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Et là sans crier gare, on tombe sur les Black Pumas

Fondé par le duo Eric Burton et Adrian Quesada, Black Pumas sortait son album éponyme le 21 juin dernier après deux ans de riffs partagés. Un premier projet réussi, par l’intelligence de son syncrétisme américain, la sincérité de ses musiciens et les histoires de chacun. Déterminés, passionnés et résistants, ils enchaînent les concerts depuis le premier jour. Leur dernière date à Paris (La Boule Noire) affichant complet – les Black Pumas se produiront à l’Alhambra le 8 février prochain, on fait pas de jaloux -, ce passage fut l’occasion de leur poser des questions sur les raisons de ce succès. Même à rebrousse poil, ils ne sortent jamais les griffes. Miaou.

Vous avez beaucoup tourné durant ces deux dernières années aux États-Unis et en Europe, et vous avez sorti votre premier album il y a cinq mois. Pourquoi attendre aussi longtemps ? Avez-vous rencontré des difficultés pour faire cet album ?

Adrian Quesada : Non ce n’était pas vraiment difficile , sauf pour notre manager au niveau de l’organisation. Nous concernant, je dirais que la partie la plus délicate concernait la sélection des morceaux. La première fois qu’on a été en studio, on a enregistré beaucoup de titres. Ce qui était éprouvant c’était le fait de devoir s’arrêter et de dire « ça y est, on a un album ».

Vous avez également été invités par beaucoup de médias pour des sessions live filmées. Comment expliquez-vous et gérez-vous ce succès si soudain ?

Eric Burton : Je crois qu’il est parfois difficile de prendre du recul et de digérer les choses alors même qu’elles se déroulent. Mais on a tout de même pu voir comment notre management, ainsi que les gens qui ont soutenu notre projet, nous ont propulsé vers le succès, aidé à faire nos concerts et à faire de la musique.

Que voulez-vous exprimer à travers le titre « Colors » ?

E. Burton : Tout d’abord je dirais que « Colors » est la représentation de beaucoup de choses que j’ai vues, goûtées et dont j’ai fait l’expérience en tant qu’être humain. J’ai écrit cette chanson en suivant l’idée d’unité. Quand les chœurs disent « mes sœurs et mes frères », je m’adresse à eux pour les pousser à vivre pleinement leur existence. Lorsque je dis « ce sont mes couleurs préférées », cela peut être interprété de différentes manières. Mais en gros : même si nous ne sommes pas tous dans le même bateau, nous allons dans la même direction.

J’ai vu une vidéo trailer de Look At My Soul – le projet de chicano soul de Adrian Quesada – dans laquelle vous expliquiez que ce projet vous avait aidé à apprendre des autres, de leurs histoires, de leurs expériences de vie. Est-ce la même chose pour les Black Pumas ?

E. Burton : Je peux dire avec certitude et conviction que ce projet a fait de nous de meilleurs individus, entre notre collaboration et tout ce que l’on a fait pour qu’elle fonctionne.

Vous qui vivez à Austin, pouvez-vous nous dire quelques mots sur la ville ? Il semblerait qu’elle connaisse un phénomène de gentrification assez intense. L’avez-vous remarqué ?

A. Quesada : Austin est en continuelle transformation. J’y suis depuis un certain temps. C’était une ville où beaucoup de musiciens, d’artistes et de réalisateurs allaient parce que c’était économiquement abordable, qu’il y avait un réel bouillonnement créatif et culturel. À cause de la gentrification, cela a été de plus en plus difficile pour les nouveaux artistes de s’y installer. Mais en dépit de l’ensemble de ces facteurs, je pense que c’est toujours une bulle créative habitée par un tas de gens talentueux. C’est beaucoup plus cher que lorsque je m’y suis installé mais je suis convaincu qu’il y a toujours une large communauté de musiciens qui se soutiennent entre eux, peuvent être amis et collaborateurs, comme Eric qui n’est en colocation qu’avec des musiciens…

E. Burton : La première fois que je suis allé à Austin, j’allais de villes en villes et je chantais dans la rue. J’y suis allé sur les conseils d’amis musiciens avec qui je voyageais. Quand ils sont rentrés chez eux, j’ai eu besoin de rester parce que les artistes sont chaleureux et que l’on est très rapidement intégré. Malgré ce phénomène de gentrification, Austin continue d’être un centre naturel de créativité.

Austin est connue pour avoir une scène musicale très importante, avec beaucoup d’endroits pour que les musiciens se produisent. Cet environnement vous a-t-il aidés d’une manière ou d’une autre ?

