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Chez les fous du son au festival Meakusma

Le Meakusma à Eupen, c’est une institution. Et pas que dans cette boisée région germanophone de l’extrême-est de la Belgique. De Manhattan à Kyoto, en passant par les Pays-Bas ou la Russie, les geeks passionnés de son se déplacent chaque année pour ce petit festival pointu et baba cool.

Le point commun à tous les artistes de Meakusma est la réflexion et le façonnage du son au cœur de la création. De l’installation nomade aux sets électros dogmatiques (l’artiste new-yorkais Ghost Producer et son « Freak-a-tone », Harmonious Thelonious et ses séquenceurs), en passant par la musique concrète (les projections 16mm « Sound on celluloid film ») ou l’acousmatique dans sa définition la plus large.

Dans la cour du centre culturel accueillant l’événement, un chapiteau de fortune accueille le soundsystem le plus agréable que l’on ait entendu depuis longtemps. Pas de débauche de décibels pour accueillir le jam dub de 7FO & Tapes, ou encore la groovy-pop de Hito Hamori avec son projet « New Optimism ».

Sous la pluie et à l’église

On déambule et on se laisse doucement porter par le flot et on se prend un premier bain d’oreille avec Ladr.ache , ensemble polyphonique de multi-instrumentistes avec une passion pour le bricolage. Ici la voix, les drums, percussions et autres boucles sonores sont traitées en direct, harmoniquement accompagnées de quelques fréquences et oscillations de scie musicale. Décrit comme cela, ça peut sembler trop intellectualisé mais le résultat laisse en réalité largement la place à l’émotion et à une spontanéité punk. Pour les fans de Laurie Anderson, Arcade Fire et Nina Hagen (en même temps).

Il sera encore question de traitement de la voix avec l’électrockabilly apocalyptique de Davy Kehoe. Des patterns de boîtes à rythmes et des micro-riffs de guitares sur-maquillées constituent l’énigmatique plateau sur lequel l’Irlandais vient poser sa voix, ses onomatopées, vibrations bizarres d’harmonica et de tout ce qui peut s’approcher de la bouche. On est totalement perdu et dubitatif (ce qui est plutôt positif). Le look d’assistant comptable des années 50 n ‘aide pas à clarifier le mystère. Esprit d’Alan Vega es tu là ?

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Mais les deux performances les plus attendues du festival étaient délocalisées dans les églises de la ville. Le samedi soir c’est le Tashi Wada Group (Tashi Wada x Julia Holter x Corey Fogel) qui investit l’imposante église Saint-Nicolas. Réparti entre le chœur d’orgue (cornemuse), les traverses extérieures de la nef (la batterie) et l’autel (les pads), le groupe tente de conserver le mystère et profiter au maximum de l’acoustique unique du lieu. On mesure l’importance de l’environnement sonore en comparant mentalement le résultat avec le live studio qu’on a maté sur le net avant de venir. (un conseil, ça ne sert à rien, 95 % de l’expérience dépend du lieu, et du vin).

« Un bon orgue à tuyaux est le putain de meilleur synthétiseur jamais créé. » Charlemagne Palestine – Eupen – 2019

Mais la messe ne sera définitivement dite que le lendemain par le maître Charlemagne Palestine qui a posé ses peluches et ses bouteilles à la petite église de la paix.

Charlemagne
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Le compositeur et performeur new-yorkais explore les possibilités de l’instrument dans son intégralité dans les 45 petites minutes que dure son set. Un son fat et lourd qu’aucun Moog ou Oberheim (tous apprivoisés par Charlemagne Palestine il y a déjà des dizaines d’années) ne pourront jamais égaler. Les harmonies se chevauchent, les vibrations s’affolent et le bâtiment résonne comme s‘il allait bientôt jouir. Et quand subitement, les doigts lâchent le clavier et le silence revient, c’est la standing ovation. Tout le monde semble sous substances béatifiantes (même le Christ d’habitude si contrarié sur sa croix) et se met à applaudir longuement le winaestro (maestro alcoolisé) sauf le christ qui a les mains attachées. Passer 45 minutes en compagnie de Charlemagne Palestine est donc bizarrement efficace pour soigner sa gueule de bois le dimanche aprem.

Bref si vous aimez le bon son et la fête libre, on ne peut que chaudement recommander mais réservez vite vos billets pour l’édition 2020… seuls 500 sésames sont disponibles chaque année.

Le site web du festival

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