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Luke Abbott, l’ambiguïté comme instrument

Le 20 mai dernier, le Trabendo se payait le luxe d’accueillir Luke Abbott et Gold Panda. On s’est concentré sur le premier pour décrypter sa façon de jouer en live. On a pas été déçu, l’artiste originaire de la région de Norfolk en Angleterre, semble être quasi-seul dans la salle et se permet des expérimentations bizaroïdes et extrèmes au pays de l’étrange. L’homme au style lunettes-capuche a frappé.

Luke Abbott fait partie d’une génération d’humbles artistes qui font de l’électro (au sens très, très large) mais qui ne se considèrent pas comme DJs. D’une part, on a des mecs comme Siriusmo qui ne sont pas à l’aise en live et qui ne font que des DJ sets, de l’autre, on a Luke Abbott qui est sur scène comme chez lui : « je ne joue que des lives. C’est juste de cette façon que la musique m’apparaît. Je n’ai jamais voulu être un DJ, c’est une chose vers laquelle je ne me suis jamais senti attiré » nous confie-t-il quelques temps avant son concert au Trabendo.

Il est utile de remarquer qu’il faut un puissant bagage de bidouille, de décontraction et de recul par rapport au public pour faire partie de l’équipe Border Community. Luke Abbott est, avec Nathan Fake l’un des deux lieutenants de James Holden les plus fous de la scène anglaise. Luke est autant connu pour composer des morceaux à foutre les dieux en transe que pour perdre complètement ses auditeurs.

Ces derniers temps, il a eu la classe de voir deux de ses morceaux (Modern Driveway et Brazil) insérés dans le mix de Thom Yorke pour la BBC Radio 1. A ce sujet, il dit que « c’est très plaisant », qu’il a « beaucoup de respect pour Thom Yorke » et qu’il a été « un grand fan de ses différents projets musicaux depuis très longtemps » et de rajouter que « ça fait toujours plaisir quand quelqu’un joue l’un de tes enregistrements à la radio ».

Mais, c’est pas tout, on lui concède aussi de s’être fait remixer son (petit tube) Modern Driveway (au piano) par Jon Hopkins et lui rendre la pareille pour son titre Open Eye Signal (au synthé) ; de faire des premières parties de Four Tet et Gold Panda. Pas les mecs les plus terre-à-terre. Est-il simple de déceler un peu de folie chez Luke ou une once d’humour anglais ? Un peu et l’on sait désormais ceci : « je parle beaucoup à ma table de mixage mais pas à mes synthétiseurs ». C’est un code, on en est sûr.

Luke habite à Norwich, dans le Norfolk, au sud-est de l’Angleterre. Il a passé quelques mois en résidence dans un centre d’art (photo, ça a l’air sympa, hein ?) : « le Wysing Arts Center est vraiment paumé au beau milieu de la campagne et il n’y a même pas de réseau. Quand j’y étais, j’ai travaillé sur des stratégies pour les performances live dans la musique électronique, j’y ai aussi enregistré beaucoup de musique. Je vais d’ailleurs en sortir un peu, mais je vais attendre de sortir mon nouvel album ».

Un album qui sortira, si tout va bien, sur Border Community même si les derniers EPs de Luke sont sortis chez Notown, le label de Derwin aka Gold Panda. Pour les participations, il déclare qu’il a « collaboré avec quelques artistes ces temps-ci, mais aucun d’eux ne sera sur l’album ».

« Récemment, j’ai écouté beaucoup de choses d’un label qui s’appelle Icasea« , on a fait notre enquête et c’est un label plutôt inconnu dans nos contrées et sur les réseaux sociaux, qui met en avant des musiques ambient, electronica très épurées, méditatives et romantiques. Une belle découverte, merci Luke.

La soirée au Trabendo s’annonce aérienne, et  il y a quasiment autant de gens devant Luke que devant Gold Panda qui prend la suite. Comme on pouvait s’y attendre, l’introverti est à fond dans son sujet, la capuche sur la tête et les lunettes juchées sur le nez. Pour lui, le live est une phase de test. Il expérimente ses nouveaux morceaux, peut-être les mêmes qu’il a créés dans le Wysing Arts Center.

Des mélodies BoCiennes succèdent à des tentatives étranges de communiquer (sûrement) avec le troisième type. Le public ne sait alors plus trop où se mettre torturé entre la danse et le l’introspection, et il a de quoi : la limite est très mince. Après une apogée de montées synthétiques, il revient aux mélodies, aux rythmes puissants et à ses titres fétiches.

Volontairement, l’artiste installe dans l’esprit du public une ambiguïté et certains morceaux forcent la confrontation de sentiments opposés. Faut-il danser ? Faut-il fermer les yeux ? Faut-il réfléchir ? Faut-il être attentif à chaque son ? Force est de constater qu’il retient l’attention dans les moment de grâce ainsi que dans les instants d’incompréhension.

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