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Notre histoire du Paris Psych Fest

Vendredi 4 juin, Paris s’était donné un double défi ; passer les quarts de finale de la coupe du monde et lancer son 1er festival de musique psychédélique. Seulement l’un des deux a été réussi. Notre chroniqueuse ne s’est pas laissée abattre et a laissé son esprit aux mains de fée de La Machine du Moulin Rouge. Elle nous parle de la face cachée (derrière sa mèche) du rock.

Photo de couverture : Etienne Jaumet de Zombie Zombie ⓒ OOO Communication – Rémy Golinelli – Videographer

Vendredi 4

20h. L’air est lourd, les cafés silencieux, les mines déconfites. Personne ne peut ignorer le goût amer qui plane. Partagée ou pas, la déception est palpable dans la rue. Les bleus n’iront donc pas en demi. C’est un sentiment vif, à l’extérieur. Mais passée la porte de la Machine, le foot n’est que secondaire.

Les quelques mesures de Cosmic Dead indiquent bien qu’ici l’ambiance sera plus tellurique que sportive. Ce qui me consolerait presque… d’avoir loupé Wall of Death. Tant pis pour les morts, ce soir on va faire avec ce qu’il reste des vivants.

Perchés sur la grande scène, The Underground Youth propose un set abrupte. Le chanteur a visiblement passé de longues heures à écouter Ian Curtis, et son post-punk envoie de lourds riffs gras et vibrants. Je passe une bonne demi-heure à m’interroger sur le sexe du/de la bassiste. Une fois que je comprends que je n’en saurai pas plus sans Google, je remarque que la batteuse cache ses airs de Nico (elle) en frappant violemment son instrument avec des massues. Une espèce d’esthétique un peu poseuse plane sur la grande scène.

Un sourire bon enfant aux oreilles, le public va de l’inévitable hipster à Converse au vieux briscard soixante-huitard. Une union commune les faisant flotter dans les distorsions du groupe.

Les KVB m’apparaissent moins prétentieux que leurs camarades. Assis sur l’une des banquettes du sous-sol, un sosie de Georges R. R. Martin (lui) les regarde de loin, à l’aise dans ses baskets sans chaussette. Leur univers est riche, la rythmique moins présente ; la guitare s’envole plus facilement vers un rock old-school, dansant et trouble. Georges et ses potes ne s’y sont pas trompés, on dirait que le public savoure ces groupes avec un brin de nostalgie. Les KVB sont jeunes. Une hippie sur le retour dirait que leur âme ne l’est pas.

Samedi 5

Il est des expériences qu’on se doit de faire une fois dans sa vie pour toucher le fond du bout des doigts. Et être vendeuse de prêt-à-porter pendant les soldes vaut facilement une petite visite dans le neuvième cercle de l’enfer. C’est donc avec l’immense joie d’avoir raccroché définitivement mes crampons que je me dirige vers cette deuxième soirée de festival. J’ai tout juste le temps de m’hydrater avant d’aller découvrir la première claque de ma soirée. Dans la petite salle, Go!zilla rentre en scène.

Si l’idée était de planer, tant pis. Les Italiens puisent dans des accords sombres et traînants une énergie diabolique. Même assise, couvant mon verre et regardant l’action de loin, quelques gouttes de sueur viennent perler sur mon dos. Mais j’ai peut-être juste pris froid.

Si j’en crois les variations vocales du chanteur, il n’y a pas que ça. C’est le premier concert de ce festival pour lequel je trouve une parfaite harmonie entre voix et musique. Enfin, jusqu’à ce que le chanteur décide de laisser ses potes s’enflammer en duo, son retour venant de lâcher. Le temps qu’un roadie en tire un neuf de sa besace, telle une Mary Poppins barbue, le groupe reprend son hymne au Grateful Dead. Dans la salle, le public est moins hétéroclite que la veille. Une réplique du personnage de Johnny Depp dans Dead Man traîne son objectif de scène en scène. Dans un final limpide et lumineux, slammant sans s’arrêter de jouer, Go!zilla montre à tous que les Italiens n’ont pas qu’Umberto Tozzi.

Côté grande scène, les premières notes de Radar Men From The Moon semblent plus proches de Fever Ray que des Doors. Les synthés venant donner une touche cold wave à l’ensemble. La basse suit une ligne toute droite et j’ai l’impression que leur musique souffre d’overdose, sans savoir laquelle.

Je rattrape cette note un peu amère grâce à The Oscillation, que j’aurais encore plus apprécié si une simili-Mindy Kaling (elle) n’avait pas décidé de raconter son séjour en France à côté de mes tympans. Hormis cette pollution auditive, les Anglais ont donné une bonne leçon de psychédélisme à l’assistance. À tel point qu’un mec aux yeux noyés me propose amoureusement du LSD.

Impossible de passer sous silence Toy, qui a livré un set ludique et profond, à force de comptines enfantines noyées sous un déluge de basses. Et que dire de Cabaret Contemporain ? Avec leurs deux contrebasses, on aurait pu croire que leur place était plutôt destinée au Caveau de la Huchette, mais sous leurs airs de jazzmen germanopratins, leurs harmonies acides se mêlent parfaitement à l’ambiance du lieu, ainsi qu’à ses consommations.

Enfin, Zombie Zombie gagne le concours de la transe. Dans un concert qui aura aussi bien plu aux fans que convaincu les puristes, le trio met tout le monde d’accord et clôt dignement ce festival.

Une première édition qui remplit parfaitement son cahier des charges ; le psychédélisme n’est pas mort, il a juste changé de visage.

Quant à moi, dès lundi, je change de boulot.

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