se sentait plus proches de groupes anglais. Quand on a enregistré notre deuxième album à Londres, l’attention qu’on nous prêtait était particulièrement différente. Tu sens qu’il y a une véritable passion pour la musique là-bas. C’est pour ça qu’on s’y est installé par la suite. On essaie parfois d’analyser cette réticence californienne des débuts, mais la sensibilité des gens est quelque chose de subjectif.

De nombreux médias disent que vous avez explosé en Europe avec votre titre « This Town Ain’t Big Enough for Both of Us » mais ma mère m’a dit que c’est avec « When I’m With You » qu’on vous a découvert dans les boîtes de nuit. A quel moment avez-vous senti que les choses étaient en train de basculer ?

Russell : Il y’a eu différentes périodes, assez schizophréniques, entre les deux titres (5 ans), et dans notre carrière en général. « When I’m With You » a eu un effet de masse sur les dancefloors et les radios, à la même époque que « Common People » de Pulp, alors que « This Town Ain’t Big Enough for Both of Us » a davantage été apprécié de gens ayant une sensibilité tournée vers la pop, le rock et le glam.

Ron : Les mamans adorent « When I’m With You », c’est un fait.

Russell : Mais ça a vraiment basculé quand on a commencé à faire de la télévision.

Vous travaillez beaucoup par collaborations. Les Rita Mitsouko, Giorgio Moroder, Franz Ferdinand […]. Ça vous semble important d’avoir plusieurs esprits sur un même projet ?

Ron : Quand tu fais une collaboration, tout le monde doit abandonner un petit peu de sa propre autonomie personnelle. C’est enrichissant, de confronter les points de vue, et de faire quelque chose que tu ne serais pas nécessairement arrivé à faire seul.

Ça s’inscrit aussi dans une démarche d’un groupe qui cherche à renouveler son identité au fil de sa carrière.

Russell : Le fait de ne pas savoir à l’avance le résultat est une chose intéressante pour nous. C’est pour cela que l’on ne cantonne pas à un style de musique et que l’on fait des collaborations. L’inconnu, c’est excitant. Ne pas savoir à quoi s’attendre.

Comment s’est produit la rencontre avec les Rita Mistouko d’ailleurs ?

Russell : On les a rencontrés à Los Angeles, ils étaient en tournée. On a vu une interview d’eux où ils citaient les Sparks en tant que référence. On les a rencontré après un concert, et on s’est dit qu’on allait faire des choses ensemble. Tout simplement.

Rita Mitsouko + Sparks –
Singing In The Shower

En 1979, vous avez produit un groupe français, Bijou, dans un délire mod rock… 

Russell : Encore un autre cas de groupe qui était fan de nous et qu’on a rencontré par la suite. A ce moment là, on connaissait le manager et ça nous semblait être un projet intéressant pour l’époque. Ils sont venus enregistrer à LA. Ils ont même fait une chanson avec Gainsbourg.

Dans votre art, il y a toujours des blagues qui y sont disséminées, autant visuellement que textuellement. Êtes vous les merles moqueurs volant au-dessus du rock actuel ?

Ron : Le but n’est pas d’être exclusivement drôle ou fun comme on peut l’entendre un peu partout à notre propos. On insère de l’humour et du sarcasme avec une dimension relativement sérieuse dans nos paroles et nos clips. Comme on dit, l’humour c’est quelque chose de très sérieux.

En 2009, vous avez joué chacun de vos 20 albums, pendant 20 jours à Londres. Vous êtes maso ?

Russell  : C’était une proposition de notre manager. Il s’était dit que seul Sparks pouvait faire ça. On a donc joué nos 20 albums, et sur le dernier jour on a dévoilé notre 21ème album. Au départ on s’est vraiment demandé dans quoi on s’était embarqués, mais l’aspect conceptuel de la performance nous a intéressés ; cette espèce de rétrospective. Il y a certains titres qui n’ont jamais été joués en live, pour le plus grand plaisir de nos fans. Mais c’est clairement pas quelque chose que l’on refera !

Sparks – What The Hell Is It This Time?

Hippopotamus est votre 23ème album. En 1999, un hippopotame a tué le directeur d’un zoo à Bordeaux parce qu’il était jaloux d’un tracteur en qui il voyait un concurrent. Doit-on se méfier de vous en général et de votre force cachée ?

Russell : Quand on a sorti cette chanson, on n’a pas pris en compte l’aspect dangereux de l’animal. C’est peut-être un gros mammifère, il a une apparence assez paisible, en extérieur ; même s’il ne faut pas les énerver visiblement. Puis le fait qu’on mette un hippopotame paisible dans une piscine en guise de pochette d’album ne suggère pas d’être méfiants, au contraire.

Après tant d’années d’activité, quelle est le secret de la jeunesse éternelle ?

Ron : Jouer, travailler, et composer. On est très sérieux à propos de ce que l’on fait, mais jouer au sens de s’amuser est la clef selon nous. Prendre plaisir à faire des choses, c’est impératif. Certains groupes perdent justement ce plaisir au fil des années. Le fait de proposer régulièrement quelque chose de nouveau à travers notre discographie nous a permis de ne pas nous ennuyer.
Russell : Avoir une curiosité est un sens de l’exploration infini envers l’inconnu.

Le groupe sera en concert à la Gaîté Lyrique le 1er octobre.

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