E. Burton : Oui, bien sûr, énormément. Lorsque l’on a décidé de faire cet album, on a eu envie de jouer en live, de faire des dates et l’un de nos amis proches, Steve, détient un club connu à Austin, le C-Boy’s.

A. Quesada : Nous n’avions jamais fait de concerts ni joué un seul morceau live, j’ai parlé de notre projet à cet ami commun et il a dit : « ça sonne bien, tu veux jouer dans mon club ? ». Malgré la gentrification et toutes ses conséquences, il y a encore des gens qui soutiennent la musique et c’est une des raisons pour lesquelles Eric est resté à Austin. On a signé pour une résidence tous les jeudis soirs pendant un mois dans son club alors que personne ne nous connaissait. C’est un endroit où beaucoup de musiciens traînent et nous avons remarqué au fur et à mesure que des gens commençaient à venir toutes les semaines pour nous soutenir. Vous savez les musiciens peuvent constituer une audience qui peut être parfois compliquée, adossée au mur les bras croisés… (rires) Nos amis musiciens sont venus, nous ont soutenus et c’est devenu des jeudis soirs cool, amusants où l’on a pu se développer en tant que groupe. Je pense que cela ne peut se produire qu’à Austin grâce à cette énergie fédératrice. Des villes comme Los Angeles, New York n’ont pas une communauté aussi solidaire.

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Eric Burton, par Greg Giannukos

Peut-on dire que la dominante de Black Pumas est soul ?

A. Quesada : Nous ne faisons pas référence à des influences spécifiques et nous écoutons tellement de musique que cela vient naturellement. Ce qui compte le plus pour nous c’est que cela soit sincère, on n’a pas envie de copier exactement quoi que ce soit. Un de mes amis m’a dit une fois « tu ne peux pas prétendre que le hip hop n’ait jamais existé », on aime surtout la musique des années 1960-70 mais je n’oublierai pas le fait que j’ai grandi avec le hip hop.

E. Burton : J’ai appris à jouer à travers différents styles, dont le hip hop. J’ai grandi dans les années 1990 à Los Angeles où le hip hop était très présent. Nous avons d’ailleurs découvert la soul, Motown en particulier, grâce au hip hop. De toute façon on écoute de tout, jazz, folk, on aime beaucoup Neil Young…

Vous faites partie également partie du groupe Look at my Soul. Pouvez-vous nous en dire plus sur la Chicano soul ?

A. Quesada : Mon projet de Look At My Soul n’a rien à voir avec les Black Pumas. Étant limitrophe du Mexique, le Texas bénéficie d’un très grand melting-pot et il y a depuis longtemps un croisement d’influences musicales entre mexicains, noirs et blancs, autrefois lié à leur implantation dans les bases texane de l’armée. Les troupes noires amenaient leurs musiques de Motown, les blancs texans et les immigrés mexicains ont amené la leur et c’est de là qu’est né ce son unique, de cette combinaison inédite que l’on n’a nulle part ailleurs dans le monde.

Pensez-vous que cela a influencé les Black Pumas ?

A. Quesada : Peut-être mais si c’est le cas, c’est totalement inconscient.

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Black Pumas (Eric Burton & Adrian Quesada), par Greg Giannukos

Vous affichez complet pour le concert à La Boule Noire et vous allez jouer à nouveau à Paris en février. Quel effet cela vous fait ?

Eric Burton : Nous sommes très heureux. Je crois que de tous les pays où nous sommes allés, c’est en France que nous nous sentons le mieux.

Adrian Quesada : Et puis c’est notre premier concert à Paris en tête d’affiche, la dernière fois nous faisions une première partie. Nous sommes donc très impatients.

Pensez vous que les pumas courent plus vite que les panthères ?

E. Burton : Je crois que le puma noir, ce que nous appelons le « black puma » n’existe pas. Le « black puma » serait une panthère dans la réalité… et même si il n’existe pas, il court bien plus vite que la panthère (rires).

A. Quesada : C’est comme un fantôme !

À votre tour, open mic, voulez-vous vous exprimez sur quelque chose en particulier ?

A. Quesada : Je crois que j’ai une bonne connexion avec Paris, je ressens la même chose qu’avec Austin, beaucoup de créativité, c’est très inspirant de s’y promener. C’est une de mes villes préférées, nous sommes très excités d’être là et que les gens viennent nous voir jouer.

E. Burton : Même avec le jetlag et les aspects pénibles de ce métier lorsque l’on est en tournée, je voudrais dire que nous sommes vraiment passionnés par ce que l’on fait, que l’on a envie de partager notre amour avec les gens surtout en étant dans la ville de la romance. On veut aussi leur dire qu’on va tout donner, qu’on va mourir sur cette scène.

Photo en une : Black Pumas, par Greg Giannukos

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