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À Baleapop, les yeux fermés

« Mhh… J’irais bien faire un enchaînement Negua Bilaka, Les Fils de Jacob, me reposer devant un petit Flying Baobab et reprendre un demi pendant Lumi – …???!! – Tu peux me passer le sel s’il te plaît ? » Avec cette phrase, vous ne vous ferez évidemment comprendre de personne dans ce monde. Pourtant, certains d’entre vous formuleront des incantations similaires du 24 au 28 août à Saint-Jean-de-Luz pendant le festival Baleapop. Pour sa septième édition, l’événement basque reprend les mêmes commandements : quasiment aucun nom de la programmation tu ne connaîtras, l’internet tu fouineras et ta leçon d’ouverture tu prendras.

« C’est notre chansonnnnnnnnnnnnnnn ! »

Le cerveau humain est ce qu’il est : il aime plus que tout ce qu’il connaît déjà. La pop est en cela son domaine fétiche, elle permet à l’esprit et au corps leur expression la plus immédiate et la plus sociale. C’est pourquoi en France et ailleurs, les festivals de musiques amplifiées ou actuelles, comme il faut les appeler, offrent une large place aux mélodies évocatrices, aux tubes rassembleurs, à l’effusion de la sacro-sainte joie, car « après tout, c’est un divertissement ».

On adore les Eurockéennes, les Vieilles Charrues et Rock en Seine, c’est un fait. Les différents styles de festivals vont de pair chez nous, comme un besoin de vivre en accordéon, au plus large comme au plus serré. Heureusement qu’eux et d’autres événements rassemblant des « squatteurs » existent, sans quoi il serait moins facile pour nous de définir notre propos concernant Baleapop. Et vous connaissez notre attachement à la flemme.

A la suite de cet article, vous ne serez pourtant pas étonnés que le line-up de cette année de contienne aucun des squatteurs de festivals recensés par notre étude.

baleapopaffiche

Bas les basques

Baleapop fêtera fin août sa septième édition après s’être fait balader de ville côtière en ville côtière sur l’un des plus beaux rivages de France, au Pays Basque. Bidart, Guétary et maintenant Saint-Jean-de-Luz ou plutôt Donibane Lohitzun où il a l’air d’avoir enfin trouvé sa place, Baleapop est l’exception qui confirme la règle. « Quelle règle ?! » Tout doux sur l’irouléguy, on va vous répondre. La règle, c’est celle qui veut qu’en bordure de mer, le touriste ne place pas la culture au plus haut de ses priorités. Si vous aimez le rock, la pop impopulaire ou les musiques électroniques, les politiques culturelles vous répondront 1) chants basques 2) Big Festival à Biarritz. Bref, vous n’êtes pas rendus.

baleap

Baleapop est l’affaire d’une bande de locaux passionnés, pas de Parisiens exportateurs de leur antenne à la plage comme il y en a trop – proportionnellement. Son public, malgré tout urbain et majoritairement boboïsé, est un modèle d’apaisement et d’enthousiasme. Pas de violence, c’est les vacances. Baleapop est une anomalie, le plan de tomates qui pousse sur le sable de la baie de St-Jean, le pottok écarté du troupeau, l’accent circonflexe dans un monde trop grave, il a la folie douce d’une micro-société qu’il a consciemment ralentie. Car rien ne sert de courir, il veut vous cuire à point.

Pas le choix, faut y aller

C’est l’objet de notre titre, Baleapop vous promet une chose si vous ne connaissez rien à sa programmation : avancez les yeux fermés. C’est le principe du « fonce ». « Fonce, jt’e dis » semble dire l’équipe du collectif Moï Moï à vos airs ahuris face au programme. A vos découvertes ! Seront présents : le pianiste qui harmonise le réel Chassol, le groupe de rock shoegaze aux montées infinies Suuns, le groupe de rock bordelais J.C.Satàn en formation intimiste, le producteur d’electro chicagoan Traxx, les crooners Buvette et Bernardino Femminielli. Vous les connaissez tous ? Crâneurs, crâneuses.

Vous remarquerez (ou pas, bande d’ignares) que certains artistes sont revenus jouer au pays. Ils s’appellent Radiator (avec un bout de Botibol), Lumi (avec Matthys), Panda Valium (vu dans Polygorn) ou encore Moï Moï Band (le super-groupe qui conclue dans l’hallu la plus totale le festival). Si on en oublie, veuillez vous référer au point sur la flemme sus-nommé point 1. Pour le reste de la programmation musicale mais aussi les arts graphiques, les performances, les projections, les masterclasses, les ateliers pour enfants, ils sont tous à découvrir en détail sur le site du festival.

La musique n’est pas une affaire de miel mais d’abeilles

On ne sait pas vous, mais lors de certains excès passionnels pour moultes déviances musicales, il peut être assez compliqué d’expliquer à l’autre qu’on peut aimer une musique dérangeante, qui met mal à l’aise, stridente ou extrême sans se faire traiter au mieux de hipster, au pire de junkie. « C’était vraiment bizarre », « Mais quelle merde, viens on va au bar et on reviendra pour le DJ de deep house hollandais juste après », « C’est du bruit », voilà des phrases qu’on entend souvent lorsque les événements au nez pointu prennent le risque de reléguer la mélodie au second plan, la consonance derrière les fagots, le confort au canapé.

A la place, l’idée est claire et nette : mettre en avant l’émotion pure, brute, où l’artifice est soit roi soit entièrement absent. Où les angles sont coupants. Où les meubles ne sont pas poncés mais carrément trop vernis. La musique ici se travestit, se complaît dans les ténèbres, est ridicule mais se fout qu’on la regarde de traviole, assume ses orientations, ses influences, sa sexualité, ses écarts, ses ratés, sa naïveté.

Parce qu’à 7 ans, on n’a pas raison tout le temps.

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